Ce double anniversaire, fêté comme il se doit au château Mercier, a été précédé par une présentation à la presse et aux professionnels d’une verticale de Cornalin et de Syrah que j’ai eu le très grand plaisir d’animer. En attendant la verticale de Cornalin qui aura lieu au CAVE le 7 mai…
Petite Arvine 2001 Maurice Zufferey et Petite Arvine 2011 Denis Mercier
Deux Arvine pour se mettre en bouche. La première élancée, dansante, au nez d’agrumes, orientée sur la fraîcheur. La seconde, plus riche, dotée d’une belle dimension séveuse. « C’est une année pr précoce : on a commencé les vendanges le 26 août… » a rappelé Denis Mercier.
Maurice Zufferey et Denis Mercier. Derrière Denis, ses arrière grands-parents, qui ont fait bâtir le château Mercier.
Verticale de Cornalin du domaine Maurice Zufferey
Cornalin Viouc 2002, Maurice Zufferey
Pour cette verticale, nous avons choisi le Cornalin de Maurice Zufferey, « parce que il a montré la voie et a été mon maître pour ce cépage » déclare Denis. Il faut également rappeler que l’oncle de Maurice Zufferey, Charles Caloz, fut l’un des « sauveurs » du Rouge du Valais ou Cornalin, cépage qui, au début des années 70 était quasiment en voie de disparition.
Nez de fruits noirs, de cerise. Belle bouche, dense, articulée autour d’une très jolie trame. Finale stylée. C’est un vin sur la finesse avec une sorte de vivacité radieuse dans le fruit.
Cornalin Viouc 2003, Maurice Zufferey
Issu d’un millésime solaire, il en porte l’empreinte mais pas les stigmates. Très fruits noirs, baies des bois, il nous emmène vers les hauteurs avec ses notes de bruyère, d’airelle, de rhododendron qu’ a décrit Marie-Thérèe Chappaz présente à la dégustation. Corps ample et sphérique, mais sans aucune sensation de lourdeur.
Cornalin 1999, Maurice Zufferey
Il s’agit de la version cuve. Notes de garrigue, végétal noble, petits fruits rouges, touche de réglisse. Jolie bouche, ronde, souple, équilibrée. Le tanin a conservé une pointe de rusticité mais l’ensemble plaît par son caractère et sa sapidité.
Cornalin 2005, Maurice Zufferey
Encore une version cuve. Couleur sombre, d’une jeunesse insolente. Notes d’épices, de tabac, de fruits noirs, de terre mouillée. Superbe corps, ample, complexe, et finale séveuse. Grand vin. A noter que certains dégustateurs présents ont préféré le style « naturel » du Cornalin au Viouc élevé en fûts.
Cornalin Viouc 2007
Pour une « année abominable » (dixit Denis Mercier), il s’en sort avec les honneurs. L’élevage est encore présent. Equilibré et fin, il s’articule autour d’un tanin un peu resserré mais la finale est expressive et d’une belle persistance.
Cornalin Viouc 2008
Sur la griotte, la cerise, le nez est superbe, même s’il est encore un peu sur la réserve. C’est un vin d’un très grand classicisme, élégant, presque bourguignon dans son style. Très belle persistance finale.
Cornalin Viouc 2009
C’est un coureur de fond. Encore très jeune dans son approche. Nez sur la mûre, la myrtille, les fruits noirs, le floral. Corps dense, parfaitement structuré, aux tanins juteux et frais. Superbe vin !
Une partie des dégustateurs
La verticale de Syrah du domaine Mercier
Syrah 1995 Pradec, Denis Mercier
Très beau profil aromatique, lardé, fruits noirs, goudron, note mentholée. Ce vin est issu d’un millésime charnière, « une année extraordinaire du point de vue viticole que la plupart des viticulteurs n’ont pas su appréhender » rappelle Denis Mercier. Et il ajoute : « on a un peu loupé ce millésime, car ne maîtrisait pas bien la réduction sur la syrah. On cuvait dans des cuvées inox très hautes, j’avais l’impression qu’on goudronnait la cave. »
Il ne faut jamais désespérer ou sombrer dans la pessimisme : dix-huit plus tard, le vin étonne par sa fougue et son aromatique baroque, un peu sauvage et son corps magnifique.
Syrah 1998 Pradec, Denis Mercier
C’est un millésime plus classique. Très joli profil aromatique, même si l’élevage, assez vanillé, ressort un peu. Par rapport au fastueux 1995, il offre un versant plus réservé, plus classique, d’une très belle facture avec des tanins très bien travaillés. Une grande bouteille également.
Syrah 2000, