D’une oreille distraite, j'écoute ce récit qu'on me fait au milieu des vignes. Il évoque l’origine fabuleuse du nom du restaurant dans lequel, tout à l’heure, nous nous sommes régalés d'un incomparable agneau de lait, Asados Nazareno :
– Lorsqu’il avait deux ans, le père de l’actuel propriétaire est mort ! Larmes et douleur. Le jour de l’enterrement, le petit est dans sa boîte. Tout le village défile pour venir lui rendre un dernier hommage. Tout à coup, une des tantes de l’enfant, dit : »regardez, l’enfant vient de bouger ! On dirait qu’il respire… C’est un vrai miracle. S’il vit, nous l’appellerons Nazareno…
Asados Nazareno : Marco Parusso, Pierre Roby et Gabriel Rivero (de gauche à droite).
Nous voici devant un superbe rosier sauvage, juste en face du domaine Alonso del Yerro.
– Claude Bourguignon adore cet églantier. Chaque fois qu’il vient ici, il lui rend visite.
– Claude Bourguignon adore cet églantier. Chaque fois qu’il vient ici, il lui rend visite.
J’avais repéré, lors du précédent voyage, à San Esteban de Gormaz, une autre curiosité de la Ribera del Duero : de curieuses caves troglodytes disséminées au milieu des vignes où chaque viticulteur élabore le vin pour sa consommation personnelle.
Lionel Gourgue, le jeune œnologue de Alonso del Yerro, nous signale l’existence de caves similaires du côté de Haza.
Vamos a ir !
Haza, quelque part dans la Ribera del Duero : les vignes de notre hôte sont par ici…
Agrippé au sommet d’une colline, Haza paraît abandonné.
Quelques maisons égarées et décaties. Des chiens hallucinés qui se disputent vaguement un restant de mâchoire de lagomorphe.
Seules les rues, tirées au cordeau, et l’église, jaillie très certainement d’un tableau de Chirico, évoquent avec nostalgie les fastes passés de cette province de la Castilla y Leon.
L’unique bar du village est déserté et le propriétaire fulmine contre le « gouvernement d’incapables, pas foutu de rétablir l’électricité » coupée par l’orage.
Nous quittons cet endroit à regret, poursuivis par les chiens et les songes qui traînent dans le coin. Au bas de la colline, une des caves troglodytes a la porte ouverte.
L’unique bar du village est déserté et le propriétaire fulmine contre le « gouvernement d’incapables, pas foutu de rétablir l’électricité » coupée par l’orage.
Nous quittons cet endroit à regret, poursuivis par les chiens et les songes qui traînent dans le coin. Au bas de la colline, une des caves troglodytes a la porte ouverte.
Risquons-nous y : ah ! cette délicieuse sensation de fraîcheur qui vous surprend dès que vous franchissez le seuil de l’antre !
On descend une série de marches et, là, attablée tranquillement, toute une famille en train de prendre l’apéritif.
On descend une série de marches et, là, attablée tranquillement, toute une famille en train de prendre l’apéritif.
Un pressoir gigantesque en bois de thuya traverse la pièce pour venir s’encastrer au fond du local contigu, en fait le cuvier transformé en "salle de conférence" avec cheminée et tout le confort, ou presque, pour les hivers qui n’en finissent pas…
Le maître de céans ne s’embarrasse pas d’introibo ad altare Dei, ni de salamalecs : il tend à l’un d’entre nous une étrange carafe à double bec, l’invitant à boire à même le récipient, à la régalade.
Mieux vaut prévoir le pire !
Dans ces cas-là, surtout pas de précipitation. Mieux vaut prévoir le pire, la maladresse qui finira en éclaboussures vermillons : une douche au vin, si elle est bienvenue façon « Caudalies » à Martillac, peut s’avérer catastrophique. De surcroît si on vous attend pour dîner et si vous n’avez pas la possibilité de passer à l’hôtel vous changer…
Compréhensif, notre hôte finit par céder et nous tendre des verres afin que nous puissions goûter son vin. Très joliment fruité, ce dernier est aux antipodes de tout ce que nous avons dégusté durant le jour. Il doit titrer à peine 11 degrés et enchante le palais par son naturel d’expression, son air mutin, joyeux, parfaitement désaltérant. Pas de levures sélectionnées, pas de température contrôlée, pas d’enzymes, pas d’élevage en fûts neufs, pas d’acidification. Nada !
Juste un vin-boisson, du jus de Tinto fino qu’on lampe sans se creuser l’occiput, ni se tortiller les papilles fongiformes. Rien que pour le plaisir. Un vin de soif comme les aimait (et les faisait) Jules Chauvet.
Notre vigneron cultive 4 ha et livre ses raisins à différents acheteurs.
Quel prix lui est-il payé pour ce bonheur ? Entre 0.70 cts d’euro et 1.10 euros le kg. Deux euros pour quelque chose d’exceptionnel, issu de très vieilles vignes bien situées. Le genre de raisins qui permettent ensuite d’élaborer des cuvées aux prix himalayens, dûment estampillées 95 points et plus dans la galaxie Parker !
Vit-il bien ? On trinque, on sympathise, on siffle une partie de la carafe et on rit. De tout et de rien.
La joie de cet homme, comme son vin, est communicative.
Quel prix lui est-il payé pour ce bonheur ? Entre 0.70 cts d’euro et 1.10 euros le kg. Deux euros pour quelque chose d’exceptionnel, issu de très vieilles vignes bien situées. Le genre de raisins qui permettent ensuite d’élaborer des cuvées aux prix himalayens, dûment estampillées 95 points et plus dans la galaxie Parker !
Vit-il bien ? On trinque, on sympathise, on siffle une partie de la carafe et on rit. De tout et de rien.
La joie de cet homme, comme son vin, est communicative.
Demain, ou un autre jour, je vous parle des vins Parker.
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Soyons concrets Grand Jacques : si c’est si bon, pourrais-tu en rapporter quelques bouteilles à Genève, afin que l’on goûte cela ensemble en septembre; voir s’il tient le voyage; voir s’il est toujours aussi régamien (il a l’air d’avoir chaud, le bonobo !).
Toujours aussi pragmatique, François, et pourtant ! Tu dois savoir qu’il y a des rêves qui ne voyagent pas. Dès qu’on les sort de leur environnement, ils s’étiolent, finissent en capilotade. Un tel vin est fait pour être bu, là, au milieu des vignes, en plein cagnard, juste sous la terre, dans cette fraîcheur de catacombe. Si tu veux y goûter, il faudra y aller et sympathiser avec ce diable d’homme !
Comme le "vin d’ivrogne" du Père Coche (le papa de jean-François), réservé pour sa famille et les vendangeurs, alors que, nom de dzou, c’était du grand jus !
Ah le Père Coche, quel souvenir!
Ils ont trouvé Pascal Henry
Mais le cherchent-t-ils?
A voir la photo du médecin de l’équipe, mieux vaut prévoir le pire!
Ah bon, l’équipe de El Bulli a un nouveau médecin dans ses rangs ?