Jeune écrivain prodige, adoubé par Mauriac, Aragon et Ponge dès la parution de son premier livre, Une curieuse solitude, Philippe Sollers se distingue d’emblée par ses talents multiples, dont celui de capter comme nul autre l’air du temps. Un jeune homme pressé d’en découdre, d’arriver. Où ? Il le saura plus tard. Pari : on me lira, on me relira. En attendant, il expérimente cette évidence, qu’il a découverte très tôt. Je commence à comprendre que la clé des situations se trouve dans le sexe et les livres. A nous deux Paris, donc ! Rencontre avec Dominique Rolin. Figure initiatrice. Mon destin est là, aucun doute. Puis ce sera Tel Quel, bric à brac conceptuel qui navigue à vue entre le structuralisme, la sémiologie, la poétique, le lacanisme et le formalisme russe. 200 numéros publiés. La suite s’appellera l’Infini… Qu’on en finisse pourtant ! Qu’en restera-t-il ? C’est très bon à 70 %, proclame Sollers. Et puis, là au milieu, comme un séisme, Mai 68 et ses courants souterrains, ses mutations, son laboratoire ! L’histoire en marche. Quelques pages excellentes la traversent.
Sollers ou l'art de transformer Sarkozy en révolutionnaire !
Trop courts les portraits – ils étaient cryptés dans Femmes – des figures tutélaires de ce temps, aujourd’hui disparues : Lacan, Foucault, Barthes et consorts. S’il est partout, à la croisée de tous les chemins, Sollers est d’abord son propre hagiographe. Il gravite dans de multiples cercles, sonde les courants intellectuels, manœuvre, conspire, intrigue, fait souffler un faux air de liberté sur ce marigot, moralise, stigmatise, s’étourdit, prédit, s’encalmine parfois, rebondit, fait sécession, moine dans sa cellule d’écriture, baise, encore et toujours.
Vous lirez au fil des pages de ces Mémoires quelques-unes des vies, vraies ou transposées, de ce jeune homme pressé, originaire d’un pays de vin, pétri de tant de talents, libertin, frivole, grave, ironique, hanté. Vous entrerez dans ce vide, mineur incertain, la lampe au front, pour y découvrir, dans les étais douteux et l’enchevêtrement des galeries, une pépite (un joyau ?) à chaque page.
Vous lirez au fil des pages de ces Mémoires quelques-unes des vies, vraies ou transposées, de ce jeune homme pressé, originaire d’un pays de vin, pétri de tant de talents, libertin, frivole, grave, ironique, hanté. Vous entrerez dans ce vide, mineur incertain, la lampe au front, pour y découvrir, dans les étais douteux et l’enchevêtrement des galeries, une pépite (un joyau ?) à chaque page.
Ce qui fait sourire pourtant : son sens de la dialectique hérité sans doute de ses lectures assidues des textes inoubliables du Grand Timonier :comme je ne peux pas obtenir l’approbation de mon époque (surtout à cause de mes romans trop libres), je pense qu’il est nécessaire d’utiliser, au moins, sa réprobation.
Ce qui agace souverainement : son autosatisfaction permanente.
Ce qui est préoccupant: la fable qui relate l’audience que lui accordée Jean-Paul II…
Ce qui est préoccupant: la fable qui relate l’audience que lui accordée Jean-Paul II…
Les «fées» qui se sont penchées sur son berceau d’écrivain : Mauriac, Aragon, Ponge…
L’homme qui le fascina : Bataille, le seul à m’avoir donné l’impression directe du génie.
La rencontre qui ne s’est pas faite : Deleuze, trop grinçant. Je réentends la voix sifflante de Deleuze aux longs ongles (très bon Proust, très bon Nietzsche), me reprochant avec violence d’aimer Georges Bataille, sans que je comprenne vraiment pourquoi
Ses obsessions : du coton dans les oreilles (à propos de Michaux). Françoise Verny, grosse baleine décomposée à la dérive. La momie Mitterand
Ceux qu’il déteste : Modiano, Le Clézio et Kundera. Ils seront pléadisés avant lui…
Son prétexte : les femmes. Toujours les femmes.
