Beaucoup de plénitude sur ce vin au nez de ronce, de rose et de goudron. La bouche associe harmonieusement une opulence évidente à une trame serrée. Elevage exemplaire. Le bois est à peine perceptible (comme sur l’ensemble de la gamme d’ailleurs.)
On déguste ensuite les trois crus de Barbaresco en commençant par le Costa Russi, fin, racé, presque féminin dans sa texture, très finement délié avec beaucoup de fraîcheur. Agée d’une quarantaine d’années, la vigne commencer à donner ici sa pleine mesure.
Langhe rosso, Sori’ Tildin 2005
La partie la plus vieille du vignoble a mon âge (devinez…) et il existe une partie plus jeune. Merveilleux nez de goudron, épices, pivoine. Bouche droite, stylée, ascendante et finale séveuse. La trame de ce vin est une merveille. Comme le Costa Russi, le Sori’ Tildin provient du cru Roncaglie et, pourtant, quelle différence entre les deux !
Langhe rosso, San Lorenzo 2005
Egalement un vignoble en deux parties, au cœur du cru Secondine, avec une très vieille vigne (60 ans) et une partie plus jeune. C’est le vin le plus dense, le plus complet de la série. Magistral !
A noter que l’assemblage des trois vins est rigoureusement identique (95 nebbiolo et 5 % barbera).
Le pourcentage de barbera est ici un peu plus élevé (8 %). Le Cerequio est un des crus plus réputés de la zone de La Morra et Gaja a beaucoup misé sur ce vin à la texture incroyablement raffinée, au nez floral et balsamique sur des notes de réglisse. Coup de cœur.
Langhe rosso, Sperss 2004
6 % de barbera et nebbiolo. Situé sur un des plus célèbres climats de la zone, Marenca e Rivette, la vigne a aujourd’hui 34 ans. Vin profond, complexe, aux notes de goudron, de réglisse. Corps énergique, dense, tendu. Si, par le soyeux de sa texture, Conteisa a un côté presque bourguignon, ce vin, au contraire pourrait, mutatis mutandis, se rapprocher d’un Pauillac. Mais, avant tout, il est lui-même, très Barolo de Serralunga, un vin avec lequel, dans les premières années, on ne rigole pas mais qui va s’avérer merveilleux au vieillissement. Grande réussite !
Langhe rosso, Darmagi 2004
On connaît l’anecdote du nom, ce « darmagi » (quel dommage !) que Giovanni, le père d’Angelo, a laissé fuser lorsqu’il a appris que son fils avait planté du cabernet sur une excellente exposition. Ce vin (800 caisses produites chaque année) a ses aficionados. Il est mentholé, élégant, discrètement épicé et, outre le cabernet sauvignon, comporte 5 % de merlot et de cabernet franc. Très bon mais, dieu merci, pas aussi exaltant que les vins produits à partir du nebbiolo.
La saga Sandrone
Comme style d’homme, Sandrone, c’est un peu l’antithèse de Gaja. L’un est flamboyant, volubile, pressé ; l’autre est, comment dire ? plus retenu, discret, presque modeste dans son allure…
La dégustation des vins présentés par Sandrone
Dans ce millésime le dolcetto s’en sort avec les honneurs et ce vin est sans doute le meilleur dolcetto produit à ce jour par Sandrone. On est sur la cerise, le bois de réglisse, les fruits noirs, avec une texture déliée, un fruité pulpeux et une pureté d’expression exemplaire.
Barbera d’Alba 2006 il faut rappeler ici que la caractéristique de la barbera, c’est la fraîcheur. Si on n’a pas cette dernière, mieux vaut changer de métier. Ou de cépage. Nous serons vite rassurés, en ce qui concerne le métier et le cépage, en dépit d’un nez au boisé un peu exotique. L’entrée en bouche est ajustée, précise, et le vin se déroule sans surprise avec un sens évident de la continuité. « La barbera a besoin d’une cuisine plus grasse» affirme Luciano Sandrone. Moi, je verrais bien là-dessus un Fritto misto tel qu’on le mitonne dans les cuisines du restaurant Il Centro à Priocca. C’est pas des questions à la légère, ça…
Nebbiolo Valmaggiore 2006
Ce vin nécessite quelques clés de compréhension, notamment au niveau de son prix. La vigne, encore jeune, se trouve à Vezza d’Alba, à 25 km de Barolo. Tout est fait à la main car la pente est redoutable. Luciano, féru d’alpinisme, ne pouvait que tomber amoureux de ce terroir unique, sableux. Comme il le dit, le nebbiolo de cette zone donne un vin d’une « grandissima struttura. » Effectivement, c’est vigoureux, ferme mais la finesse est là.
