Trouver un peu de temps pour visiter ses vignes. Non pas celles, glorieuses, de l’Hermitage mais un autre vignoble, plus secret, caché, connu que des initiés. Un lieu immémorial, intimement lié à l’histoire de la famille Chave – un lieu-dit «Chave » se trouve d’ailleurs juste au-dessus de Bachasson, l’endroit où Jean-Louis a concrétisé un rêve, redonner vie au vignoble de ses lointains ancêtres.
On connaît l’histoire des Chave, vignerons de père en fils depuis le XVème siècle, paysans ardéchois descendus de leurs collines, « anoblis » par l’Hermitage. Quittant Tournon, direction St-Jean-de-Muzol et Lemps, (deux des six villages qui constituent le berceau historique de l’appellation St-Joseph), on entre dans une petite vallée latérale, perpendiculaire au Rhône, un lieu de silence et de méditation, avec un coteau abrupt, orienté plein sud. Le terroir est constitué de granites très décomposés, riches en fer avec un ph quasiment neutre. Le chêne vert, arbre sudiste, s’y épanouit. Derrière l’abondante végétation subsistent encore les traces des murets de soutènements par lesquels s’étageait le vignoble jusqu’à sa ligne de crête, un peu plus haut.
Jean-Louis Chave : mes racines sont ici. Juste au-dessus, le lieu-dit s'appelle "Chave".
C’est là, au lieu-dit Bachasson que Jean-Louis Chave a retrouvé ses racines, ses sources lointaines, ses chants et ses horizons perdus. En défrichant et reconstituant, pierre après pierre, mur après mur, le vignoble que les générations précédentes avaient dû abandonner au moment du phylloxera. L’aventure a commencé en 1996 et témoigne d’une passion et d’une fidélité aux origines devant lesquelles on ne peut qu’être admiratif.
Un granite décomposé, très riche en fer. Vallée de Lemps, Bachasson, janvier 2009.
« Avec le temps, les choses se font… C’est une passion avant tout mais je pense que cela a un sens. Du moins, je l’espère » dit Jean-Louis Chave en conclusion de l’interview réalisée in situ, au milieu des vignes de Bachasson :
C’est à travers de tels moments, rares, que le monde du vin demeure unique, irremplaçable. L’époque un peu folle, que nous traversons, avec son impatience, ses frénésies, ses chimères, gagnerait à ne pas trop s’éloigner de tels modèles. Durant des siècles, des vignerons opiniâtres se sont accrochés à ces pentes parce qu’ils croyaient aux vertus de ces terroirs. Le temps a passé. Une chape de silence a recouvert ce pan d’histoire. Et voici que l’un d’eux, un fils lointain, se dresse devant cet oubli et a rêvé de retrouver le goût des vins qui se produisaient ici autrefois, d’accrocher ses rêves à ses racines et de restituer ce terroir magnifique à sa vocation originelle. Car tout grand vin trouve son ancrage dans ce double mouvement : la transmission d’une vision et une forme d’abnégation.
L'autre projet de Jean-Louis Chave : ses vignes des coteaux de Mauves.
En conclusion, et puisque, pour une fois, il a été peu question de l’Hermitage à propos de Chave, je voudrais rappeler ici qu’il existe un projet de classement de la colline de l’Hermitage. Celui-ci permettrait de préserver et de pérenniser un site majeur des Côtes du Rhône dont la surface viticole est d’un peu plus de 130 ha. Il y a quinze jours, Jean-Louis Chave qui était président du syndicat des vignerons de l’Hermitage a donné sa démission, visiblement dépité. Le projet auquel il croit se heurte hélas à quelques très vives oppositions.
Le coteau de Mauves. Victor Hugo appréciait déjà ce vin.
Pourquoi ? Parce que quelques personnes n’ont pas compris, pour reprendre la très belle formule de St-Exupéry, qu’ »un domaine viticole n’est pas la somme des intérêts, mais celle des dons ». Et quel est l’intérêt personnel de certains en l’occurrence ? Ne pas vouloir renoncer, le cas échéant, aux monstrueux panneaux publicitaires qui strient les hauteurs du vignoble… En effet, un tel projet ne pourrait considérer que de telles affiches fassent partie du patrimoine de l’appellation. Egocentrisme, quand tu nous tiens !
Demain la légende d'Offerus et le Jarret de veau qui l'accompagne
Après demain La Pyramide à Vienne
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Formidable.
Ma dernière visite au domaine fut plus que probante : http://www.invinoveritastoulouse...
Jacques a raison : moche ces panneaux publicitaires qui poussent dans les vignes !
L’Artiste du vin pas seulement par le résultat de son travail et de ses réfléxions, mais son état, humble, généreux, simple, dans les étoiles, un mec planant.
Il arpente ses côteaux
Les mains dans le dos
Mais a quoi pense t’il
Comme ça seul dans ses vignes
Faire du vin
aussi bien
Que la terre d’ou il vient
Se l’arrache.
Dominique Labe