Avec les changements climatiques tous les bons vignerons bourguignons sont devenus plus observateurs, plus réactifs aux aléas climatiques, ce qui est une bonne chose après les années plus centrées sur l’œnologie interventionniste ! On a eu, en Bourgogne, un vent du sud-ouest toute l’année, source d’année très chaotique. Le vent du nord, meilleur régulateur du temps, ne s’est vraiment imposé que quelques jours vers le 20 septembre. Il a donc fallu que les vignerons soient sur le qui-vive tout au long du cycle végétatif et fructifère de la plante. L’hiver a été froid, avec une alternance d’humidité et de gelées. Beaucoup de bourgeons ont gelé. Heureusement, les bourgeons secondaires ont bien pris le relais, mais avec une promesse de récolte bien moindre. La fleur dut affronter une période d’alternance de fraîcheur et de chaleur, ce qui compliqua sa passation, qui occasionna de la coulure, mais surtout qui favorisa un bon millerandage si intéressant pour le pinot ! Du coup la vigne avait été mise en condition pour affronter un été inconstant ! Même la grosse pluie du 24 septembre a ainsi pu être acceptée plus facilement par la plante.
Une vendange à bonne maturité phénolique
On compte de 97 à 105 jours après la fin de la floraison pour fixer la date de début des vendanges. On pouvait donc commencer dès le 20 septembre en Côte de Nuits. Etienne Grivot commença le 23, mais recula la cueillette des raisins sur Fixin et Marsannay, vignobles plus tardifs. « Mon obsession, l’harmonie, l’équilibre. Avec un tel millésime 12 à 12° 2 étaient bien suffisants, d’autant plus que cela offrait de très bonnes acidités ! J’ai fait le tour de mes trois vignes indicatives : précoce, tardive et médiane. J’ai goûté les peaux, les pépins, les pulpes, et j’ai ainsi pu récolter l’ensemble de mes raisins à bonne maturité phénolique. »
Les pépins étaient moins mûrs qu’en 2009, mais plus mûrs qu’en 2008. Bernard Hervet qui est très sensible à la mesure des anthocyanes savait qu’il fallait commencer les vendanges dès le 20 septembre dans les parcelles les plus précoces, que ce soit du côté de Gevrey-Chambertin ou du côté de Vosne-Romanée et Nuits-Saint-Georges. Comme on perd de la qualité en récoltant au-delà de ce seuil de maturité idéal pour l’année, il est de ceux qui considèrent qu’il fallait aller vite cette année pour couper les raisins.
Des vins prometteurs
Arnaud Mortet était très confiant en cuverie avec de très bonnes acidités, des PH entre 3, 15 et 3, 25 et des degrés potentiels oscillant entre 12, 5 et 13, 5 °. « Le coup de froid pendant le temps de la floraison a eu un effet bénéfique sur les vignes du bas qui étaient peu chargées et qui sont arrivées à excellente maturité. J’ai d’excellents résultats également sur Fixin. Tous mes grands climats ont bien su s’adapter à l’année avec beaucoup de grumes millerandées gage de grande qualité. « En Champs » avait les raisins les plus mûrs et les plus belles acidités (5, 60) » Sentir les cuves était un grand plaisir, observer la belle couleur dès les débuts des fermentations également. On avait également de bonnes sensations en touchant les grumes.
En goûtant les premiers vins rouges, on a un excellent toucher de bouche, de l’opulence, de la générosité, et surtout déjà une exquise minéralité. « Ils ont de beaux parfums, une grande fraîcheur, on peut même les qualifier de joufflus », pouvait dire Etienne Grivot ! Les blancs offrent également un bon toucher de bouche, une belle fraîcheur, mais il est encore trop tôt pour apprécier leur minéralité.
« Qualité excellente, quantité très faible » pouvait me dire Sylain Pitiot, régisseur du Clos de Tart, avec son beau sourire ! De domaines en domaines l’heure est à l’optimisme, même s’il faudra attendre la fin des fermentations malolactiques pour se faire une véritable idée du millésime. Bien sûr, comme toujours, les meilleurs résultats seront chez ceux qui ont fait le travail qu’il fallait en vigne ! La tendance vers les pratiques biologiques et bio-dynamiques se confirme, car ce sont ces méthodes qui exigent les plus grandes qualités d’observation et d’intervention au bon moment.
Jacky Rigaux
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