• Millésime de lumière plus que chaleur, 2009 fut également l’année des superlatifs et des records (anthocyanes, alcool, polyphénols).
• Moins homogène sans doute que 2005, 2009 a donné naissance à un certain nombre de vins exceptionnels, dont certains entreront dans la légende de Bordeaux.
• Le match rive droite/rive gauche n’a guère de pertinence dans ce millésime. On trouve de très grands vins sur les deux rives. Si les merlots se caractérisent, à leur meilleur, par un caractère flamboyant unique, les cabernets les plus réussis séduisent par leur structure, leur fraîcheur et leur race. Dans le match entre ces deux cépages (auxquels il faut ajouter le cabernet franc), avantage tout de même aux cabernets.
Ci-après, vous pourrez lire des extraits du Journal de Bord de l’année 2009 que Stéphane Derenoncourt a publié dans notre revue Vinifera.
A1 Domaine de l'A, Côtes de Castillon
Fruits noirs, épices, note de cacao, menthol. Très belle entrée en bouche, caressante, magnifique texture. Corps rond, suave, avec une très jolie trame, bien dessinée, et une belle fraîcheur finale. 92-94
A2 Château Pavie Macquin, St-Emilion
Robe sombre, très jeune. Nez très frais, très fruits rouges, beaucoup d’ intensité. Coulis de fruits. Dense, serré, superbe chair avec une très belle trame, très dynamique, très belle sève finale, avec de l’éclat et une grande persistance. 95
B1 Château Feytit-Clinet, Pomerol
Marqué par une prise de bois un peu violente, torréfiée. Coulis de fruits. Violette. Notes balsamiques. La race est là mais, à ce stade, il est un peu durci par l'élevage. A carafer. 92
B2 Vieux Château Certan, Pomerol
Le premier nez manque de précision. Nez d’épices. Très jolie bouche, ciselée, beaucoup d’élégance, notes de tabac, d’encens. Finale sur un tanin profondément savoureux. Un peu atypique pour un VCC, compte tenu du faible pourcentage de cabernets mais quel charme ! 96-98
C1Clos du Jaugueyron, Haut-Médoc
Notes vanillées, beurrées, poivron discret, menthol, fruits rouges. A l’ouverture, il révèle une vraie finesse. Très jolie entrée en bouche, sapide, précis. Notes de violette, d’encre. La trame est très fine, ce n’est pas un vin très large. D’une forme élancée, il révèle une très jolie densité. Finale sur la fraîcheur. 90
C2 Domaine de Chevalier rouge, Pessac-Léognan
Belle robe. Nez discret de prime abord. Il s’ouvre ensuite sur des notes très pures, balsamiques et épicées (tabac). Superbe approche tactile. C’est un vin de grande race car il associe concentration, sève et finesse. L’expression juste d’un grand Bordeaux sur l’élégance. Le public de la soirée ne s’y est pas trompé : dans cette série, !l a plébiscité ce vin (dégusté à l’aveugle) ! 93-95
C3 Château Sociando-Mallet, Haut-Médoc
Notes de fruits noirs, balsamique, réglisse. Entrée en bouche charnue, beau volume de bouche. Tanin ferme et finale racée, expressive. Un remarquable Sociando-Mallet ! 91-93
D1 Château Marquis de Terme, Margaux
Notes boisées. Fruits noirs. Tabac. Beaucoup de charme immédiat sur ce vin. Entrée en bouche souple, voluptueuse. Très joli toucher de bouche. Il se déploie sur une texture suave, fondante. Avec de beaux tanins, précis et une finale fruitée. 92
Robe sombre. Beaucoup de race et de précision au nez. Notes de fruits noirs, nuances balsamiques, fruits noirs, de cacao. Corps magnifiquement sculpté, long et séveux. Les tanins sont profonds, d’un grain très fin et la finale expansive. Il confirme toutes les promesses de la dégustation Primeur et mieux encore ! 96-98
D3 Léoville-Barton, St-Julien
E1 Les Forts de Latour, Pauillac
Notes de cèdre, de cuir, de Havane. La signature du terroir est là. Belle bouche à la texture souple, qui se densifie à l’évolution. Finale racée sur des notes de cèdre et d’épices 92-94
E2 Château Pontet-Canet, Pauillac
Nez profond, aromatique, superbe richesse de constitution, belle densité avec un tanin idéalement mûr, grande texture veloutée et finale interminable. 96-98
Très beau nez, précis, minéral. Très fin, très racé. Superbe entrée en bouche, précise. Corps magistral, à la trame superbe, millimétrique. Très Pauillac. Admirable ! Le vin de la soirée pour beaucoup de participants 96-98
(texte publié dans son intégralité dans Vinifera 42).
Avril
Chaque annonce d’éclaircie donne un peu d’espoir quant à l’arrivée du beau temps, mais celui-ci ne s’installe pas. Si les températures restent basses, les pluies continuent de gorger copieusement les sols. (…) La dernière semaine sera la plus arrosée et permettra aux statistiques de mettre Mars/Avril au rang des mois les plus froids des dix dernières années.
(…) Le printemps s’installe enfin ! La priorité de début de mois sera de passer dans les sols gorgés d’eau afin de protéger les jeunes pousses : le contexte est en effet plus que favorable à l’installation du mildiou. (…) il fait chaud, parfois très chaud, mais l’évaporation des sols entretient l’humidité, et les journées sont encore bien courtes. D’ailleurs l’anticyclone peine à s’installer et la pluie demeure présente, sous forme d’orages. Des orages fréquents, menaçants, et parfois meurtriers, tels ceux qui s’abattent sur Bordeaux entre les 11 et 13 mai. Je parcours le vignoble le 14 en assistant à un spectacle de désolation. Certains perdront la quasi-totalité de leur récolte, c’est terrible ! (….)
Le beau temps semble définitivement installé et la force de la sève montante a repris ses droits. Du premier au 15, la floraison commence. Cette courte période justifie à elle seule d’embrasser une carrière de vigneron, tant il est divin de se promener dans le vignoble en assistant au spectacle de l’explosion des boutons floraux, saturant à l’infini l’atmosphère d’un subtil parfum de fleur, un lilas sans vulgarité dans les merlots, accompagné d’une touche de poivre blanc dans les cabernets. (…)
Le soleil campe sur ses positions : nous n’avons eu que 16 mm de pluie sur les deux mois. On ne constate pourtant que très peu de stress hydrique. La vigne est belle, les travaux de palissage s’achèvent. Il y a peu d’intervention en vert à exécuter, la récolte n’est pas pléthorique. (…)
(…) Le temps est avec nous, la vendange parfaitement saine : c’est le luxe suprême que de pouvoir déterminer avec précision les dates de ramassage, sans stress. De 2009, nous garderons aussi ce souvenir de vendanges parfaitement sereines. Elles commenceront autour du 20 septembre avec les merlots des sols précoces pour s’achever au 15 octobre avec les cabernets les plus tardifs.
La beauté des raisins dans ce millésime s’est édifiée sur l’alternance du très froid, de l’humide, à la chaleur et la sécheresse. La vigne a pu puiser dans les réserves du sol. Au final, nous avons un raisin peut-être plus difficile à comprendre qu’il n’y paraît, tant le potentiel de puissance est faussement rassurant. (…)
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