Dégustation au domaine ensuite. Tout est chamboulé, en chantier permanent. Une nouvelle cave est en passe d’être achevée. Elles ont poussé ici comme champignons, ces dernières années…. Lorsque tout sera fini, j’imagine cet instant, silencieux, d’un verre de vin dégusté ici même, à la verticale du fameux Rabajà, sur le lieu de sa naissance, ses notes de rose, de truffe, ses parfums de réglisse…

Bruno et Francesco Rocca : je n'aime pas les barberas marmelada !
Commençons par remettre, un peu, les pendules à l’heure. Avec une Barbera d’Asti 2005 issue de Vaglio Serra : fruits rouges, cerise, boisé discret. Texture raffinée, expansive, sapide. Tannin souple, délié. « Je n’aime pas les barbera style gang des Siciliens, marmelada, les barberas passées au concentrateur, un vrai casino… » précise Bruno
Puis le Barbaresco 2006, de belle facture, avec un (léger) décalage entre la finesse aromatique évidente et le grésillement du tannin, un peu rustique.
Puis le Barbaresco 2006, de belle facture, avec un (léger) décalage entre la finesse aromatique évidente et le grésillement du tannin, un peu rustique.
Bruno en profite pour se plaindre des tonneliers français incapables de certifier un séchage minimum de 36 mois. Guillaume de Pracomtal (Taransaud), qui déguste avec nous, conserve son flegme impertubable.
Vient le Barbaresco Coparossa 2006, assemblage d’une vieille vigne sur Neive et de Pajoré sur Treiso, tout en finesse. Nez encore un peu sur la retenue. Notes boisées, floral discret, fruits rouges. Il s’ouvre sur des notes de goudron, tabac, encens. Très belle structure, ascendante et finale d’une grande plénitude. « C’est un vin clair comme un livre ouvert » précise Bruno.
Le Barbaresco Rabajà 2006 lui fait naturellement suite : ce terroir donne des vins d’une finesse et d’une complexité hors normes et le 2006 ne déroge pas à la règle. La rose, les fruits noirs, les épices sont au diapason. Superbe bouche, admirable texture, veloutée. Un vin complet avec une évolution magnifique. Longueur. irradiante. Grand potentiel.

Maurilio (le chef et propriétaire du Tornavento) avec Andrea Sottimano.
Il est temps de prendre congé de nos amis Rocca. Pour foncer chez Andrea et Rino Sottimano, toujours sous les arches sonores de U2 !
Et, là, quel festival, également, quel éblouissement ! Les membres du GJE qui m’accompagnent n’en sont pas encore revenus. Voilà assurément un des deux ou trois autres grands de Barbaresco !
Très joli Dolcetto d’Alba 2008, Bric del Salto, fin, équilibré, sapide. Puis cet Ovni, le Langhe Nebbiolo 2007, un vrai petit Barbaresco qui arrive en droite ligne du cru Basarin. Les vignes sont encore jeunes et les Sottimano ont fait le choix (non économique) de ne pas le déclarer en Barbaresco. Tant mieux pour nous ! Il a déjà le type balsamique et réglisse des vins de Neive.
On passe au Barbaresco 2006 Fausoni, toujours sur Neive. On ne cherchera pas la puissance ici, l'énergie pure, mais quelle élégance, quelle sensation de pulposité ! Envoûtante texture raffinée et grande rectitude d’expression sur la finale, accomplie, aux notes de menthol et de réglisse. On commence à capter quelque chose de la beauté d’un grand Barbaresco, même si, comme le précise Andrea, « au moment des vendanges, personne n’aurait parié que 2006 serait aussi bon ! »

La Ciau del Tornavento, un Vitello tonnato stratosphérique…
Dans un registre très différent, voici le Barbaresco Pajoré 2006. On passe sur Treiso. On est très haut, presque à 420 m, un vrai vin de montagne. C’est un vin pour moi ! Goudron, épices orientales, vadouvan. Superbe entrée en bouche, énergique, précise. Il révèle un caractère ascendant, verticale et une sapidité minérale magnifique. Un vrai Barbaresco, buriné par le terroir.
D'un style encore différent, le Barbareso Currà 2006 (cru visité précédemment avec Bruno Rocca) : la vieille vigne donne ici au vin une vinosité et une dimension séveuse merveilleuses sur un profil aromatique beaucoup plus expansif que le Pajoré.

