Là, dans ces quelques m2, coincée entre la plonge, le four à vapeur, le wok et le plan de travail, on voudrait que cette ancienne stagiaire de Pascal Barbot accomplisse des miracles, fasse de l’Astrance ? Ne rêvons pas !
La sémillante cheffe fait tout simplement de l’Adeline Grattard, et c’est déjà un monde.
Revenue de Hong-Kong, avec des thés, des fleurs, des épices, elle a ouvert ce restaurant en mars dernier avec son mari, maître de thé. D’où le nom du restaurant. yam’Tcha, en cantonais, signifie l’instant du thé, ce moment de la journée où l’on respire, savoure un thé en grignotant quelques dim-sum.
La carte est épurée. Trois propositions. Deux pour le déjeuner (Menu déjeuner à 30 € et Menu déjeuner découverte à 45 €). Pour le soir, un menu dégustation unique (65 €) est proposé. Ces trois menus peuvent être accompagnés, à votre guise, d’un accord « Tout thés », ou « Thés et vins » ou « Tout vins » (de 20 à 40 €).
Le décor est posé. On arrive, tout frémissant, bouleversé d’avance de découvrir cette cuisine dont bruissent et la critique et la blogosphère spécialisées.
Alors, qu’est-ce que ça vaut ?
Pour commencer, on s’égaie les papilles avec une amusante, candide, Salade de concombre, tofu fumé et vinaigre de riz blanc, parsemée de sésame. Le Bastide Duclaux 2008, Côtes du Luberon blanc, prévu pour l’escorter, pousse sa chansonnette dans son coin, notes anisées, fenouil, agrumes. C’est simple et on attend la suite.
Elle arrive sous la forme de Crevettes du Mozambique, cochon fermier, épinards, oignon des Cévennes, le tout saisi au wok avec vigueur et habileté. C’est le contraste terre-mer à la mode à Paris en ce moment. Très jolie partition qui fait chanter presque, à l’unisson, la Bastide Duclaux, s’il vous en reste dans le verre. Sinon un thé Oolong « Dragon noir » s’en sort avec les honneurs.
Voici venir une Crème de maïs, shitaké et œuf de caille au sujet de laquelle je n’ai rien à dire ou à redire. Malgré le cortège royal d’un thé Pu-erh no 2. Ce superbe thé postfermenté, millésimé (6 ans) développe d’étonnants arômes de sous-bois, de mousse de chêne, de champignon.
Ce sera plus exaltant avec le Maigre de ligne, riz venere, haricots coco, ciboulette chinoise et soya. Cuisson parfaite (à la vapeur) et saveurs subtiles, bien dosées, même si on souhaiterait un peu plus d’affirmation, un peu plus de relief dans le goût. A l’image du convenable Viré-Clessé 2007 de Denis Jeandeau, qui l’accompagne.
Le maître de thé, Chi Wah, dépose une théière du rare thé blanc « Aiguilles d’argent » sur la table. Un Bai Hao Yin Zhen du Fujian. Floral, printanier, inoubliable. Quelle finesse ! Le temps s’est arrêté. C’est l’instant-thé. On croque encore ce dessert amusant, une Soupe d’ananas, dattes, fromage blanc et tuiles coco. On sait qu’on reviendra. Pour l’ambiance, pour le style, pour les thés, pour l’aménité de l’accueil et pour être définitivement conquis par la cuisine d’Adeline !
Les prix c’est pas franchement donné, mais on est à Paris et quand le succès est au rendez-vous…
Carte des vins orientée sur la Bourgogne – Duband, Bouzereau, Prieuré-Roch, domaine Arlaud – (Adeline est d’origine bourguignonne), elle comporte aussi quelques jolies références en Côtes du Rhône et Loire et sera sans doute étoffée dans les mois à venir. On espère davantage de riesling !
L’adresse
Yam’Tcha, 4 rue Sauval – 75001 Paris
t. 01 40 26 08 07. Fermé lundi et mardi.
