Gouges en verticale, ça manque pas d’allure et ça claque bien ! Les fidèles, les fervents, les (BWGP) Burgundy Wine Geeks in Paradise, tous se sont retrouvés mardi dernier au CAVE à Gland pour cette dégustation verticale animée par Jacky Rigaux. Douze millésimes de Pruliers et de Saint Georges, face à face. Oh ! rassurez-vous, pas de mano a mano, mais un match amical.
Résultat ? Léger avantage au Saint-Georges sur le plan du volume, de la trame et de la profondeur. Normal. La géo-sensorialité traduit le génie du lieu. On est dans un « haut lieu » avec un petit peu de colluvions qui recouvrent la roche-mère, à mi-pente et plein est, là où l’on trouve les meilleurs limons. Mais attention, ce n’est qu’une question de nuances et d’esthétiques et Les Pruliers, idéalement située à la sortie du village, à mi-coteau, ne manquent pas d’arguments. Avec un soupçon d’austérité au départ, ils donnent au vieillissement des vins de grande race, comme on a pu le constater lors de cette verticale.
Jacky Rigaux a rappelé que le domaine Gouges se trouve avec quelques autres à l’origine du renouveau des vins de lieu et de climats gravement menacés au début du XXe par le négoce qui, après la crise du phylloxera et, le raisin manquant, entendait développer l’art de faire des vins d’imitation et privilégiait le vin de marque au détriment du vin de terroir. C’est le fameux compromis de Dijon à travers lequel les négociants dijonnais ont bien failli signer l’arrêt de mort des vins de lieu et climats. Prochainement, ici, vous pourrez voir une video où Jacky Rigaux revient sur ce moment où l’histoire de la Bourgogne a manqué de basculer.
La verticale
Nuits St-Georges 1er Cru Les Pruliers 2005
Il a gardé une très belle robe. Grande finesse d’expression au nez. Sur la framboise et la ronce. Corps digeste, énergique et ciselé, très droit d’une pureté d’expression exemplaire.
Nuits St-Georges 1er Cru Les Saint Georges 2005
Le nez est plus énigmatique que sur les Pruliers. Belle densité en bouche, avec une vraie impression minérale, et un volume plus important que celui de Pruliers et une texture très aboutie. Il offre en revanche un peu moins de pureté d’expression que Les Pruliers.
Nuits St-Georges 1er Cru Les Pruliers 2006
Nez crémeux et lactique. Facile d’accès, sensuel, d’une consistance souple, il n’offre pas la dimension d’énergie du 2005 et le tanin est marqué par une légère pointe de sécheresse. La réglisse et les fleurs séchées sont au rendez-vous dans la finale.
Jacky Rigaux rappelle que 2006 est l’année où Gregory Gouges commence à travailler au domaine. La proportion de fût neuf augmente un peu et voit l’arrivée d’un autre tonnelier.
Nuits St-Georges 1er Cru Les Saint Georges 2006
Dans ce millésime, ce vin domine le débat en dépit d’une note un peu animale. Superbe trame, long développement. L’assise tanique est remarquable et la finale, persistante, signe le grand vin avec ses notes de réglisse, de caco, d’épices douces.
Selon Jacky Rigaux, 2006 est un millésime qui, quand il est réussi, comme c’est le cas ici, ira loin, parce qu’en 2005, certains vignerons ont été un peu laxistes dans les rendements.
Nuits St-Georges 1er Cru Les Pruliers 2007
Nez sur des notes poivrées, balsamiques. Un peu fermé. Ce sont d’ailleurs, comme l’a souligné Nicolas Herbin, davantage des vins de bouche que des vins de nez. Corps doté d’une belle énergie et finale souple et évasée.
Nuits St-Georges 1er Cru Les Saint Georges 2007
Robe profonde qui « tire bien l’œil ». Nez complexe, mais également un peu fermé. Volume de bouche et une certaine amplitude lui confèrent une autorité naturelle par rapport au précédent, mais il se goûte déjà bien aujourd’hui.
