Luciano Sandrone, dont l’humilité est inversement proportionnelle à la renommée, était présent parmi nous pour commenter de concert avec le critique Gianni Fabrizio une dégustation de son Barolo Le Vigne.
Rappelons que ce vin est un assemblage de plusieurs crus. Au depart, en 1990 et jusqu’en 1989 le cru était issu de l’assemblage des quatre parcelles suivantes. Tout d’abord, deux parcelles sur le cru Vignane,commune de Barolo; la partie la plus haute de Vignane se situe en face du Cannubi. Le second cru est Merli à Novello, vignoble plein sud, situé assez haut (400 m) avec une très bonne ventilation et orienté ouest/sud-ouest. Ceretta sur Monforte mais déjà sur le côté Serralunga, plus viril. Et enfin, Conterni toujours sur Monforte, la partie la plus élevée de Monforte, près du restaurant La Posta, avec les plus vieilles vignes (45 ans).
Le deuxième assemblage débute avec le millésime 2009 où Ceretta et Conterni sont remplacés par le cru Baudana, situé sur Serralunga, exposition sud-sud/ouest à 300 m d’altitude et par le cru Villero situé sur Castiglione Falletto.
On doit à Luigi Veronelli une influence déterminante au début des années 80 dans l’isolation parcellaire des crus de Barolo sur le modèle bourguignon. En 1985, Luciano Sandrone procède pour la première fois à l’isolation parcellaire de son Cannubi Boschis (cru de 7 ha connu jadis sous le nom de Monghisolfo et situé dans le prolongement nord-est du Cannubi). Cinq ans plus tard, c’est la consécration pour le Cannubi Boschis de Sandrone qui accède à l’empyrée des grands vins avec un 100 points sur 100 décerné par Robert Parker !
La même année, Luciano Sandrone sort le premier millésime de Le Vigne que nous avons eu la chance de déguster grâce à la générosité de Gianni Fabrizio qui l’avait extirpée de sa cave. Le Vigne n’est pas un autre cru, mais fait référence à la tradition du Barolo qui privilégiait l’assemblage de différents crus. Il faudra un certain temps pour imposer Le Vigne en terme d’image, d’autant que les quatre premiers millésimes ont été vendus aux USA et qu’il n’a commencé à être connu chez nous qu’à partir de 1995.
La dégustation
Barolo Le Vigne 1999
LS : Année classique, de maturation longue, pas trop de chaleur, vins avec de la fraîcheur, au tanin affirmé. Rendements assez confortables, précise GF
Premier nez vanillé, herbes sèches. Agréable fraîcheur d’attaque. Il évolue, plus strict, avec de beaux arômes de Barolo classique, sur le goudron, les épices. Finale à la tanicité ferme et accomplie. C’est un vin très droit, très digeste. Délicieux dès aujourd’hui à table !
Quelques images de la dégustation
Barolo Le Vigne démystifié from Jacques Perrin on Vimeo.
Barolo Le Vigne 2000
LS : Année plus chaude. Vins élégants, plus tendres, plus fruités et plus chaleureux.
Couleur grenat légèrement évoluée. Impression fruitées, des baies, puis pruneau. Beau velouté de texture, c’est généreux, ample. La trame est souple, un peu relâchée. Finale réglissée qui n’atteint pas tout à fait la dimension espérée de complexité. GF : « Pour nous qui habitons Barolo, ça n’a jamais été un grand millésime ! ».
Barolo Le Vigne 2001
LS : Grande année, vins structurés, puissants, c’est le millésime parfait !
Belle couleur profonde. Le nez est profond, complexe. Grande bouche, magnifiquement architecturée. L’archétype du grand Barolo avec des notes de violette, de réglisse, de prune, superbe vin. C’est un merveilleux vin, dense, précis, buriné par le terroi d’une grande rectitude. Il sera à son optimum d’ici 10 ans environ.
GF: 2001 est supérieur à 1999 dans le Barolo, sur Barbaresco, ça peut se discuter.
Barolo Le Vigne 2002
LS : Année très difficile, pluie, températures basses, à Barolo nous avons eu la grêle le 4 septembre. Nous n’avons pas fait de Cannubi Boschis et le Vigne est produit uniquement à partir de deux vignes de Monforte.
Il offre une belle couleur. Nez expressif, sur la truffe, touche animale et fruitée. Bouche vive, qui se resserre en finale au lieu de s’évaser. Il prendra plus de relief à table avec la savoureuse cuisine du Piémont.