Prochains articles quelques adresses à Paris • L’ami de Johnny Depp qui n’aime pas le KGB • L’Astrance, bonheur sidérant • La Gazzetta : dans le noir…
30 Comments
Jacques,
A la Colombière ils avaient en leur temps béni où ils étaient ouverts,proposés un menu accords mets & thés tout simplement remarquable.
Du coup ça me donne envie,et pour le concept et aussi parce qu’elle est passée entre les mains de Pascal Barbot d’aller faire un tour au Yam’Tcha.
Je prends du retard,ou alors y’en a qui prennent de l’avance,allez savoir!
Salutations gourmandes
Sympa Jacques cette escapade en pays de thé ! J’avoue avoir du mal à me sentir ébouriffé par les plats mais cela doit certainement se mettre en place.
Pour celles et ceux de passage sur Lyon, une table mésestimée "Cuisine au Wok" rue du Plat, un cuisinier chinois, passé chez Bocuse et qq grandes tables parisiennes y donne une superbe leçon de simplicité et de maîtrise. Repas thé évidement de rigueur avec de très belles choses (Splendide wulong au chrisantèmes).
Pour de superbes références de thé sur Paris, penser à la Maison de la Chine (rue Bonaparte il me semble). Shuixian, Bi Luo Chun et Bai Mu Dan de haute volée … je vous laisse découvrir.
Pour le thé, Paul, désolé, mais c’est chez Tcha rue du Pont de Lodi qu’il faut aller parce que là il ne vous refiles pas de vieux thé comme souvent, mais ceux de l’année (hormis le pu-erh, qui demande à vieillir) que la maitresse des lieux va choisir sur place, chaque année sachant que comme souvent en chine, le meilleure de la production est réservé à l’export. Pour le Oolong, les meilleurs viennent de Taïwan et non pas du continent. Ces deux thé ont en commun cette particularité, ils se préparent dans des petites théières et on réutilise le thé pour 5 à 8 infusions.
Mon préféré: le pu-erh "six forteresses" qui a le gout et le nez de la terre après la pluie d’orage
Armand,
Un ami m’a un jour fait goûter ceci :
Oolong Chi-Lai (Taiwan)
Liu Bao Cha 1958 (Taiwan) : 6 infusions
Je ne sais pas ce que signifie le "millésime" ?
Ah ! mais je vois qu’on a affaire à de véritables maîtres de thé ! Allez-y, parlez-nous des thés, nous nous régalerons !
C’est vrai que la Colombière, sur ce plan-là comme sur d’autres, a eu un rôle de précurseur. J’y songeais lors de mon déjeuner au yam’Tcha.
Et encore,on ne parle pas de la température de l’eau et des temps d’infusion!
Bienvenue au club Pascal 🙂
Bon : c’est quand qu’on fait une session GJE sur les thés ?
Avis à tous les lecteurs : pour tout ce qui est exotique vrai à Paris, un seul contact : Armand Borlant, dit ABM.
Particulièrement les mama à cuisine thaï qui lui font plein de gros poutous 🙂
Grand Jacques : si je lis bien entre les lignes, on aura un 19/20 pour l’Astrance et un petit 12/20 chez cette gente dame : me trompe-je ?
Qui connaît le nouveau *** michelin dont parle Pudlowski dans le Point de la semaine dernière ?
Rien de bling bling, tout au contraire : ou ce qui est réclamé depuis tant d’années par tant d’amateurs !
François,
Tu évoques le tourbillonnant Gordon Ramsay ?
Sans oublier, Pascal, la qualité de l’eau et de la théière (en terre de Yixin si possible).
Armand, merci du tuyal ! Mon fournisseur exclusif, Cha Yuan à Lyon (Nadia Bécaud), une institution avec des récoltes de Printemps qui arrivent 15 jours après la récolte, observée attentivement par la patronne, mieux qu’adoubée (chose rare) par les locaux.
Tu connais ?
