Un mot tout d’abord sur les Rencontres et leur slogan décapant : 40 ans de rencontres – 40 ans de ruptures. Une foison d’expos disséminées dans le vieux Arles. Des grands noms, à commencer par celui de Willy Ronis (99 ans !) dont l’exposition à l’Eglise Sainte-Anne est une vraie merveille et convertira sans doute les béotiens qui professent que la photographie est une technique et pas un art…
D’autres, Delpire, Hatakeyama, Paulo Nozolino. Bref, c’est à voir durant tout l’été.
Et si vous passez par là, n’oubliez surtout pas de visiter la galerie sensorielle de Jean-Luc Rabanet, rue des Carmes : une île où vous seront proposés en formes de petites fulgurations visuelles et gustatives des instantanés de bonheur.
L’Atelier, créations de l’an III. Tel est le nom du rêve qui prend forme ici dans cette ruelle en forme d’impasse peuplée de naïades, de Harley céruléennes (encore !) et de rêveurs impénitents.
Trois ans qu’il a jeté ici son ancre le dynamique béarnais, et déjà deux étoiles !
Trois ans qu’il a jeté ici son ancre le dynamique béarnais, et déjà deux étoiles !
Bon, j’en connais qui entreraient ici sur les pattes arrières, compte tenu de la surcharge rhétorique qui entoure le prodige : restaurant bio, atelier du vivant, émotions, création, bref le tutti frutti new-âge dont les restaurants conceptuels doivent aujourd’hui s’entourer s’ils veulent se faire un nom !
Alors comment c’est, vraiment ?
En deux mots : contemporain, décapant, rythmé. Dans le vent, mais juste. Malgré la tendance à surajouter.
En deux mots : contemporain, décapant, rythmé. Dans le vent, mais juste. Malgré la tendance à surajouter.
On démarre avec une Mousseline de céleri, gelée de pommes-verte, poutargue, truffe d’été, champignon de Paris…
Mes deux filles m’accompagnent. L’une d’entre elles, qui n’a pas la langue dans sa poche, commente ainsi ce plat :
» Il faut savoir manger… C’est comme une pièce de théâtre. Si tu te concentres uniquement sur l’un des personnages, tu ne comprends pas la pièce… »
Qu'ajouterais-je ?
Cœur d’artichaut croquant croquant, blettes, lait de Parmesan au romarin.
En voilà une idée ! J’adore cette idée du blanc craquant de blettes. Mais Clio ne va pas s’arrêter en si bon chemin : »Le plat n’a pas assez de volume pour se déployer. Il ne joue que sur les textures… »
Bien vu !
On se rafraîchit les idées avec cet amusant Gaspacho au cromesquis (le nom revient à la mode…) d’ail blanc, amandes, fraise et cerise.
Et, ici, il est temps d’ouvrir une parenthèse sur les maîtres d’hôtel pressés (on est tout de même dans un double macaron) qui vous récitent leur litanie longue comme un sablé aux amandes en ayant l’air de ne pas y croire, de se demander si au bout ils vont y arriver… A la fin, vous les priez de recommencer parce que, avec les susurrations et avec l’accent, vous vous sentez tout bête, vous n’avez pas tout compris, vous avez perdu en route le mode d’emploi…
Bon, encore heureux qu’on ait pu finir la bouteille de Beaujolais blanc 2008 des Terres Dorées, excellemment vinifiée par J.P. Brun !
Bon, encore heureux qu’on ait pu finir la bouteille de Beaujolais blanc 2008 des Terres Dorées, excellemment vinifiée par J.P. Brun !
Quatrième touche de goût : un Thon posé comme une certitude sur un sablé aux amandes (encore !), échalote confite au vinaigre de riz, caramel de soja, citron confit à l’huile d’olive et œuf de cabillaud séchés et pulvérisés. Comme un condiment, dit la chanson.
Que vous dire ? sinon qu’on a connu des thons meilleurs !
C’est le moment de tester le château de Cazeneuve blanc 2005 d’André Leenhard qui fait partie à mon sens des très beaux blancs languedociens et qui, sur ce plat japonisant, n’a en rien démérité.
Cinquième touche de goût : Palourde cuite au jus de coques, écrasé de pommes de terre à l’huile d’olive, roquette juste tiédie. C’est parfait.
D’autant que la citronnelle posée en équilibre a remplacé le sempiternel brin de ciboule qui commençait à ressembler à un tic…
On arrive au plat de résistance. Doucement. Pas d’impatience. Jarret de veau confit au piment d’Espelette et poivre Sechuan, vinaigre de cacao, haricots coco, cébettes rôties dans leur jus au pesto. Alors, là, voilà un grand classique revisité avec de la niaque et un accord majestueux avec le Cazeneuve blanc !