Nuits St-Georges 1er Cru Les Pruliers 2008
C’est le premier millésime où Gregory Gouges a eu les coudées franches et les deux vins apparaissent très homogènes.
Beau rubis intense. On perçoit un peu plus de bois neuf sur ce vin. Belle densité et équilibre en bouche. Dans ce millésime, le vin souvent filiforme, ce vin étonne par sa chair qui, associée à la tonicité du millésime. Grande finale, éclatante. (Un peu de vendange entière ?)
Ce millésime, rappelle Jacky Rigaux, a été sauvé par la deuxième moitié de septembre. C’est un millésime de luminosité plus que la chaleur. La concentration est venue sur la fin de parcours avec une diminution importante de volume.
Nuits St-Georges 1er Cru Les Saint Georges 2008
Premier nez sur le fruit avec un côté crayeux. Grande texture ample, consistance et dotée d’une belle flexibilité et finale stylée. Le vin est bien né et bien élevé. Et sieur Rigaux de citer celui qui fut son maître : « si on veut que le vin exprime totalement sa texture, il faut qu’il soit bien élevé ! Le vigneron doit être en harmonie avec les différents tempos, le temps de la vigne, le temps de la vinification et le temps de l’élevage. »
Nuits St-Georges 1er Cru Les Pruliers 2009
Le changement dans l’élevage est ici patent. Pour le plus grand bien du vin. Nez profond, complexe, sur les épices, la ronce. Corps ample, assez solaire, mais avec une trame acide continue et une envolée finale sur la réglisse. Un des participants se demande si l’on n’a pas retouché l’acidité.
Nuits St-Georges 1er Cru Les Saint Georges 2009
Notes de fruits très mûrs, légèrement confits, qui tirent presque sur la pêche et l’abricot. En comparaison avec les Pruliers, il apparaît plus évolué au niveau aromatique. Le corps est dans cette continuité. La texture est généreuse, suave et le vin arbore un côté solaire, baroque, un peu décadent.
Nuits St-Georges 1er Cru Les Pruliers 2010
Nez réduit, marqué par un mercaptan de bois. Dommage, car la bouche est belle, stylée, énergique avec une assise tanique ferme et équilibrée et une belle tension, en dépit d’une légère sensation de sucrosité apparaissant sur la finale.
Nuits St-Georges 1er Cru Les Saint Georges 2010
Le bois est mieux intégré ici. Bouche ample, généreuse, dotée d’une grande vinosité avec une dimension séveuse qui, dans ce millésime, le place bien au-dessus des Pruliers. C’est une superbe réussite !
Nuits St-Georges 1er Cru Les Pruliers 2011
Le défaut que l’on trouvait sur le 2010 a été corrigé et l’élevage est bien plus précis dans ce millésime. On retrouve les grands Pruliers, dans un registre de ronce et de baies très pur. Le corps est à l’avenant, droit, précis et finement articulé.
Nuits St-Georges 1er Cru Les Saint Georges 2011
Nez assez discret de prime abord. Belle bouche. Le corps est nuancé et ascendant, d’une belle consistance. Beaucoup de plénitude sur ce vin, même s’il n’offre pas l’allonge du 2010.
4 Comments
Excellent article. Une question, les vins de Gouges ont la reputation d’avoir besoin d’au moins 20 ans pour etre abordable.
Ceci n’apparait pas dans votre rapport. Qu’en pensez vous sur cette degustation?
Bu hier soir le Les St-Georges 2000, pas inintéressant mais un peu maigre …
Comme déjà vu dans cette précédente mini-verticale :
http://www.invinoveritastoulouse.fr/index.php/degustations-thematiques/verticales-domaine/456-20081114-gouges
Bu en avril 2014 un NSG Clos des Porrêts St G. 1999 : sublime, magnifique évolution, il y avait encore du fruit au travers des signes d’évolutions bien marqués : sous bois, humus, champignon d’automne. Grand souvenir.