Effectivement, Oolong et service en Gong-Fu Cha, un beau mariage … j’ai encore plein de choses à découvrir.
Les tuyaux thaï d’ABM, ce n’est pas que ça m’intéresse, ça m’excite !
🙂
Pour l’ami François Mauss,
Selon Radio Casserole le prochain 3 macs chez nos amis shadocks se trouverait plutôt dans les Corbières à Fontjoncouse chez Gilles Goujon à l’Auberge du Vieux Puits.
Pacal :
Voilà : c’est bien de lui que je parlais, pas d’un Gordon machin chose.
Vous le connaissez ce Mr Goujon ? Un bon ? Un du style St Bonnet le Froid ?
Le Grand Jacques va aimer ?
François
J’ai fait un très beau repas chez Gilles Goujon en mai 2009.
Niveau : 2 macarons sans problème.
Fontjoncouse est un village moins sibérien que St-Bonnet !
Sieur Mauss,
Le plus beau chariot de fromages de France.Après,2 ou 3 macarons,le plus pénalisé en faim de compte c’est toujours le couillon en bout de chaine,celui qui tient la fourchette et qui règle l’addition.Avec le rouge c’est simple,1 étoile +30%,c’est super non?
Mais oui,je suis sûr que vous aimerez l’Auberge du Vieux-Puits,j’y suis allé et j’ai bien envie d’y retourner,c’est aussi un signe.
Salutations gourmandes
Mais, oui, nous l’avons déjà dit, Pascal …
J’aime bien ce "en faim de compte".
Cela me rappelle le blog de Gwenola (qui se fait bien discrète) : toutes les bonnes choses ont une faim !
François, je te suis à donfe sur l’organisation d’une session "thés". En attendant, éclatez-vous bien demain et prends bien soin de Nicolas qui tout tremblant d’entrer dans la salle de dégustation. Et que Fredi se tienne à carreaux !
Et puisqu’il a été question de Fontjoncouse, un lieu improbable où j’ai atterri il y a plus de 20 ans (mais ce n’était pas Gilles Goujou aux fourneaux), il faut aussi mentionner, dans les parages (ou presque…) l’autre merveille de l’Aude : Le Puits du Trésor, à Lastours Tel : +33 4 64 77 50 24.
D’ailleurs c’est chez Jean-Marc Boyer que je me suis pour la 1ère fois de ma vie retrouvé seul au déjeuner chez un étoilé.Quand je dis seul,j’étais le seul client!
D’aucun penseraient qu’il aurait été tenté de bâcler l’affaire,pensez-donc,un ancien de Bernard Pacaud,ce fut roulement de tambour,la piste aux étoiles, Roger Lanzac et la grosse cavalerie.
Je comprends l’impatience du Grand Jacques à vouloir se perdre au Puits-du-Trésor.
Laurentg,
Ou alors,à toutes faims utiles de Yannick Aléno
Bonjour,
je ne saurais trop conseiller à ceux que le thé chinois intéresse de se rendre si ce n’est encore déjà fait à la Maison des Trois Thés (M3T pour les intimes) place Monge dans le 5ème. Gille Brousse, qui conseille admirablement, ne boit pas que du thé et sait orienter les oenophiles. Le Pu-Erh ne m’intéressant pas, je fréquente l’établissement pour les semi-fermentés de Chine continentale (fabuleuse carte de Dan Congs -avec nombre de références issues d’arbres pluri-séculaires-, et de thés de Rochers) et les Oolongs de Taïwan (superbe collection de miellés).
C’est vraiment un choc esthétique que de goûter pour la première fois un grand oolong (complexité aromatique, pureté, longueur en bouche rappelant la dégustation d’un grand vin blanc structuré).
Les tarifs peuvent être stratosphériques (jusqu’à plusieurs euros le gramme) pour les références les plus prestigieuses mais les entrées de gamme sont également remarquables. Le matériel proposé (porcelaines, théières de maîtres potiers taïwanais et théières de YI Xing en "terre épuisée") est lui aussi du plus haut niveau.
