Contrôlé positif (transfusion homologue) après le contre-la-montre individuel d’Albi qu’il a remporté le 21 juillet, Vinokourov quitte le Tour de France par la petite porte avec ses coéquipiers. Cette fois, l’affaire est sérieuse. On n’a sans doute pas fini d’entendre parler de dopage. Et dire que, cette année, le Tour voulait se refaire une forme de virginité… Aujourd’hui, c’est au tour de Cristian Moreni de Cofidis, contrôlé positif à la testostérone à l’issue de la 11e étape, d’être exclu du Tour séance tenante. Toute l’équipe Cofidis va sans doute suivre le même chemin que celle d’Astana. A qui le tour demain ? Rabobank peut-être ? L’attitude ambiguë du chicken suscite bien des doutes…
Je repense à ce pauvre Vino, sa montée vers Tignes, le 16 juillet, qui ressemblait à un chemin de croix, son visage muré, pathétique, sa douleur silencieuse, ses larmes de guerrier blessé. On deviendrait athée pour moins que ça… Heureusement que les managers existent : ils savent garder le contact avec les dieux. Le même jour, Marc Biver, le manager de Vinokourov, déclarait : «Nous avons limité les dégâts. Demain, vous allez rapidement comprendre que ''Vino'' a complètement récupéré. Il est très fort et a une force mentale incroyable. » C’est un visionnaire, Biver ! Quelques jours plus tard, l’étoile Vino s’est en effet remise à briller au firmament. On aurait pu brûler un cierge. D’ailleurs, certains n’hésitaient pas faire de gros titres sur la résurrection de Vinokourov… Qui, illuminé par cette grâce nouvelle, n’hésita pas, dans la foulée, à faire sa propre apologie auprès du journal l’Equipe : « J'inspire le respect. C'est une certitude. Nous, les sportifs de l'Est, nous ne sommes pas faits dans le même moule. Quand je vois certains jeunes sportifs français qui abandonnent pour quelques bobos, ça me fait rire.»
Aujourd’hui, c’est le grand déballage, le bal des lavandières, ponctué de cris d’orfraie. Plus jamais ça ! Ce sont les « vieux » et les étrangers qui se dopent. La jeune génération et les Français sont clean. Ceux qui croupissent dans les limbes du classement sans doute également. Voyez le discours de Jérôme Pineau des Bouygues Telecom : « la pourriture vient de 30-40 coureurs. »
Et si c’était ça la vérité ? Celle que personne n’ose formuler ouvertement, tant demeure vivace notre besoin de héros, tant la mythologie du dépassement de soi continue à encombrer nos esprits : la grande Boucle, telle qu’elle existe, avec ses contraintes physiques, son parcours, la parcimonie de ses jours de récupération (impossible de mettre davantage la caravane au repos, ça coûte trop cher et l’attention risquerait de retomber…) est une épreuve terrible, qui excède les capacités physiques normales, même celles de sportifs aguerris et préparés de longue date !
Ne serions-nous pas tous, rêvant d’un hypothétique tour propre, de fieffés hypocrites ou d’invétérés jocrisses, niant cette seule évidence : il est quasiment impossible, dans ces conditions, de figurer by fair means parmi les meilleurs après trois semaines d’une telle chevauchée…
Leave A Reply