Barolo Le Vigne 2003
LS : Par rapport à 2002, c’est une année complètement différente, très chaude. Millésime très précoce. On s’est retrouvés avec des raisins très sucrés et des tanins pas tout à fait mûrs. Très peu de bouteilles produites dans ce millésime, comme en 2002.
Le nez est expressif, sur les fleurs séchées, le tabac. Ensemble harmonieux, d’une belle richesse de constitution, qui évite l’écueil du millésime. Dans ce millésime un travail de tri important a été fait au domaine pour éliminer les grains surmaturés ou figués.
Barolo Le Vigne 2004
LS : Grande année à la maturation parfaite. Belles vendanges avec des raisins parfaitement mûrs.
Aussi profond et racé que le 2001, il finit plus strict au niveau du tanin, mais avec une très belle vibration aromatique et un noble réglissé. C’est une très grande bouteille avec beaucoup d’amplitude et d’énergie. Par rapport au 2001, le 2004 offre peut-être un surcroît d’élégance.
Barolo Le Vigne 2005
LS : Année fraîche. Durant les deux mois qui ont précédé la vendange, le temps était plutôt beau. Les vins offre une structure assez classique, dans un style frais et serré.
L’aromatique est très originale, finement mentholée, puis florale avec une note fumée. Corps d’une belle densité, avec une trame dynamique et une belle allonge finale. On a une très jolie vibration aromatique finale, intense et sapide.
Barolo Le Vigne 2006
LS : C’est un bon millésime, plus orienté sur la finesse que sur la concentration.
Rond, sphérique et caressant, il nous emmène vers des rivages séducteurs avec beaucoup de raffinement dans l’arôme et la texture. La pointe stricte sur le tanin en finale avec un léger côté quinquina et thé fumé vient le rappeler à l’ordre.
Barolo Le Vigne 2007
GF : C’est un millésime de chaleur, précoce, avec une maturité rapide, qui lui donne un côté plus millésime très côté par nos collègues américains.
Ce vin a été servi en magnum.
Le vin est doté d’une belle trame avec une allonge et volume importants. Présentement, il se présente comme un pur sang, un peu fougueux, mais pas encore totalement uni dans sa structure. Laissons-lui un peu de temps pour se révéler totalement.
Barolo Le Vigne 2008
LS : Année très intéressante, conditions bonnes, saisons bien délimitées, après un printemps et son début d’été plus difficiles. Encore un millésime très classique.
Confirmation à la dégustation. Après un peu d’ouverture, le nez se révèle, minéral et balsamique avec une impression de fruits frais. Corps superbe, tonique et fuselé avec un équilibre particulièrement réussi !
GF : Peut-être moins Barolo que d’habitude, avec ses notes de fruits rouges et un côté légèrement végétal qui rappelle la Bourgogne.
Barolo Le Vigne 2009
LS : Si le printemps a été un peu pluvieux, permettant de reconstituer les réserves hydriques, le reste du cycle végétatif s’est déroulé sans heurt et les raisins ont pu mûrir dans des conditions optimales.
Superbe nez, complexe avec de la profondeur et une vraie noblesse d’expression. Il est sur le versant réglisse, truffe, avec un côté racinaire. On retrouve le réglissé en bouche avec une note d’olive noire. Corps savoureux, assez ferme et épicé dans sa tannicité. Rappelons que c’est avec ce millésime que la composition des crus change un peu avec le remplacement de Ceretta et Conterni par le cru Baudana et par le cru Villero situé sur Castiglione Falletto.
GF : Il a quelque chose qui rappelle le 2006 !
Barolo Le Vigne 2010
LS : Millésime avec des conditions quasi parfaites. Tout est arrivé au bon moment!
Suprême élégance dans l’expression aromatique, même si le vin est encore très loin de son apogée. Vin complet, structuré, puissant, avec une belle finale. Il est élancé, notes boisées et balsamiques. Grande finesse sur la finale. Ce sont parmi les plus beaux tanins de la soirée.
Barolo Le Vigne 1990
Notes d’herbes sèches, de truffe, de goudron. Légère note de volatile qui ne le pénalise pas. Le vin s’ouvre en finale sur des notes de violette et de réglisse d’une belle vibration. Superbe tenue pour un vin de cet âge !
Un grand merci à Luciano Sandrone (qui avec le 2014 signait son 51ème millésime !), à son assistante Anna Rech et Gianni Fabrizio pour leur contribution à la réussite de cette soirée !
Comment
Belle verticale.
Je confirme tes impressions, Jacques, sur le 1999 bu il y a peu à table : Organique et tannique, avec de la cerise, du quinquina, des épices mélangées, du chocolat noir. Richesse tenue (16,5/17).