Sous le titre La mort rattrape Frank Vandenbroucke, Jean-Louis Le Touzet a écrit dans Libération un très beau texte sur ce coureur « impatient et nomade » qui a voulu une nuit trouver sa fin dans un magnum de Pétrus 1961.
En voici quelques extraits. Je profite pour vous annoncer que cette chronique, « Lu dans la presse », changera bientôt de forme et deviendra plus systématique.
« Le cyclisme fabrique des mythes avec des jambes rasées. Puis les excès, la dope et la dépression nous les arrachent. »
(…)
« Comme Pantani, VDB a égaré la clé de la consigne où il aurait pu enfermer ses démons. Disons qu’il était comme magnétisé par la mort. Déboires conjugaux, dépendance aux produits – dont la cocaïne -, échecs répétés dans les nombreuses équipes dans lesquelles il s’était engagé à renier un passé qui sans cesse le rattrapait, VDB avait peur de vivre et de l’échec. Sa vie, depuis des années, il l’aura passée sur des quais de gare à attendre le train du succès qui avait foutu le camp.
Comme VDB a toujours fait les choses avec un certain panache, – ah cette attaque sèche dans la côte de Saint-Nicolas lors de ce fameux Liège-Bastogne-Liège victorieux de 1999 -, il décide, en 2004, de mettre fin à ses jours. Il compose un menu et s’habille pour l’occasion. Il verse de l’insuline dans un magnum de pétrus 1961 : «C’est tout ce que j’avais sous la main…» Puis, pour ne pas se louper, s’injecte 10 cm3 d’insuline. Il a auparavant rédigé une lettre à sa mère qu’il prie de ne pas faire procéder à une autopsie afin «de préserver son corps». Puis il s’allonge, vêtu d’un maillot arc-en-ciel, celui que portent les champions du monde, ce qu’il n’a jamais été. Il se trouve que cette fois la mort n’a pas voulu de lui. Dans sa biographie, sortie l’an dernier et intitulée sobrement Je ne suis pas dieu, il confesse s’être réveillé «honteux mais très heureux d’être en vie».
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« Comme Pantani, VDB a égaré la clé de la consigne où il aurait pu enfermer ses démons. Disons qu’il était comme magnétisé par la mort. Déboires conjugaux, dépendance aux produits – dont la cocaïne -, échecs répétés dans les nombreuses équipes dans lesquelles il s’était engagé à renier un passé qui sans cesse le rattrapait, VDB avait peur de vivre et de l’échec. Sa vie, depuis des années, il l’aura passée sur des quais de gare à attendre le train du succès qui avait foutu le camp.
Comme VDB a toujours fait les choses avec un certain panache, – ah cette attaque sèche dans la côte de Saint-Nicolas lors de ce fameux Liège-Bastogne-Liège victorieux de 1999 -, il décide, en 2004, de mettre fin à ses jours. Il compose un menu et s’habille pour l’occasion. Il verse de l’insuline dans un magnum de pétrus 1961 : «C’est tout ce que j’avais sous la main…» Puis, pour ne pas se louper, s’injecte 10 cm3 d’insuline. Il a auparavant rédigé une lettre à sa mère qu’il prie de ne pas faire procéder à une autopsie afin «de préserver son corps». Puis il s’allonge, vêtu d’un maillot arc-en-ciel, celui que portent les champions du monde, ce qu’il n’a jamais été. Il se trouve que cette fois la mort n’a pas voulu de lui. Dans sa biographie, sortie l’an dernier et intitulée sobrement Je ne suis pas dieu, il confesse s’être réveillé «honteux mais très heureux d’être en vie».
Jean-Louis Le Touzet, Libération, 14 octobre 2009
15 Comments
J’aatends avec gourmandise la prochaine caravane du tour, Jacques, avec ses casquettes pour beauf et ses quolifichets pour mĂ©nagère de moins de 50 ans …
En attendant, je sirote un reste de petite arvine de GĂ©rald Besse (merci LaurentP) et de malvoisie grain noble de MT Chappaz : dĂ©liceuses libations et vive la Suisse (alors que retentit l’hymne français dans mon tĂ©lĂ©viseur) !
Tout d’abord, je voudrais rendre hommage Ă la prĂ©sence discrète, amicale et rĂ©gulière de Laurentg sur ce blog : avec son Ă©quipe de Toulousains dĂ©jantĂ©es, ils viennent de remporter les Championnats d’Europe de dĂ©gustation ! Bravo Laurentg et ses amis, vous ĂŞtes forts les gars ! http://www.larvf.com/,championnat-d-europe-de-degustation-vin,12614,1109842.aspJe viens de lire le compte-rendu de l’une de vos rĂ©centes dĂ©gustations et j’ai vu vos notes "mitigĂ©es" concernant Marie-ThĂ©rèse Chappaz, que se passe-t-il ?
Merci Jacques,
Il se passe que l’on a trouvĂ© sa petite arvine boisĂ©e, un peu lourde, pas trop guillerette et son pinot gris grain noble un peu pataud.
Cela dit, j’ai souvenir de petite arvine grain noble Ă se damner.
Pour rendre mon dernier message plus cohĂ©rent : cr dĂ©taillĂ© Ă suivre sur notre site et meilleure apprĂ©ciation en effet sur un reste de marsanne flĂ©trie sur souche d’Anne-catherine et Denis Mercier, dĂ©liceusement baroque en 2003.
