Sinon, il semble que tout le Piémont, à la différence d’autres régions situées plus au sud, se soit mis progressivement au rythme « Gaja » et ne sache plus désormais ce que le mot « procrastination » veut dire.
Très belle dégustation chez Sandrone avec un Barolo Cannubi Boschis 2005, fin, délié, caressant, à la chair exquise ; et un Barolo Le Vigne 2005, très droit, très ferme auquel l’assemblage des crus (Vignane, Merloe, Conterni et Cerretta) et les vieilles vignes, dans ce millésime, confèrent un supplément de sève et de minéralité. On retrouve ce tandem en 2006, autre très beau millésime.
Les deux vins y atteignent des sommets avec, cette fois-ci, un coup de cœur au Cannubi Boschis, dense, profond, complexe, serti dans son inimitable texture.
Pour ceux qui s’arrêtent encore de compter à 100, je sens qu’ils seront tout près de leur nirvana !
J’avais évoqué ici l’extravagante histoire de la fée du Barolo, Josetta Saffirio. Deux ans plus tard, une cave immense a concrétisé ce projet.
C’est Sara, la fille de Josetta qui s’en occupe, déambulant, elle aussi, à toute allure dans ce nouveau vaisseau spatial. Pour l’heure, Sara paraît bien seule, presque perdue, dans ce dédale. A-t-elle vu trop grand ? Mais non, mais non… Elle va se marier en décembre, avec un jeune homme qui habite sur la colline en face et qui fait, lui aussi, du vin.
En attendant on goûte quelques vins de cette nouvelle cave qui devrait faire parler d’elle, et pas seulement parce que Sara a la grâce d’une bayadère. Un Langhe bianco 2008 issu d’un cépage original (sans doute originaire de Cinque Terre), présent en Italie du nord, le rossese. Original, intrigant, avec ses notes d’agrumes et de romarin. A noter aussi un très joli Langhe rosso 2007 issu du nebbiolo, tout en intensité fruitée, sur des notes pétantes de fraise, avec une bouche gourmande, pulpeuse. Mais le fleuron de la cave, ici, c’est le Barolo Persiera dont nous dégustons le millésime 2005 : dense et raffiné dans ses tannins, il fait montre d’une vraie dimension de complexité.
Le paysage des Langhe vu depuis la cave de Parusso.
Un dernier arrêt chez la tête chercheuse du Barolo : Marco Parusso est en Allemagne ; c’est Tiziana, sa sœur, qui nous fait goûter les vins.
Allez, juste avant de reprendre la route vers le nord, cette merveille, un des plus grands vins dégustés depuis deux jours, le Barolo Bussia 2006 ! Séquence émotion. L’archétype d’un Bussia de grande origine, fin, précis, nuancé, un vin à facettes multiples, sur la rose, la réglisse, la pêche avec une formidable assise tannique, sans une once de vulgarité.
Je ne résiste pas au plaisir de rappeler la définition que donne Marco du Bussia : « Plus qu’un vin, c’est un style de vie, mais, attention, pas pour tous ! C’est pour une vie élégante, équilibrée, pas pour ceux qui sont devenus riches en peu de temps »
Dommage qu’il ne soit pas là, on eût aimé lui poser cette question : »Oui, mais quid de ceux qui, naguère riches, sont devenus tout à coup un peu plus pauvres ? »
Dommage qu’il ne soit pas là, on eût aimé lui poser cette question : »Oui, mais quid de ceux qui, naguère riches, sont devenus tout à coup un peu plus pauvres ? »
Nous sommes maintenant à Gattinara, petite ville paisible, à l’entrée de la vallée perdue, le merveilleux Valsesia.
Il est tard. La route fut longue. Nous avons rendez-vous avec Alberto et Lorelle Antoniolo, frère et sœur, de l’Azienda du même nom.
Il est tard. La route fut longue. Nous avons rendez-vous avec Alberto et Lorelle Antoniolo, frère et sœur, de l’Azienda du même nom.