Ce qu’il nous épargne… il m’est arrivé de baiser avec le néant, et de coucher plusieurs fois avec la mort. Je vous épargne les détails, ce serait pénible.
La rencontre qui ne s’est pas faite : Deleuze, trop grinçant. Je réentends la voix sifflante de Deleuze aux longs ongles (très bon Proust, très bon Nietzsche), me reprochant avec violence d’aimer Georges Bataille, sans que je comprenne vraiment pourquoi
Ses obsessions : du coton dans les oreilles (à propos de Michaux). Françoise Verny, grosse baleine décomposée à la dérive. La momie Mitterand
Ceux qu’il déteste : Modiano, Le Clézio et Kundera. Ils seront pléadisés avant lui…
Son prétexte : les femmes. Toujours les femmes.
Ce qu’il nous épargne… il m’est arrivé de baiser avec le néant, et de coucher plusieurs fois avec la mort. Je vous épargne les détails, ce serait pénible.
Son grand libérateur : Nietzsche et, pour une fois, il a cent fois raison !
Ce qui le contente le plus : le suffrage à vue (Casanova) qu’il a exercé sans merci. Jusqu’à cinquante ans, précise-t-il…
Ce qui est consternant : sa manie de l’autocitation
Ce qui est mystérieux : l’emprise qu’a sur lui la ville de Venise. Son côté Paul Morand…
Le siècle dans lequel il aurait pu vivre ? Le XVIIIème siècle. Comme une évidence…
Ce qui est incompréhensible : son admiration pour Heidegger…
La rencontre qui s’est mal passée ? Blanchot, grand Inquisiteur. Electricité négative. Pouvait-on imaginer deux hommes aussi différents, aussi éloignés l’un de l’autre ? Aux antipodes. L’écrivain mondain, ambitieux, bavard, frivole et le critique austère, silencieux, invisible.
Ce qui est éblouissant : sa manière de mettre en scène l’érudition et d’écrire léger, dansant, alerte.
Ce qui est émouvant chez lui : ce côté enfant perdu, son besoin éternel de reconnaissance.
Ce qu’il dit de Genève (pour l’anecdote) : et salut, en passant, au bar de l’hôtel Richemond, où des femmes un peu mûres, en noir, attendent l’occasion favorable.
Ce qu’il admire (à part lui-même) : Julia Kristeva, sa femme, son double féminin ?
Un des meilleurs chapitres du livre : Reprise, sur le thème de l’éternel retour cher à Nietzsche.
Sans la musique ? Impossible ! Qui ? Bach, Mozart, Monteverdi, Haydn…
Ce qui le contente le plus : le suffrage à vue (Casanova) qu’il a exercé sans merci. Jusqu’à cinquante ans, précise-t-il…
Ce qui est consternant : sa manie de l’autocitation
Ce qui est mystérieux : l’emprise qu’a sur lui la ville de Venise. Son côté Paul Morand…
Le siècle dans lequel il aurait pu vivre ? Le XVIIIème siècle. Comme une évidence…
Ce qui est incompréhensible : son admiration pour Heidegger…
La rencontre qui s’est mal passée ? Blanchot, grand Inquisiteur. Electricité négative. Pouvait-on imaginer deux hommes aussi différents, aussi éloignés l’un de l’autre ? Aux antipodes. L’écrivain mondain, ambitieux, bavard, frivole et le critique austère, silencieux, invisible.
Ce qui est éblouissant : sa manière de mettre en scène l’érudition et d’écrire léger, dansant, alerte.
Ce qui est émouvant chez lui : ce côté enfant perdu, son besoin éternel de reconnaissance.
Ce qu’il dit de Genève (pour l’anecdote) : et salut, en passant, au bar de l’hôtel Richemond, où des femmes un peu mûres, en noir, attendent l’occasion favorable.
Ce qu’il admire (à part lui-même) : Julia Kristeva, sa femme, son double féminin ?