Laurent Probst nous a amenĂ© des bouteilles de grands producteurs suisses : GĂ©rald Besse, Dany Varone (et StĂ©phane Reynard), MB Gillioz, Christophe Abbet, …
Dire qu’il n’y avait pas cette annĂ©e de vin suisse au concours … 🙂
Euh … la PA superbe est de GĂ©rald Besse et le vin boisĂ© et peu leste de Chappaz est sa marsanne (Domaine des Claives « Grain D’Or » Ermitage PrĂ©sident Troillet 2004).
Je devrais plus recracher ces nectars helvètes … 🙂
Je suis content que vous parliez de "ça" Jacques, car en grand amoureux du vĂ©lo, de la Belgique, et de ses plus grands champions que je suis, j’avoue que cette nouvelle m’a fait quelque chose.
Pour avoir frĂ©quentĂ© de l’intĂ©rieur ou mĂŞme en tant que simple spectateur le monde – car il s’agit bien d’un vĂ©ritable monde – du VĂ©lo (y compris certains pros), je ne puis que signifier combien ce milieu est prenant, comme ce sport est singulier, Ă©cole de souffrance et d’humilitĂ©, enfantant des individus souvent forts en gueule ou a contrario complètement froids, parfois – souvent – prĂŞts Ă tout pour gagner, mais possĂ©dant un rapport Ă l’Ă©go et Ă la douleur quasi unique, mâtinĂ© d’une fragilitĂ© pudique.
FVDB cristallisait beaucoup de tout ça : il avait le charisme, la sensibilitĂ©, le panache, la classe, le sens de la mise en scène, la fĂŞlure, le goĂ»t pour l’excès et les spotlights, mais aussi un cĂ´tĂ© adolescent ayant grandi trop vite, lui qui lors de ses grands succès fĂ»t – Ă l’image du grand Johann Museeuw – complètement portĂ© par le peuple belge. Était il prĂŞt à ça, et surtout Ă "l’après ça" ? Qui l’est ? Pour combien de temps ?
VDB était humain, très, trop.
Je retiendrai de lui cette silhouette fine et véloce qui montait sur les pédales dans le pires pentes pour "mettre des sacoches" comme seul le grand Eddy en était capable en son temps.
Qu’il repose en paix, ses initiales demeureront dans le souvenir des belges, flamands ou wallons, c’est Ă©gal…
Nicolas,
Dommage que le cyclisme soit ainsi envahi de tricherie mĂ©dicale …
Mais le public veut des prouesses.
Il y a des rĂ©ussites qui donnent malheureusement envie d’Ă©chouer …
http://www.sport365.fr/cyclisme/...
Il serait bien naĂŻf de penser qu’il existe encore aujourd’hui des sports professionnels oĂą personne ne se dope !
Certes mais il semble qu’en la matière le cyclisme atteigne des sommets (si j’ose dire).
Serait-ce une parabole sur le vin?
A l’inverse Laurent, je pense que le cyclisme est particulièrement contrĂ´lĂ© et que chaque nouveau contrĂ´le positif se transforme une nouvelle fois en affaire d’Ă©tat. Le dopage dans le cyclisme (que je condamne, bien Ă©videment) alimente rĂ©gulièrement les marronniers mĂ©diatiques. Cela provoque l’effet pervers de la diabolisation de ce sport auprès de l’opinion publique, alors que cela devrait plutĂ´t nous rassurer sur les moyens mis en Ĺ“uvre.
Pendant ce temps lĂ , le trouble règne encore au sein d’autres disciplines (dois-je Ă©voquer le football en Italie, le rugby dans l’hĂ©misphère sud…)
Une parabole peut-ĂŞtre… En tout cas la preuve qu’un magnum de PĂ©trus 1961, mĂŞme avec de l’insuline ajoutĂ©e, n’a jamais tuĂ© personne… En dĂ©pit de son cĂ´tĂ© macabre, cette "mise en scène" de VDB prouve que, derrière le rebelle dĂ©sespĂ©rĂ©, se cachait un esthète, un dandy. Dommage…
Jacques,
Pour ceux qui sont intĂ©ressĂ©s par quelques trombines (et qq beaux vins aussi), cf ici le cr d’une repas avec photos (qui fĂŞtait la nouvelle victoire de Pierre et Didier au chmpionnat RVF – 2009 après 2007) : http://www.invinoveritastoulouse...
Vous dégustez également du cidre dans votre club des quatre. Auriez-vous donc déjà épuisé la planète vin ?
Justement, non, Alfredo …
C’est ce qui me plaĂ®t avec ces territoires gustatifs jamais circonscrits avec certitude (lire Ă ce sujet le sage dossier "science et vie" sur le vin, les propos argumentĂ©s de Mac LĂ©od, Brochet, Morrot) …
L’occasion aussi de rencontrer des passionnĂ©s palpitants.
Il ne s’agit pas uniquement d’avoir raison mais de prendre un plaisir Ă la fois intellectuel et sensoriel.
Encore hier soir, nous avions au club une exceptionnelle verticale du Puligny Cailleret de Montille (de très belles expressions, variĂ©es) et nous avons terminĂ© sur un savoureux et classieux d’Yquem 98 (nous savons aussi ĂŞtre des buveurs d’Ă©tiquette). 🙂