Angelo Gaja : "A propos de l’affaire Brunello qui a éclaté au printemps 2008 : j’ai pris la parole récemment à ce sujet pour clarifier le débat.
Contexte personnel en 1994, lorsque j’ai fait l’acquisition de la Pieve di San Restituta, je savais que j’étais en train de cueillir des fleurs dans un jardin que je n’avais pas cultivé. Le mérite principal appartenant aux générations précédentes qui y avaient travaillé et permis à cette appellation et, en particulier, à cette propriété d’être ce qu’elle est !
"Je savais que j'étais en train de cueillir des fleurs dans un jardin que je n'avais pas cultivé…"
Dans les milllésimes 2002 et 2003, nous avons pris la décision, avec mon œnologue Guido Rivella, de ne pas mettre sur le marché de Pieve di San Restituta et de déclasser toute la production : le vin était bon, sans plus, mais nous voulions une qualité supérieure. Nous avons donc tout vendu en vrac, au prix de la pomme de terre, renonçant à 90 % du chiffre d’affaires que nous aurions pu réaliser en vendant le vin en bouteilles !
Venons-en à la genèse de cette affaire Brunello il y a deux ans et demi, le Consorzio des producteurs de Brunello di Montalcino a, par une décision collective, décidé de faire un contrôle très précis des 1980 ha de sangiovese autorisés à produire du Brunello di Montalcino. Ce contrôle a permis de mettre en évidence, à l’intérieur de cette aire d’appellation, l'existence de cépages autres que le sangiovese, seul autorisé, je le rappelle, à produire du Brunello di Montalcino. Chez un certain nombre de maisons, il s’agissait d’un nombre de pieds anecdotiques mais, chez quelques maisons, on a trouvé 17 ha de cépages qui étaient déclarés comme du sangiovese.
La magistrature a alors été chargée du dossier et l’enquête a démarré.
Croissez et multipliez-vous !
Pour comprendre où nous en sommes aujourd’hui, il est important de rappeler quelques faits historiques :
Banfi a su pourtant corriger les erreurs et a commencé à opérer la reconversion de son vignoble, devenant ainsi le moteur qui entraîne l’appellation vers le succès, établissant aux Etats-Unis une très forte demande pour le Brunello.

En une trentaine d’années, l’appellation Brunello di Montalcino a donc vu sa taille passer de 60 à 2000 ha !
Les solutions proposées par Angelo Gaja
Passé ce constat, quelles solutions proposer ?
A mon sens, il faut faire deux choses :
L’adresse Ristorante « Antinè », via Torino 34/A – Barbaresco
Tél 0173 635294
Millefoglie di lingua in giardino e salsa verde tradizionale : une entrée remarquable d'Antinè.
7 Commentaires
Il semble qu’Angelo Gaja, particulièrement pratique et concret dans ses propositions, permette à ces produceturs "non historiques" de garder la mention "brunello" : ou alors je me trompe.
Si c’est le cas, c’est un peu une prime offerte royalement à quelques domaines.
Ne serait-il pas plus sain de simplement :
a : garder la loi de cette DOC telle qu’elle est
b : et dire à ceux qui n’en sont pas d’étiquetter dorénavant leurs vins en IGT ou VDT ?
Tu as raison, François, de souligner ce point. C’est exactement ce que j’ai dit à Gaja. On pourrait a priori faire un parallèle avec ce qui s’est passé dans le Chianti ou même dans le Piémont. Par rapport au Chianti, la situation est très différente : la force de la "marque" (plutôt que de l’appellation) Brunello est telle que vouloir contraindre une bonne partie des producteurs à, volens nolens, en sortir serait peut-être signer leur arrêt de mort en termes économiques. En ce qui concerne le Piémont, j’ai posé à Angelo la question suivante : n’avez-vous pas eu un peu le même problème dans le Piémont par rapport au Barolo avec le nebbiolo ? Voici la réponse de Gaja :"C’est différent : je suis sorti de l’appellation Barbaresco avec les crus (Sori Tildin, Sori San Lorenzo et Costa Russi) pour protéger et revaloriser mon Barbaresco "de base" qui était largement sous-estimé." J’ai même demandé à Gaja si, auparavant, ses vins d’appellation bénéficiaient de l’appellation d’un autre cépage, voici sa réponse :"Avant 1996, tous mes Barbarescos et Barolos étaient 100 % nebbiolo : depuis, selon les crus, on trouve un apport de 5 à 8 % de barbera dans les Langhe rosso. Avec le réchauffement climatique et la baisse d’acidité sur le nebbiolo, les Langhe bénéficient de cet apport. C’est tout.
Peut-on reprocher à Angelo Gaja d’afficher un tel pragmatisme ?
Disons qu’il a une conscience aigüe des contingences économiques, pratiques et surtout réalisables.
Mais on apprend tous (j’imagine à part quelques uns) cette stupéfiante augmentation exponentielle de la DOC (DOCG ?) qui, fatalement, devait porter ces vins un peu loin de leur rivage légal.
En fait, le vrai scandale – s’il est prouvé – restera celui de l’adjonction de raisins provenant d’ailleurs : comme l’ont été pendant tant d’années les raisins de Montecucco ((à entendre les producteurs de cette région qui, maintenant, sous l’impulsion irrésistible de Collemassari, commencent à faire de très belles choses.
Il n’est que temps, grand Jacques, à ce que tu ailles visiter ce domaine à capitaux suisses.
On y voit ce que l’argent peut faire, mais surtout ce qu’un homme,Claudio Tipa, lorsqu’il a une vision et un sens assez exceptionnel de la création ex nihilo d’un domaine, peut réaliser.
Il y a aussi, à Val d’Orcia, le cas étonnant d’un autre fondu : Podere Forte : la seule propriété où des cochons bénéficient d’un quasi paradis sur terre : à visiter !
J’irai voir les divins porcelets et j’irai voir Montecucco. Sur la route, je m’arrêterai dans un des restaurants les plus excitants d’Italie (même s’il n’est pas constellé d’étoiles au fronton) : la Pinetta à Marina di Bibbona. Nous y avions fait un déjeuner mémorable en novembre 2005, sauf erreur… L’adresse pour celles et ceux qui seraient (encore) dans les parages : LA PINETA, via Cavalleggeri Nord 27 loc. Stazione di Bolgheri 57020 Bibbona, Livorno. Tel. 0586 600016 Cuisine de poissons exceptionnels, apprêtés dans la plus grande simplicité : le patron, Luciano Zazerri, est un « fondu » de pêche.Menu dégustation à 70 ?. Très belle carte des vins..Andiamo ! Il n’y pas que la « Route 68 ». A part ça, pour ceux que ça intéresse, toujours pas de nouvelles de Pascal Henry !
Les seuls Suisses véritablement disparus ces derniers jours sont ensevelis sous 50 mètres de neige au pied du Mont Blanc du Tacul, qu’ils reposent en paix.
Oui, mille fois oui pour La Pineta.
Un signe qui ne trompe pas : Angelo Gaja s’y trouve comme chez lui !
J’en ai quelques belles photos !
Stupéfiant qu’en une trentaine d’années, l’appellation ait vu sa taille décuplée ainsi ! Ma belle-sœur continue pourtant à me faire les louanges du Brunello di Montalcino. J’espère que cette enquête sera menée à bien, et que l’on pourra de nouveau déguster ce vin sans l’ombre d’un doute sur sa qualité.