Un des meilleurs chapitres du livre : Reprise, sur le thème de l’éternel retour cher à Nietzsche.
Sans la musique ? Impossible ! Qui ? Bach, Mozart, Monteverdi, Haydn…
Philippe Sollers, Un vrai roman – Mémoires, Plon.
10 Comments
Bon, et beh, après avoir lu tout cela, je ne regrette pas de n’avoir point plongé dans l’un de ses ouvrages et mes nuits n’en seront pas tourmentées. Bel exemple de nombrilisme parisien qui, sauf pour un Perrin assoiffé de littérature (et bien trop respectueux des maîtrillons de la rive gauche) et quelques autres, ne traversera pas si souvent le périf de la capitale.
Je donnerai tous les ouvrages de ce zozo pour une seule cordée avec Messner.
Point de regrets, vraiment ? Sur le plan de l’écriture et sur le plan du foisonnement intellectuel, il y a là quelques beaux filons !
On peut sortir grandi de l’avoir aimé mais les motifs de le détester sont les mêmes que ceux qui nous le font aimer… C’est dire l’ambiguité et la complexité du personnage.
Ouaips : OK à le mettre sur les listes des lectures à faire, niveau lettre "z". Mais simplement relire les dix premières pages d’Isabelle de Gide, c’est s’inonder d’un superbe français, si fluide, si élégant, si beau, qu’il faudrait des tonnes de ton ambigu du jour pour arriver au talon de l’immense Gide.
En littérature, comme en vin, il faut se concentrer sur l’essentiel : le Dr Bonobo nous le redit tous les jours ! Et "son" essentiel est primordial pour sa survie, non ?
A propos de la Pléiade, la collection que tout un chacun respecte : il serait passionnant de savoir quels auteurs sont les plus vendus… et surtout les ouvrages qui ne sont pas mis de facto dans une belle bibliothèque de la rive gauche, mais effectivement lu de la première page à la dernière.
J’ai comme une sombre idée que la littérature en France vend plus d’ouvrages jamais ouverts que de livres réellement lus. D’ailleurs, je suis le premier sur la liste : bien plus d’ouvrages jamais ouverts que d’ouvrages lus, l’ensemble étant commodément renvoyé aux calandres grecques d’une retraite que l’on ne connaîtra probablement jamais !
« Calendes grecques » se dit, comme chacun sait, de jours impossibles, qui jamais n’existeront. Il s’agit ici de jours qui n’ont jamais existé ou ont existé différemment, et que l’auteur invente au fur et à mesure, en développant la parabole d’une vie imaginaire. Imitant ces estampes populaires où sont représentés les divers âges de l’homme du berceau à la tombe, le long d’un escalier qui monte et qui descend. »
Gesualdo Bufalino, Calendes grecques.
Un très beau livre paru chez Verdier ! Quant à Gide, ça n’a jamais été my cup of tea !
Calende, calandre : le *** des frères Alajmo ! Voilà un lapsus proche du péché véniel !
Gide : comme il n’a jamais été torturé à la Sollers, comme il écrit mille fois mieux que lui (personne n’arrive à sa cheville dans la pratique écrite, dans la musique, de la langue française) , normal qu’il n’excite point les neurones philosophiques de notre Hôte ! .:)))
Je reviens sur Sollers que je viens de voir aux infos éructant contre Sarkozy. Il a du punch, finalement, ce garçon !
Tiens, comme c’est étrange, regardez ce qui se passe aujourd’hui en France. Début d’embrasement ?
GIDE celui qui écrivait "la position de Nietzsche à l’égard du Christ est très analogue à la mienne" ou "Suis ta pente, Nathanaël, mais en montant" ??effectivement quel talent! ?? J’ai toujours trouvé dans les écrits de GIDE autant d’émotion que dans un rapport de médecin légiste!
Ouf ! C’eut été dramatique que nous partagions la même opinion sur Gide ! Vive la diversité !
Et je trouve fascinant les rapports des légistes, si crus et directs face à des torrents d’émotion potentiels !