Pourquoi cette question ? Car dans leur activité les producteurs sont contraints de se plier à des normes contraignantes. Le vin « sous contrôle » n’est pas nouveau : en 1936, une étape décisive a été franchie avec la création des AOC et une réglementation qui avait la force d’un décret-loi voté par le Parlement. Si le cahier des charges a été défini par les viticulteurs, le contrôle a été divisé en deux instances : la répression des fraudes d’un côté ; l’Institut des appellations contrôlées, de l’autre. Michel Bettane rappelle qu’à partir du moment où les appellations entrent dans un décret-loi, elle deviennent une marque et appartiennent à la nation. Eric Rousseau, précise-t-il, est propriétaire d’une parcelle dans le Chambertin mais il n’est pas propriétaire du Chambertin.
On connaît malheureusement le fonctionnement de ces soixante ans de contrôle : les vignerons ont été de plus en plus laxistes…
On a également pour la première fois figé tout progrès possible au niveau de la viticulture et de la vinification.
On a également pour la première fois figé tout progrès possible au niveau de la viticulture et de la vinification.
Avec l’apparition de la CEE, on met au rancart progressivement les réglementations individuelles des Etats-membres. L’environnement culturel a également changé : le principe de précaution est devenu désormais un axe central de toute politique.
Les cahiers des charges doivent donc être réécrits dans toute l’Europe. La date-limite est le 31.12.2011.
Les cahiers des charges doivent donc être réécrits dans toute l’Europe. La date-limite est le 31.12.2011.
Nous sommes passés d’un régime de contrôle à un régime de protection, des AOC aux IGP et AOP. Ce glissement de sens n’est pas innocent, comme l'a fait remarquer Michel Bettane.

Louis-Michel Liger-Belair, domaine Liger-Belair à Vosne-Romanée – photo Armand Borlant
Qui sont les protecteurs ? Il y a l’OCM (organisation commune de marché) et l’OGD (organisation de défense et de gestion) qui regroupe les différents opérateurs de la filière, recrute et forme des contrôleurs. Pour ce qui concerne la viticulture par exemple, tout sera fait pour faciliter la tâche des contrôleurs idiots : densité de plantation, modes de conduite, etc.
Idem pour ce qui concerne les normes de constitution des vins.
Idem pour ce qui concerne les normes de constitution des vins.
Il existe en fait une contradiction insoluble entre la norme et la liberté créatrice individuelle. Cette contradiction, selon Michel Bettane, risque de contribuer à faire disparaître le savoir-faire artistique – qui était à l’origine des grands vins – au profit d’une norme industrielle.

Crystelle Pillot, domaine Paul Pillot, Chassagne-Montrachet – photo Armand Borlant
C’est l’ancien président de l’INAO, René Renou qui, a rappelé notre conférencier, avait compris que des normes générales ne peuvent être définies qu’à un niveau minimum. Il avait eu l’idée d’une appellation d’Excellence et pensait qu’il fallait remplacer la normalisation générale par une normalisation garantie par le vigneron, à l’image de ce qui se fait en Allemagne avec le VdP (Verband Deutscher Prädikatsweingüter) qui vient de fêter son centenaire.
Michel Bettane a ensuite abordé la question de la typicité – au nom de laquelle les vins les plus originaux – sont souvent exclus en dégustation d’agrément, débusquant ce qui se cache souvent derrière ce mot : la typicité, c’est la somme des routines et de toutes les paresses individuelles.
– Chaque fois que j’entends ce mot de typicité, j’ai envie de sortir mon revolver, a-t-il ajouté, pas si provocateur que ça… Et de rappeler que la dégustation ne doit pas être uniquement technique mais qu’elle est une expérience philosophico-esthétique.

Photo Armand Borlant
Le débat qui a suivi la conférence de Michel Bettane a permis de revenir sur deux thèmes importants, celui de la marque et du terroir et celui, déjà abordé au début, de la norme et de la responsabilité.
Profitant de l'occasion, Michel Bettane a pointé du doigt la contradiction centrale du système des Primeurs à Bordeaux dont critiques et consommateurs sont devenus les otages : d’un côté, nous avons des vins dits de garde dont on devrait définir la qualité avant même que leur élevage soit terminé et qu’ils soient mis en bouteilles !
– Un de ces jours, je vais mettre une bombe dans les salles de dégustation des Primeurs, a-t-il ajouté avec ironie.
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"Dans une échelle de dangérosité de 0 à 100, l’alcool est évalué à 72, l’héroïne à 55 et le crack à 54.""
Pistolet, bombe, …
C’est donc bien vrai, Armand, ce diagnostic dénoncé par François ! :-)))))
(on avait déjà les blockbusters pour palais en mal de sensationnel)
Mais c’est toutefois un théâtre bien plaisant que ce printannier ballet bordelais …
Qui goûte des pré-breuvages qu’il ne pourra jamais acheter, qui papote, qui gribouille quelques notes, qui se fait mal voir en étant sincère, qui flatte, qui déterminise et compare avec les sanctions des "spécialistes", qui prépare sa petite spéculation, qui fait des affaires …
C’est la faute aux anarchistes grecs
Cette contradiction, selon Michel Bettane, risque de voir disparaître le savoir-faire artistique qui était à l’origine des grands vins au profit d’une norme industrielle.
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