En route pour l’île de Nisis Sapiéntzia dont le nom à lui seul est un augure favorable. J’ai toujours aimé ce croisement, cette rencontre idéale entre la saveur et la sagesse…
Au passage, voici Méthòni dont Homère vantait et les vignes et le vin. Surnommé l’ »œil de la république » ce petit port nous rappelle qu’avant d’être pris par les Turcs qui y édifièrent une tour, l’endroit fut vénitien (merci la quatrième Croisade…)
Cervantès aurait été emprisonné dans ce bourdzi et Don Quichotte pourrait avoir trouvé ici un de ses motifs d'exister…
Crique de Port Longos près de Nisis Sapiéntzia. Mer Ionienne.
« La nuit venait ; les îles montaient à l’horizon, flottant au dessus de la mer, toujours, n’y reposant pas. Les étoiles parurent, magnifiques d’éclat ; la brise était un velours de fraîcheur. Et d’un coup je commençai à deviner, à sentir ce que serait la Grèce, ce qu’elle sera toujours, quand bien même elle aurait le malheur d’être envahie par les touristes américains. »
Henry Miller, le Colosse de Maroussi
Aucun touriste américain ici. Nul bateau à l’horizon. La mer est déserte lorsque nous faisons route, le jour suivant, pour les Nisides Strofadhes, deux îlots perdus au milieu de la mer ionienne.
Nisides Strofadhes, le monastère de Ay Panayia.
Sur le plus grand se trouve un étrange bâtiment, bastion protégé, construit au XIIIe siècle. C’est le monastère de Ay Panayia où vit un moine solitaire qui s’occupe de sa vigne et de ses chèvres.
J’aurais voulu accoster et goûter son vin mais la mer tourmentée a rendu l’opération impossible.
En face, c’est Nisis Arpia, minuscule, sauvage, avec un petit sanctuaire. Nous y sommes arrivés à la nage. Sur un promontoire, à côté d’une ruine, un lieu de prières, une petite chapelle qui a résisté à toutes les intempéries.
Qui vient ici, à part nous ? Des pèlerins de hasard ? Des chasseurs également, à en juger par le nombre de douilles à terre.
Je garderai toujours cette vision des Strofades comme un fragment d’éternité, un espace-temps différent au milieu des éléments et je ne peux m'empêcher de penser à ce vin monastique produit sur cette île. Il doit avoir, c'est sûr, le goût du vent, des embruns, de la lumière implacable, des silences qui nous bouleversent.
Après cette visite, quelques milles marins plus loin, cet autre joyau : l’île de Zanté ou Nisos Zâkinthos, décrite ainsi par Lawrence Durrell :
« Il n’y avait plus qu’en Italie que l’on pouvait retrouver aussi ce style baroque, pur produit des XVIIe et XVIIIIe. Mais en 1953 se produisit l’ultime tremblement de terre qui engloutit la totalité du passé vénitien et laissa la ville brisée. Elle s’est relevée cependant mais c’est est une belle femme défigurée par le vitriol. Tout ce qui reste de sa beauté, c’est, çà et là, un arc, un chapiteau ou un segment d’arcade brisée. »
Lawrence Durrell, les îles grecques.
Une crique à peine irisée par la houle, un amarrage grec classique pour passer la nuit en toute quiétude.
En face, sur la colline, quelques luxueuses demeures étagées scintillent. Sans mémoire du temps qui s'est enfui et des séismes qui dévastèrent la belle Zanté.
En face, sur la colline, quelques luxueuses demeures étagées scintillent. Sans mémoire du temps qui s'est enfui et des séismes qui dévastèrent la belle Zanté.
Nàvapktos où eut lieu la bataille de Lépanthe. Cervantès y participa.
Un hidalgo ingénieux, un audacieux, sorti tout armé d’un océan de mots, passe dans la nuit ionienne à la poursuite de ses chimères.
Est-il suivi par son serviteur ? Comment en être certain ? Il revient de la guerre. Il a vu les boulets, les salves, les morts innombrables de Lépanthe, à quelques encablures d’ici. La tête de l'amiral de la flotte turque accrochée au grand mat, d'un navire espagnol, aussi…
Près de petit port de Nàvapktos où nous serons demain.
3 Comments
Salut, Jacques …
J’ai passé quelques jours sur Zakynthos (Zante) dans les années 80.
Merci pour ce voyage par procuration.
Voyage à la sainte montagne : http://www.le-livre.com/fiche-RO...
Je reconnais bien l’Isle Saint-Louis sur cette image.