Hubert de Montille s’en est allé rejoindre Sem d’Angerville et Henri Jayer au Panthéon des vignerons bourguignons. Comme eux il a voulu que la Bourgogne reste fidèle à elle-même : la terre du « vin de lieu », la terre du « vin de climat », la terre du vin au « goût de lieu » ! Contre la tentation de la marque, qui cherchait à associer aux vins du lieu, des vins de niveau équivalent venant d’ailleurs, le premier, volnaysien de la Côte de Beaune, s’était élevé, aidé par des hommes de la trempe d’Henri Gouges, le nuiton, chantre de la Côte de Nuits.
Comme Henri Jayer, Hubert de Montille a défendu la cause du vin authentique, fidèle à son climat de naissance. Pas d’artifice œnologique inutile comme la levure sélectionnée ou la gomme arabique, priorité à la sélection massale qui privilégie le pinot fin, respect des bonnes pratiques, élevages soignés en fûts de chêne, longues macérations, vins élaborés pour la garde… Il fut un des premiers à mettre ses vins en bouteille au domaine, un des premiers à être l’ami des grands chefs et des sommeliers, un des premiers à constituer une clientèle de grands amateurs. Il aimait les recevoir, comme il aimait déjeuner ou dîner chez les chefs, grands ou grands en devenir, ou simplement bons cuisiniers célébrant les bons produits, y associant les bons vins… Il aimait aussi les vignerons, ceux de Volnay, de Pommard et d’ailleurs. Pamela et Aubert de Villaine, en particulier, étaient de précieux amis, très proches également de son épouse, Christiane.
Quand Hubert dit adieu à cette dernière, en 2008, ses amis vignerons, restaurateurs, amateurs.., étaient là pour l’accompagner. « Elle me manque ». Il le disait souvent. Tu nous manques déjà, cher Hubert, mais ta présence restera en chacun de ceux qui t’ont connu, stimulante et chaleureuse.
Ce couple rayonnant, que faisaient Christiane et Hubert, activateur généreux d’altérité, offrit aux trois enfants qui en furent le fruit, la précieuse capacité à oser être eux-mêmes.
Comme Jean Laplanche, à qui il rendit un émouvant hommage lors de ses obsèques, Hubert de Montille a mené de front deux carrières avec la même exigence, les mêmes valeurs, celle d’avocat et celle de vigneron. Ouvert ainsi à des engagements différents, il cultivait l’art de vivre à la française, un art de vivre universel, celui qui associe la libre pensée, la libre parole, l’humour, l’activation de ce qu’il y a de bien en chacun de nous, l’audace, la curiosité, la quête du beau, l’esthétique du bon goût dans toutes ses facettes, de la gastronomie à l’art sous toutes ses formes… Un goûteur, un esthète, un homme d’action, un grand homme tout simplement, car c’est dans la simplicité d’être que se lit la grandeur d’être !
Mon cher Hubert, tu nous as donné de belles leçons de vie quand tu étais avec nous, tu continueras à les activer par ton indéfectible présence en nous, maintenant que tu as rejoint le Panthéon des vignerons !
Et je voudrais te remercier de m’avoir transmis, comme l’a fait également Henri Jayer, toi chantre de la Côte de Beaune, lui de la Côte de Nuits, l’amour des « climats », modèle de tout vin de lieu, et l’amour de la « dégustation géo-sensorielle », qui leur est consubstantiellement attachée. Sans vous deux je n’aurais pas saisi ce qui est était une évidence pour vous deux, et qui l’est devenue pour moi : le vrai vin, c’est le vin de lieu. Le bon goût, c’est le goût de lieu. Ce qui est vrai pour la Bourgogne l’est également pour les autres vignobles. Ne lâchons rien de ces valeurs malgré la forte pression des vins de type agro-alimentaire, techniques et industriels… C’est avec le modèle des vins de lieu, à la diversité de goûts infinie, sincères et purs, respectueux de leur terre de naissance, que la planète a quelques chances d’être sauvée et l’humanité avec ! Et si je m’efforce de transmettre ce message, c’est d’abord grâce à vous deux ! Et je me réjouis de voir Volnay s’imposer comme un des fers de lance de cette belle viticulture de lieux… Tu y es pour beaucoup très cher Hubert !
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Magnifique et merci aux gardiens du temple que vous êtes.