Tout le monde (ou presque) a entendu parler du Mas de Daumas Gassac, cru véritable du Languedoc, sur lequel se sont penchés d’illustres sourciers, Henri Henjalbert et Emile Peynaud. La talent de communicateur d’Aimé Guibert, la ténacité et la foi de la famille Guibert ont fait le reste. Aujourd’hui, on se souvient moins bien des débuts, de l’extraordinaire aventure que présente cette propriété. La verticale présentée ci-dessous a été pour moi – et pour un certain nombre d’autres dégustateurs – l’occasion de sonder le sillage de la comète et tenter de déchiffrer les signes de son avenir.
Le premier millésime produit est le 1978. 17866 bouteilles en « provenance d’un terroir unique en Languedoc ». Un nouvel OVNI (objet vineux non identifié) venait de débouler sur la planète vin.
La suite ressemble à un conte de fées. Mis en scène avec maestria par l’extraordinaire communicateur qu’est Aimé Guibert. Les journalistes, avides de découvertes sensationnelles, s’engouffrent dans ce sillage. Le Pétrus ou le Lafite du Languedoc sont des épithètes souvent accolées à Daumas Gassac. Le chœur des dithyrambes accompagne la procession des millésimes.
Une chose est certaine. Daumas Gassac ouvre la voie et se révèle une vraie source d’inspiration. Regardez la carte viticole du Languedoc (un océan viticole de 170 000 ha, plus de dix fois la surface du vignoble suisse !), l’épicentre est là où se trouve Daumas Gassac. A Aniane. Dans un rayon concentrique de quelques kilomètres, demain viendront les autres domaines phares de la région, Olivier Jullien, La Grange des Pères, Peyre-Rose, ceux du Pic Saint-Loup, Montcalmès, La Pèira. D’autres encore.
Pour un historique complet, c’est ici.
Daumas Gassac 1979
Il a gardé une belle robe rubis. Nez racé, assez expressif. Notes végétales nobles. Touche iodée, épices. Il évolue ensuite vers un côté bois mouillé. La bouche est belle, avec de la fraîcheur et une impression veloutée. Finale d’une persistance moyenne, sur un tanin un peu rugueux.
Daumas Gassac 1980
Belle robe grenat. Le premier nez manque un peu de pureté. S’ouvre ensuite sur des notes de cuir, de bois, avec une touche de réglisse. Jolie bouche, charnue, avec de la présence. Finale sur les épices, la garrigue, le cuir. Le tanin offre davantage de « patine » que sur le 1980
Daumas Gassac 1981
Notes normales d’évolution sur la robe. Nez peu présent. Moins d’expression et de vie que sur les précédents. Jolie entrée en bouche, sur la finesse. On perd un peu la saveur à l’évolution. Fruité un peu monocorde.
Daumas Gassac 1982
Superbe robe encore jeune. Le nez, assez discret de prime abord, est sur le cèdre, puis la truffe. Entrée en bouche large, évasée. Très belle richesse de constitution qui lui confère un style opulent. Beau volume, puissant, il manque un peu d’allant sur la finale.
Daumas Gassac 1983
Nez un peu animal, un peu phénolé. Notes de cuir et de soja en bouche. Il manque un peu d’intégrité au niveau aromatique. Bon équilibre mais il manque de vibration.
Daumas Gassac 1984
Robe sombre avec quelques traces d’évolution. Marqué au nez par des notes épicées et boisées, il apparaît différent, plus jeune, plus vivace en bouche. Finale moyenne.
Daumas Gassac 1985
Très belle couleur. Grande race d’expression sur ce vin. C’est la première fois qu’on a une dimension de vraie complexité. Fleurs sèches, épices douces. Très belle attaque, savoureuse, avec de la profondeur, de la fraîcheur, magnifiques tanins, sapides, le vin s’est allongé sur la finale. Pour la première fois ici, on a touché quelque chose. On trouve une notion d’énergie sur ce vin.
72 % cs
Daumas Gassac 1987
La couleur est restée vive. Nez intéressant, avec un peu moins de fond que le précédent. Touche de soja. Petite pointe végétale au palais. Le tanin granule un peu. Bon vin dans un style un peu rustique. Il plaît néanmoins par son caractère « paysan », savoureux.
Daumas Gassac 1988
La couleur est belle. Nez marqué par un léger rancio de bois. Notes d’épices, de cuir à l’évolution. On retrouve cela au palais. Bouche sur la fraîcheur. Forme élancée. Esthétique très bordelaise sur ce vin.
Daumas Gassac 1989
Belle robe. Notes anisées et de fruits secs. Il est assez riche, solaire. Volume généreux, qui manque un peu de trame. Touche de bouche élégant et finale d’une belle persistance.
Daumas Gassac 1990
Nez pas très expressif mais avec de la race. Beau volume de bouche. Il pourrait rappeler le 1985, en un peu moins profond et tendu. Plus facile en milieu de bouche. Très jolie finale, sapide, persistante, sur des notes fruitées juteuses et balsamiques. Il est très Daumas Gassac.
Daumas Gassac 1991
Nez intéressant. Réglisse, violette, cardamome. Fruits noirs. Beaucoup de finesse sur ce vin. Il est élancé, dynamique. Très jolie bouche avec une finale persistante et complexe.
Daumas Gassac 1992
La robe est soutenue. Nez sur le poivron et le menthol qui lui confèrent une dimension de fraîcheur. Entrée en bouche un peu fuyante. C’est plus simple, avec une association de fruits mûrs, légèrement confits et des notes plus végétales. Le vin paraît un peu dissocié.