« Economiquement parlant, c’est une viticulture désastreuse… » ajoute Luca.
Il y a des désastres qui nous font hurler de plaisir !
Nous dégustons ensuite les deux Barolos, Le Vigne 2004 et Cannubi Boschis 2004 dont j’ai déjà rendu compte ici.
Le Vigne est, dans sa philosophie, plus proche de la tradition car il assemble cinq terroirs différents alors que le Cannubi Boschis est une isolation parcellaire du cru Monghisolfo, initiée en 1986 sous l’influence de Véronelli.
Une fois de plus, ce dernier vin me sidère par son toucher de bouche et le raffinement extraordinaire de sa texture.
Quelques vins tirés de la Collection
La robe est un peu plus évoluée que sur le Cannubi Boschis 2000.Il a un côté floral, réglissé, rose. Bois de cèdre à l’ouverture. Nuances balsamiques très fines.
A l’ouverture, on trouve de très belles notes d’herbes sèches, de truffe ; entrée en bouche souple, jolie texture, on a un corps souple, avec une tannicité présente mais en passe de se fondre. Il est strict, tendu, droit dans ses bottes.
Cannubi Boschis 2000
Nez minéral, épicé, beaucoup de réserve encore au nez. A nouveau une dimension d’ampleur et de chatoiement dans la texture qui prend le dessus. On a un très beau cœur de vin, une chair satinée en milieu de bouche. Une main de fer dans un gant de velours.
Barolo, Le Vigne 1998
Très belle bouteille qui commence à exprimer tout son potentiel : de la densité, du gras, minéral, herbes sèches, c’est un nez qui a besoin d’un peu de temps pour s’ouvrir et idéalement le vin devrait être carafé 2-3 heures avant. Il a des notes de maraschino et d’amande douce en finale.
L’adresse Eno Club, piazza Savone
6 Comments
Et voilà : le spleen revient !
La prochaine fois, préviens avant d’évoquer ce fascinant Piemonte !
Aïe ! Je sens que cette vague de nostalgie va t’emporter. Je prends les paris : d’ici un mois maximum, tu passes par le Piémont. Je le dis, le répète, depuis tant d’années : à tous ceux qui n’ont jamais mis les pieds au Piémont, allez-y toutes affaires cessantes !
Vous n’en avez certainement point la nécessité mais je confirme, pour les avoir goutés récemment, tout le bien que vous pensez des vins de L. Sandrone. Un raffinement de texture porté à l’extrème dans Le Vigne et un Valmaggiore au delà du raisonnable.
J’ai été littéralement choqué par un aspect que vous n’évoquez pas mais qui n’a pu vous échapper : les vins ont un éclat sans commune mesure.
Et que dire de l’acceuil … on finit par se croire l’ami français de toujours.
Paul
Choqué ou subjugué, Paul ? Vous avez raison, ces vins, comme ceux de Gaja ou ceux de Parusso, ont, comme vous le soulignez justement, une présence et une définition aromatiques hors normes et on oublierait presque d’en parler tant cela paraît évident.
J’ai la possibilité d’acheter le millésime 97 de la cuvée Cannubi Boschis …( j’attends les 2004 à Gland ) . Avez vous dégusté ce 97 dernièrement . Il me semble que le GJE avait bien apprécié ce vin ( revue Vinifera spécial Piémont …) ….je patiente pour ouvrir le 90 !!
Il me tarde de retrouver cette belle région , ainsi que la belle table de Treiso .
Jean Luc Milleret …de plus en plus amateur des vins de la région .
Cher Jean-Luc Milleret, effectivement, le Cannubi Boschis 1997 (très bon millésime dans les Langhe) est réussi, même si, comme la montré une dégustation du GJE, il ne figure pas parmi le best of du millésime. Tout dépend donc du prix. De mémoire, il me semble que le San Rocco 1997 de Azelia et le Capella Santo Stefano 1997 de Rocche dei Manzoni ainsi que le Bussia 1997 de Prunotto lui étaient supérieur dans ce millésime. Les résultats sont sans doute visibles sur le site du GJE.