Difficile de se fournir ailleurs après avoir franchi le seuil de cette maison…
Bonjour,
je ne saurais trop conseiller à ceux que le thé chinois intéresse de se rendre si ce n’est encore déjà fait à la Maison des Trois Thés (M3T pour les intimes) place Monge dans le 5ème. Gille Brousse, qui conseille admirablement, ne boit pas que du thé et sait orienter les oenophiles. Le Pu-Erh ne m’intéressant pas, je fréquente l’établissement pour les semi-fermentés de Chine continentale (fabuleuse carte de Dan Congs -avec nombre de références issues d’arbres pluri-séculaires-, et de thés de Rochers) et les Oolongs de Taïwan (superbe collection de miellés).
C’est vraiment un choc esthétique que de goûter pour la première fois un grand oolong (complexité aromatique, pureté, longueur en bouche rappelant la dégustation d’un grand vin blanc structuré).
Les tarifs peuvent être stratosphériques (jusqu’à plusieurs euros le gramme) pour les références les plus prestigieuses mais les entrées de gamme sont également remarquables. Le matériel proposé (porcelaines, théières de maîtres potiers taïwanais et théières de YI Xing en "terre épuisée") est lui aussi du plus haut niveau.
Difficile de se fournir ailleurs après avoir franchi le seuil de cette maison…
Matthieu,
C’est de cet endroit que viennent les thés que j’ai évoqués.
Laurentg, tu veux dire qu’ils viennent de Chine 🙂
Chenapan …
http://www.troisthes.com/
Yam’Tcha vient d’obtenir une étoile au Michelin. On est content pour Adeline Grattard mais je ne suis qu’à moitié convaincu…
madame.lefigaro.fr/cuisin…
Elle est l’une des plus belles révélations gastronomiques du moment. Adeline Grattard, qui vient d’être récompensée par une étoile au Guide Michelin, opère dans son restaurant de poche une éblouissante fusion France-Asie. Elle nous livre le secret de quelques-unes de ses recettes et de ses assaisonnements “made in China”.
Super vos post sur les thes. J’habite en Chine depuis 2006 (pekin et maintenant Macao), mais je ne suis pas un defoncer du the. Cela dit, les meilleurs que j’ai goute sont bien a Pekin et non a paris en mode export. Peut-etre parceque j’ai eu la chance de cuisiner pour certaine personne du gouvernement chinois, mais vriament hors norme.
Pour ce qui est de Gilles Goujon, un de nos meilleurs technicien en France voir meme sur cette planete. J’ai eu l’occase de faire 2 promos sur Singapour en 2004 et 2005, et il est tout simplement grandiose ce chef. Et comme le dit je ne sais plus qui, le plus beau plateau de fromage de france et de loin. Avec du Mons et autre grand nom.
Yam’tcha, j’ai voulu tester lors de mon passage sur Paris, mais pas de place. Une chose et sur, en voyant les photos, je n’ai pas specialement envie de tester, mais j’irai quand meme pour voir le contenu et gouter avec les thes….
Merci pour ce superbe blog que je bouquine depuis 2 jours.
Bonjour,
Je suis présidente du club des buveurs de thé, basé à Nantes, et nous venons à Paris au mois de novembre pour 3 jours.
J’aurai aimé faire découvrir à ceux qui ne le connaissent pas le Yam’tcha, mais il me faut penser à toutes les bourses, et il me semble quand même un peu trop cher, d’autant que nous irons visiter "beaucoup de lieux de thé". Dont la Maison des 3T où ns ns ruinerons déjà cerainement mais là uniquement pour du thé.
Connaissez-vous d’autre restaurant qui pourrait faire notre affaire, bon, chic et pas trop cher !!!!….
Nous serons environ 20 personnes(certaines viendront du club de Suisse).
Merci d’avance de vos conseils.
Sylviane Brisson