Durant cet été hélas marqué par une météorologie capricieuse et, surtout, par une actualité internationale dramatique, ce blog a été mis en veilleuse. Le temps de parcourir un peu le monde, de se frotter à d’autres paysages, d’autres sensations.
Voici quelques images et un Journal très succinct d’un voyage effectué récemment en Arménie, Géorgie et Turquie à l’invitation de Zorik Gharibian de Zorah Wines. Voyage très symbolique et riches en émotions, car il aura permis à notre petit groupe de découvrir ce qui est sans doute le plus ancien site de vinification au monde et de faire l’ascension de la montagne « mère de toutes les vignes » : le biblique Mont Ararat ! Ce voyage fera l’objet d’un reportage détaillé dans le prochain Vinifera à paraître courant de l’automne.
Jour 1 Escale à Kiev en Ukraine. Quelques jours auparavant, un Boeing de la Malaysia Airlines a été abattu en plein vol, probablement par un missile Buk-M2, malgré les dénégations de Moscou. Après l’atterrissage, une partie des passages applaudissent, heureux certainement d’être saufs ! Au-dessus d’Erevan, quelques heures plus tard, nous ne sommes pas davantage rassurés : notre Embraer 190 est pris dans un orage gigantesque qui ne se produit que très rarement à cette période de l’année.Welcome in Arménia !
Jour 2 : forteresse de Garni avec le temple Mithra. Ce site situé au pied des montagnes Guéghama au bord de la rivière Azat est un des plus anciens d’Arménie. Visite du monastère Guéghard (11ème siècle) qui comprend de nombreuses reliques. Première rencontre avec Boris Gasparyan, archéologue à l’Académie Nationale des Sciences à Yerevan.
Jour 3 : visite des vignes de Zorah près du village de Rind et du village de Yeghenadzor. Dans cet endroit d’une beauté âpre et sauvage, Zorik Gharibian a créé en une quinzaine d’années un vignoble phare pour le pays. Avec l’aide de l’agronome Stefano Bartolomei et de l’œnologue Alberto Antonini, il y produit deux vins issus de l’areni noir, le grand cépage arménien : la cuvée Karasi et la cuvée Yeraz qui provient d’une très vieille vigne à 1600 m d’altitude.
Visite sur site de Ulgur dans la montagne et rencontre avec un berger qui parle d’arménien classique.
Deuxième rencontre avec Boris Gasparyan et visite de la grotte Areni dans la région de Vayots Dzor non loin des vignes de Zorah. Les travaux de fouille ont débuté ici en 2007. Quel choc de découvrir dans un état de conservation quasi parfait ce qui est très certainement le plus ancien site de vinification au monde : – 6100 ans environ !
Journée fertile en émotions qui se termine par la visite, à quelques km de la grotte, du superbe site de Noravank (XIIIe)
Jour 4 : départ pour l’Ararat. Nous empruntons une portion de l’ancienne route de la soie. Caravansérail de Sélim (1332) sur le col de Selim, à 2400 m d’altitude, au nord de Gegharkunik. Nous longeons ensuite la rive du lac Sevan dans la province de Gegharkunik en Arménie. C’est un des plus vastes lacs d’altitude au monde (1900 m.)
Rencontre avec Rasmig Arzooian à Dilijan, maître en poésie oratoire arménienne. Entrée en Géorgie. Route vers la Turquie. Arrivée à Doğubayazıt.
Jour 5 : montée au camp de base de l’Ararat à 3200 m. Tout près du campement d’été de la famille de notre guide Buhran, Zorik Ghariban et Maurice Zufferey répètent le geste de Noé, père de la vigne, et plantent de l’areni noir à 2800 m. d’altitude !
Jour 6 : montée au camp 1. Nuit à 4200 m.
Jour 7 : réveil à 1h00 du matin. Au lever du jour, nous sommes au sommet du mont biblique, l’Ararat. Altitude 5137. Baptême de la nouvelle cuvée de Zorah wines, Yeraz, un vin fantastique qui va parler de lui !
Redescente au camp 1, puis au camp de base.
Jour 8 : retour à Doğubayazıt
Jour 9 : longue route du retour en passant par la Turquie, la Géorgie et le nord de l’Arménie pour arriver le soir à Yerevan et revoir une dernière fois l’Ararat qui se trouve à quelques km d’ici. La frontière entre la Turquie et l’Arménie étant fermée, à l’initiative de la Turquie, depuis la guerre du haut Karabagh, il nous aura fallu plus de 12 h de route pour revenir en Arménie.
Et encore vous dirai qu’au mitan de cette Grande Arménie est l’arche de Noé, sur une grande montagne. C’est vraiment une très grande montagne, pareille à un cube, sur laquelle, dit-on, l’arche s’est posée, et de là vient que la montagne est appelée Mont de l’arche de Noé. Elle est si large et si longue qu’en deux journées n’en ferait-on le tour. Au sommet de la montagne il y a une telle quantité de neige que nul ne saurait l’atteindre, parce que la neige ne fond jamais entièrement.
Cette arche est de très loin visible, car très haute est la montagne sur laquelle elle se trouve, et il y a de la neige presque toute l’année ; en certain endroit, c’est comme s’il y avait une tache et une grande chose noire qu’on voit de très loin au milieu de ces neiges, mais de près, on ne voit rien du tout.
Marco Polo, La Description du monde
5 Comments
« Avec des voyages comme ça, vous allez accéder à la sagesse suprême, Jacques. Mais n’oubliez pas de redescendre ! »
Dixit.
Elle n’est pas de moi, mais de Jean-Pierre Boyer, qui m’a dit cela par téléphone quand je lui ai expliqué où vous étiez monté !
Merci Nicolas ! C’est vraiment du JPB. Il sera « immortalisé » dans le prochain Florilège grâce à Matthieu Berthod ! Bonne suite de vacances !
Les collines du Brunello et Val d’Orcia sont moins hautes mais qu’elles sont belles, elles mériteraient même un poète digne de ce nom pour les aimer et le dire ! Bon été à tous. Ici, il fait beau…
Superbe reportage … quel dépaysement !
Trouvé pour ma part une réconfortante sérénité en me délectant d’un formidable et inattendu Barbaresco de Gaja (1959 ?).
Bravo Grand Jacques !
Comme l’Arménie est notre pays invité cette année à Villa d’Este, tu auras des choses à dire 🙂
Grave question : le verre dans lequel tu sers cette nouvelle cuvée : est-il digne de ce vin ? Me dis pas que c’était un gobelet !
Tss…
[…] an extraordinary wine and climbing adventure that saw Zufferey planting vines at 2,800 metres (see Perrin’s blog, a wonderful mix of wine, philosophy, travel, literature and […]