Le flamboyant Angelo Gaja, en grande forme. La Ciau del Tornavento.
Que dire alors du vin qui lui fait suite, le Barbaresco Cottà 2006 ? C’est la première vigne achetée par Rino Sottimano, le papa. On est sur la minéralité, le graphite avec, pour l’instant, un caractère énigmatique au niveau des arômes. Mais cela viendra. Et quel corps, monumental, d’une allonge spectaculaire, d’une incomparable vinosité ! A mettre en cave.
Nous terminons par ce chef-d’œuvre, que le domaine propose pour la première fois : le Barbaresco 2004 Réserve. Issu d’une sélection des plus vieilles parcelles de Cottà et de Pajoré (50 ans au minimum). « En 2004, on s’est rendu compte que c’était exactement ce qu’on voulait d’une Réserve. On ne veut pas des vins démonstratifs, on voulait faire un vin qui soit comme une essence de terroir… » souligne Andrea. Un Barbaresco qui met la barre très très haut. 25 jours de macération. 24 mois d’élevage et, à l’arrivée, moins de 3000 bt produites. Nez magique, complexe, sur des notes de fumée froide, de Havane, d’encens, de fruits macérés, d’épices sur fond. L’entrée en bouche est incroyable, pulpeuse, dense. Il déploie une texture ample, satinée qui réussit presque à cacher une structure énorme, à l’énergie vibrante. Très grand vin.

Une flûte de Champagne, un Baccalau façon Maurilio, coulis de persil et c'est parti !
Que d’émotions ! Ce n’est pas fini : il faudra accomplir notre destinée et grimper jusqu’au septième ciel, jusqu’à la Ciau del Tornavento, chez nos amis Maurilio et Nadia où depuis l’ouverture du restaurant, en 1992, j’ai eu le bonheur de tant de merveilleux repas. Un seul impératif aujourd’hui, légèreté absolue car un programme sévère nous attend encore cet après-midi et ce soir ! Le menu que nous a concocté Maurilio, à partir de cette contrainte, fut tout simplement grandiose.