Daumas Gassac 1994
Notes fumées au premier nez, qui ouvrent ensuite sur les fruits noirs. Une belle surprise avec ce millésime que je n’attendais pas à ce niveau. Corps plein, savoureux, bien articulé. Il finit sur un tanin un tout petit peu ferme mais ce n’est pas gênant. Une agréable réussite. On a une vraie dimension de finesse sur ce vin.
Daumas Gassac 1995
La couleur est moins intense que sur le précédent. Nez sur les épices, touche de havane et de cuir. Bouche souple, équilibrée, joli retour en bouche au niveau aromatique et finale d’une belle vibration.
Daumas Gassac 1997
Très intéressant au niveau aromatique. On trouve les multiples expression de la garrigue et des herbes méditerranéennes avec des notes de fleurs sèches. Il est finement mentholé. Assez frais en bouche, il révèle une forme différente. On pourrait presque dire qu’il « pinote ».Finale sur le cuir et les épices. « Un vin reposé et reposant » dit l’un des participants. C’est l’année où les cépages d’origine arménienne entrent en jeu précise Basile Guibert.
70.3 % cs
Daumas Gassac 1998
Le nez offre une vraie complexité : fruits noirs, épices, avec une impression minérale. Très beau velouté d’attaque, avec un menthol présent mais qui l’accompagne bien. assise magnifique, aux tanins, fermes, savoureux, bien découpés. Une grande réussite de DG. Style très pur, très classique.
Daumas Gassac 2000
Nez intéressant, pas totalement ouvert avec, pour la première fois perceptible, une empreinte de chêne. Très jolie bouche, souple, à la texture généreuse (c’est un des plus hauts % de merlot). Finale stylée. Très belle évolution.
Daumas Gassac 2001
Jolie couleur. Nez sur un boisé un peu crémeux, bois de réglisse, myrtille (surtout en bouche). Bouche un peu resserrée à nouveau Les tanins sont fermes. Il finit sur une pointe d’austérité.
Daumas Gassac 2002
Pour la première fois, on a une perception assez nette de boisé vanillé. La bouche est dans le même registre. A-t-on voulu mettre davantage de bois neuf dans ce millésime pour compenser une matière un peu plus légère ?
Daumas Gassac 2003
Très belle robe, profonde, encore jeune. Superbe velouté dans l’approche en bouche. Il est charnel, sensuel, avec des notes de fruits confits, mais sans une once de lourdeur. Il est à peine marqué par le côté solaire du millésime. C’est aussi ça la force d’un grand terroir, atténuer les effets climatiques.
Daumas Gassac 2004
Un vin difficile à goûter ce jour-là. Jolie matière, mais l’ensemble est marqué par un mercaptan de bois.
Daumas Gassac 2005
Passé un premier nez qui évoque le bois mouillé, il évolue en direction du cade, du génévrier avec un côté sous-bois. Jolie bouche, charnue, belle texture.
Daumas Gassac 2006
Robe foncée. Ensemble fin, stylé, à la fois dense et frais qui s’achève par une finale complexe, caractérisée apr des notes de cardamome, de violette et d’épices douces.
Daumas Gassac 2007
Jolie robe rubis. Le nez s’ouvre sur des notes de baies et de menthe. De forme élancée, ce vin offre une belle finesse. La trame est précise et les tanins juteux et bien découpés.
Daumas Gassac 2008
A nouveau un très joli style, classique : fruit expressif, assez intense ; trame présente, milieu de bouche charnu. C’est un vin très harmonieux et fin pour un vin du sud, avec une superbe dimension de fraîcheur.
Daumas Gassac 2008 Cuvée Emile Peynaud
Cette cuvée n’a été produite qu’en 2001, 2002, 2007 et 2008. Elle représente une isolation parcellaire du lieu-dit Peyrafioc, juste en face du Mas, qui est un peu le cœur du domaine. La dégustation de ce vin illustre – si besoin était – la force et la singularité de ce terroir : nez superbe associant les épices et les impressions fruitées. Corps magistral, long, sapide, à la finale de grand caractère. Voilà tout simplement ce que le Languedoc peut produire de meilleur !
Daumas Gassac 2009
Robe profonde. Nez racé, havane, épices, notes florales. Le nez offre une vraie dimension de complexité. Ample, charnu, doté d’une très belle trame tanique et d’une persistance sur le fruit et les épices, il affirme un style punchy et séducteur avec un pourcentage de syrah plus élevé que d’habitude.
Daumas Gassac 2010
Profil aromatique crémeux et vanillé. Bouche souple, chatoyante, jolie texture. Très bon, mais n’atteint pas tout à fait la dimension du 2009.
Un vin qui a enthousiasmé Bernard Burtschy lors de la dégustation faite au domaine en février 2014.
Daumas Gassac 2011
Basile Guibert rappelle les conditions du millésime : « on a vendangé du 13 au 24 septembre. Ensuite on a eu un véritable été indien. Quand on faisait les remontages, ça explosait d’arômes ! » On retrouve ces sensations sur le 2011 aujourd’hui avec un nez intense, regorgeant de notes fruitées d’une grande distinction. Le corps est au diapason, long, précis et séveux. Superbe !
Daumas Gassac 2012
Beau volume, généreux, sur une aromatique fine et plus complexe (avec de très jolies notes florales notamment) que le précédent. Il sort de la mise en bouteilles et devrait se révéler davantage d’ici quelques mois. Quoi qu’il en soit, c’est également une très belle réussite qui laisse augurer un très beau potentiel de vieillissement.
Vins dégustés à la propriété les 23 février et 29 avril 2014. Une précédente verticale avait eu lieu à la propriété en janvier 2001. Lors de cette dégustation, mes vins préférés (sur 22 vins présentés) avaient été le 1982, 1985, 1988, 1990, 1991 et 1998.
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