Pourquoi résister ?
Deux très jolis desserts pour conclure d’astucieuses Cerises en gelée de verveine, glace au thym et marjolaine (exquis !) et des Croquettes de chocolat noir, poivron jaune et rouge, tuile aux poivron rouge qui ont bien amusé la galerie, c’est-à-dire les filles.
Avec un Rivesaltes ambré 2003 du Château de Rey servi dans des verres noirs pour nous piéger, c’était pas mal pour une sortie d’artiste. Willy nous attendait !
Les prix
Menu « Création », 7 touches de goût : 45 E
Menu « Emotions », 13 touches de goût 75 E
L’adresse L'atelier
7 rue des Carmes
13200 ARLES
04 90 91 07 69
contact@rabanel.com
Donnez votre avis
M. Perrin, comment expliquer ce vide entre la selle suspendue et le garde boue de la moto?
Pony des îles, c’est sans doute parce que le motard avait entre temps enfilé une tenue de cuisinier cosaque ou un truc du genre, m’enfin quoi !
Merci Aristochat. A bien y regarder, je note en effet les clignotants, les retros et tous les accessoires indispensables… je n’ai plus bon dos.
Cher Jacques,
Les saines lectures vous envoient dans les lieux ou il faut être.De mes 3 visites chez Jean-Luc Rabanel je garde un souvenir extraordinaire de ma première visite.Cette salle aux couleurs Stendhaliennes,cette ambiance chaleureuse et conviviale entre toutes les tables,le rythme des plats,cette idée,comme Alain Passard de remettre les légumes au centre de leurs cuisine.J’y retournerai
J’y suis allé une fois.
Ce fut très convaincant !
J’y suis allé une fois.
Ce fut très convaincant !
Merci pour ce feed-back Pascal. J’aime bien vos "couleurs stendhaliennes". Et les deux visites suivantes ? J’ai eu l’impression qu’il y a beaucoup d’idées (trop parfois), de l’inventivité, une exécution rigoureuse. C’est un vrai laboratoire de la cuisine contemporaine. Je le compare un peu à Kitchen Gallery. Qu’est-ce qui sortira de cette chrysalide ? Pour l’heure, on cherche encore le génie.
Mieux (sur un repas) selon moi que Ze Kitchen …
En revanche, je souhaite au chef du restaurant toulousain "en marge" (Franck Renimel) de converger vers les épures de Rabanel.
Hola querido amigo,
je vois que tes charmantes filles, en plus de ne pas avoir la langue de leurs poches, ont le verbe juste et sciselé.
sous se soleil Prioratien, je me laisse a penser d’ou elles tiennent cela .
beau reportage, ca donne envie de faire une mini escapade .
saludos i asta pronto
Vu hier la même Harley, toute de noire vétue, à Erlach (Bielersee) dans une vitrine à 39.000 CHF tout de même l’occas.
LaurentP,
Dingue …
Je connais un Laurent qui a le même site que vous (avec un nom qui semble avoir choqué PatrickE) … 🙂
Celui du forum ?
vite, il faut que je rectifie avant que les railleurs ne me traitent de schizophrène…
😉
Laurentp
En voilà un joli petit détour gourmand depuis Bonnieux Mr Perrin.
Un chemin de traverse que j’ai emprunté plus ou moins il y a de cela trois semaines.
Et j’avoue avoir beaucoup apprécié ce déjeuner chez Rabanel, tellement que je l’évoque également ici ou là, à soupir à peine couvert, dans mon blog.
Je me permet donc de rajouter une couche et de glisser mes liens.
secretsepicure.blogspot.c…
secretsepicure.blogspot.c…
Ce plat, bi-polaire sur l’asperge et la réglisse à été pour moi, mon souvenir de goût de ce mois de juin.
J’aime beaucoup les commentaires de Pascal Henry que je partage assez en appuyant à mon tour sur ce "tour de champ" sur le légume qui est encore plus intérressant que je ne pensais, et cela semble simplifier la complexité de certains plats.
Bien sûr cette myriade de touche nous prive de temps à autre de plus de plaisir poursuivit, mais cela permet une découverte de "l’esprit du jour" de ce cuisinier de talent.
Bonjour à toi là-haut, Fredi du Priorat ! Mes filles sont déjà venues au Priorat et ont eu le plaisir de déjeuner avec Luis Llach ! Elles étaient encore bien petites. Je reviendrai avec elles !