Un seul impératif ce midi, légèreté absolue : Trappitu et Carne Cruda.
Nous y avons dégusté une Carne Cruda battuta al coltello e carpaccio, ainsi qu’un Vitello tonnato « retour aux origines », (sans mayonnaises dévoyée), tout simplement bouleversants…Et même si la cave recèle tant de merveilles, on aura connu ces bonheurs simples, un Champagne Fallet-Prévost d’Avize (excellent) et un Barolo Sori Ginestra 2001 de Conterno-Fantino.
L’adresse La Ciau del Tornavento Piazza Baracco, 7 12050 Treiso (CUNEO)
chiuso Mercoledì e Giovedì a pranzo
Tel. +39-(0)173-638333
Fax. +39-(0)173-638352
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Mamma mia Jacques, vous voulez une syncope en direct c’est ça ?
Oser me narguer avec un repas a la Ciau en compagnie d’Andrea … je perd les pédales ! Si j’avais su je vous aurais dit de l’embrasser chaleureusement et de le féliciter pour la pouponnière.
Gaja, Rocca et consorts … mais on est où là ? Sur une autre planète mes amis … Ils sont pas beaux et heureux ces Piémontais ?! La crise, quelle crise ? Vivons tout ce que l’on peut vivre …
Je vous laisse, le Piémont m’appelle, il faut que je consulte mon agenda.
C’est vrai qu’ils irradient ces Piémontais que, par aileurs, on dit rudes ! Savez-vous Paul que je suis piémontais par ma mère ! Ce pays, c’est une partie de mes racines.
Jacques, vous m’avez excité le Paulo, il est tout énervé, à 23h, merci, merci ! Je vous enverrai la facture de téléphone…
😉
Champagne Fallet-PrévostAT !
Please… 🙂
Je me disais bien, Jacques, qu’il y avait quelque chose sous ces bourrasques de ferveur, ces grains de nostalgie. A chaque fois qu’il est question de Piémont, vous semblez y flotter comme le Libeccio sur les collines.
Quant à moi, je ne sais pas l’expliquer, des racines par alliance certes, mais un je ne sais quoi de résonnant avec mon caractère, mes vibrations secrètes … Pas besoin d’expliquer en fait, sentir cette trombe vivifiante me suffit !
Ce pays me donne de l’allant, du souffle. Du bonheur en somme.
Excellent Fallet-Prévostat 1976 …
Joli contraste de couleurs sur la photo de Marie …
Très beaux souvenirs sur les Sori san Lorenzo 1986 de Gaja et le Rabaja 1990 de Chiarlo.
Un peu plus de mal avec les cuvées de Rivetti (Starderi 98 et Valeirano 99).
Moins avec Starderi 97 très moelleux, solaire, comme il se doit (épices, quinquina, résine … et marmelade de fraise).
A ton prochain passage, Grand Jacques, va goûter aussi la cuisine magnifique de Massimo al BORGO ANTICO (Barolo).
Ne pas oublier, pour ceux qui iront chez Maurilio de déguster une huile unique : celle d’Alex Nember, un fondu comme pas deux, qui fait une olio de référence, des crus, sur le lac de Garde.
Et la visite de cave à la Ciau : c’est-y pas un endroit magique, avec son coffre-fort ?
Enfin, on commence à comprendre pourquoi nos deux régions de coeur du GJE sont la Bourgogne et le Piémont.
Well : on doit rajouter l’Alsace, non ?
Paru dans le Vinifera Spécial Piémont (1999) : • La Ciau del Tornavento, piazza Baracco 7 – tél. 0173/63 83 33
Originaires de Pinerolo où ils tenaient un établissement réputé, les Garola ont repris le Tornavento il y a deux ans. Maurilio a amené une touche personnelle et créative d’une grande originalité. Tout est ici mis en œuvre pour que vous passiez quelques heures de bonheur dans ce restaurant dont l’intérieur chaleureux et lumineux contraste avec la façade austère, à la Chirico dirons-nous…
Pour ce premier Guide, nous avons choisi La Ciau del Tornavento comme restaurant coup de cœur et nous prenons les paris que, d’ici 4 ou 5 ans, il figurera parmi les meilleurs d’Italie ! La cuisine ne cesse de progresser et lors de notre dernière visite, Maurilio nous a concocté un menu d’anthologie avec quelques classiques revisités dont la carne cruda, les Agnolotti al plin servis su un nolo di fieno, un lit de foin de montagne, le majengo, fauché au mois de mai et exhalant des senteurs de fleurs et d’enfance inoubliables. Le plat suivant fut tout simplement génial et je ne résiste pas au bonheur de vous le décrire: la Testina di vitello, panatta delle nociole. De la tête de veau, panée à la noisette et servie croquante et fondante sur une salade d’herbes aromatiques et de fleurs, le tout souligné par un trait de vieux vinaigre balsamique et d’un rarissime miel de rhododendrons ! Le plateau de fromages est uniquement composé de fromages d’alpage de la région du Val Pellice.
Je ne suis pas certain que Chirico eut apprécié d’être assimilé au Duce, mais bon, tu es un garçon gentil, Grand Jacques !
Qui te parle du Duce, François ? Cela dit, même rigueur formelle, même souci de l’alignement, des perspectives "froides", des grandes places dégagées, prêtes pour la métaphysique ou la parade militaire !
Bonjour, est-ce que vous allez mettre les photos du Combal 0 à Rivoli ? La prochaine fois je vous suggère d’aller à Piazza Duomo à Alba, chez Enrico Crippa, un chef très doué. En bas il y a la Piola avec des plats traditionels écrits sur un tableau noir.. et en haut le gastro de Enrico Crippa. Le tout appartient à la famille Ceretto.
Saluti
Gregory
Bonjour Gregory: il y aura des photos du Combal.Zero de Davide Scabin. Vous avez raison : le gastro d’Enrico Crippa est également excellent. Un chef qui a eu des "maîtres" aussi prestigieux que Michel Bras, par exemple, est né sous une bonne étoile.
Décidément va falloir que j’aille trainer dans cE coin là que je connais mal mais je crois qu’il y avait déjà eu un reportage d’anthologie sur Iacchos il y a déjà quelques temps. M Mauss feriez vous le Guide?
Combal.O.ou la cuisine de David Scabin sa cuisine provoque et interpelle mêlant terroir piémontais,bourgeoiseries classiques et expérimentations débridées.La réflexion sur la forme épouse tjs celle du goût.Il y a de la pensée en mouvement,une intensité théorique d’une vitesse supersonique.Une visite indispensable pour tous les gourmets ou la terrible sensation de manger intelligent dans un cadre résolument contemporain.
Ravi de ce "post" Pascal ! Je ne savais pas que vous aviez aussi "sévi" du côté de Rivoli. Pour moi, je le redis, Combal.Zero est actuellement le meilleur restaurant du Piémont. Et comme tout est au diapason (carte des vins, service, cadre), une visite s’impose ! D’ici deux jours des nouvelles plus détaillées sur ce blog !
Alba c’est la truffe blanche d’accord!mais c’est surtout la cuisine d’Enrico Crippa.Synthèse de légèreté et de senteurs,de traditions et d’orientalisme,née sans doute de son passage chez Bras et de ses escapades japonaises.Sa cuisine tjs proche du produit pour en booster l’imaginaire.Il faudra que j’y retourne!