A peine avons-nous commencé à déguster leurs merveilleux vins de vigueur, pfuit… évaporée la fatigue ! Quelle densité, quelle originalité et quelle force d’expression !
Les Antoniolo produisent quelques-uns des plus grands vins, non seulement du Piémont, mais de toute l’Italie. Le cépage est ici le nebbiolo, comme pour le Barolo et le Barbaresco, avec un micro-climat et un terroir (volcanique) toutefois différent des Langhe.
Ce vignoble de la province de Vercelli, avec ces trois appellations principales (Gattinara, Ghemme et Bramaterra) a de sérieuses lettres de noblesse puisqu’au XIXème siècle sa superficie couvrait 40 000 ha (contre 1300 ha aujourd’hui !). Entre temps, le phylloxéra et l’industrialisation sont passés par là.
La famille Antoniolo produit trois cuvées différentes que nous dégustons dans le millésime 2005 : le Gattinara, le Gattinara San Francesco, dense, fumé, minéral, mais plus « accessible » que le suivant, le Gattinara Osso San Grato, plus « viril », balsamique et floral à la fois, d’une extraordinaire densité avec un « grain » de tannin infiniment savoureux. Deux vins à projeter dans le temps, ainsi qu’en témoigne le Osso San Grato 1999, « encore très jeune » dit Alberto Antoniolo, dégusté plus tard dans la sympathique trattoria Alla Torre à Romagno Sesia.
A voir l’impressionnante collection de vieux millésimes qui mûrissent dans les caves du domaine, ces vins sont évidemment taillés pour la garde et possèdent à coup sûr cette touche de magie rare qui est la marque distinctive des plus grands.
Sûr qu'on va en reparler…
8 Comments
Bien aimé récemment :
Nebbiolo d’Alba – Luciano Sandrone – Nebbiolo d’Alba "Valmaggiore" 2006 (très bon 1997 lors de Vinexpo 1999)
Barolo – Sandrone "Cannubi Boschis" 1997 : 3ème rencontre, bien, vraiment solaire (ce fameux millésime), pas grand, style moderne avec un reliquat lactique (très bon 1995 lors de Vinexpo 1999).
Magnifique reportage, salivant !
Viva Italia !
Le rossese? Cepage blanc??
Je croix que le rossese c’est un tres beau cepage rouge de la region de Imperia e Dolceacqua en Ligurie direction Ventimiglia.
Il faut gouter les vins de: Terre Bianche a Dolceacqua des tres grand vins.
Ciao GAbriele
Gabriele, il faut vérifier – c’est toi le Maître ! – mais nous avons goûté un vin blanc et Sara nous a dit que c’était du rossese… Peut-être vinifié en blanc ?
Le merlot est parfois vinifié en blanc dans le Tessin …
Qui n’a jamais bu Antoniolo ne connaît pas le potentiel ultime du nebbiolo en terme de finesse.
Et surtout la grandeur des plus beaux terroirs (historiques) de Gattinara.
Pour une fois la comparaison avec la (grande) Bourgogne ne me choque pas outre mesure, même si cela reste avant tout des vins du Piémont !
Comme souligne Gabriele l’appellation “Rossese di Dolceacqua” ou “Dolceacqua” est reservée aux vins rouges, puis si le cépage est vinifié aussi en blanc ça je ne sais pas …
Stefano
Dans les vins de Lorella Antoniolo je retrouve l’ésprit bourguignon, en effets sauf une cuvé village les autres vins résument le caractère du climat.
Stefano
Ciao Stefano,
En fait, quand je parallélisais Antoniolo avec la Bourgogne, c’était surtout pour faire référence aux sommets de profondeur/finesse/originalité que les meilleurs pinots peuvent permettre et offrir.
Par contre si toutes les cuvées "villages" de Bourgogne avaient le niveau et la qualité du "simple" Gattinara classico de Lorella et Alberto, j’en achèterais plus souvent, et qui plus est à ce prix là !
😉
Content d’avoir fait ta (votre) connaissance "en vrai", au passage…