Et merci pour vos commentaires, Antoine ! Bientôt, un post sur un autre lieu emblématique d’Arles, la Chassagnette !
Luis Llach celui de l’estaca?
Bonjour Jacques,
cela va etre difficile de faire mieux mais je vais essayer, tu sais que vous etes les bienvenus et que ma terrasse ( fotos sur ma page FB ) est a disposition.
me rejouis de lire les comments d’Arles.
bon voyage
Cher Jacques,
Vous cherchez le génie?Il existe,il oeuvre du côté de Menton.Son nom?Mauro Colagreco au Mirazur.4 visites,foudroyé 4 fois.Le paradis gourmand existe et une bonne partie se trouve chez lui.Vous me trouvez partial?Allez-y…
Pascal, j’irai : je n’attends que ça. J’ai d’ailleurs examiné cette possibilité au retour d’Arles (rentrer en Suisse par l’Italie) mais c’était trop compliqué question timing.
Armand : oui, Luis Llach, l’immense chanteur, le Bob Dylan catalan. Il fait du vin à Porrera mais, paradoxe, n’en boit jamais !
Fredi : est-ce que ton chat a pris du poids ?
Un Priorat Val Llach 2000 (carignan avec aussi CS et merlot) bien décevant …
et un 96/100+ pour Parker !
Jacques, ravi de vous retrouver en Arles, que je connais bien pour y avoir de la famille dans le coin béni niché entre Alyscamps et ateliers SNCF. Je file chaque mois d’août aux rencontres depuis qq années déjà. L’ampleur que prend cet événement n’est pas pour me déplaire, et les projets futurs sont splendides.
J’ose espérer que vous êtes allé poser votre oeil scrutateur au Méjan, entre quais du Rhône, Chapelle St Martin (désacralisée pendant la révolution) et éditions d’Actes Sud ?
Hello Jacques,
oui, Nini ( tout comme son maitre ) a pris un peu de poids, surtout du ventre mais sa taille reste assez identique.
merci de prendre de ces nouvelles .
salutations,
Fredi
Jacques,
C’est à la 3ème visite chez J-L Rabanel que j’ai pu constater les effets
pervers des trompettes de la renommée et des multiples récompenses tombées sur les épaules du démiurge légumier arlésien.
Seul au dîner,puis accompagné ce soir d’hiver par Laurence Salomon et son mari nous fument tous 3 un peu déçu.Trop de répétitions de mousses de purées pas assez de mâche.Fâcheuse tendance à ignorer
de superbes légumes tubéreux,on à senti le chef succomber à la franche facilité voire à la désinvolture.
Cavaillon ne doit pas être loin!
PS Le Jardin des Saveurs à Annecy
Laurence Salomon
Autant pour moi,le restaurant de Laurence Salomon se nomme Nature&Saveurs à Annecy
Bonjour,
Nous venons avec mon épouse de passer une journée à Arles pour les "rencontres"…et
choisi de faire une pause au bistrot de jean-Luc Rabanel.
Légère surprise quand la "conseillère" en vins nous demandent "fruité ou sec ?" plutôt que de nous parler des appellations et des viticulteurs, mais bon. Je commande ensuite une assiette de pata negra (coupé trop épais), demande un verre de vin rouge et la même personne me répond "je ne peux vous conseiller, je ne mange pas de charcuterie!"
Surprenant quand même… un peu plus même.
Sincères salutations
Dufay,
Vous êtes mal tombé, assurément !
Une stagiaire en mauvais casting ?
Un beau déjeuner début juillet :
* Tempura de haricots verts sauce tomates-gingembre et sauce soja
* Paysage de Camargue : Sashimi de maquereaux à l’huile de sésame et oignons rings, carpaccio de radis, sorbet citron vert, feuille d’huitre végétale, fougasse aux tomates et aux oignons
* Tartine végétale, sorbet piment végétarien
* Bao d’ail noir, posé dans une fleur de courgette garni d’anguille fumé, coques et courgettes bouillon d’anguille fumé
* Maki d’agneau au gingembre confit et piment d’Espelette, légumes de saisons cuits, crus et acidulés. Béarnaise déstructurée
* Panna cotta végétale, fèves, oignons, citrons et pignons de pin confits. Lait de basilic
* Baba façon pain perdu à la framboise et glace estragon
Les vins :
* VdT France Claude Courtois Cailloux du Paradis Quartz 2009 : belle bouteille, nette, sans lourdeur, prise pour un chenin (15/20)
* VdT (Gard – Claudine Vigne) 2009 : syrah épicée, piètre, lourde et crémeuse, faisant grise mine (13/20)
Mauvais conseil du sommelier sur le rouge.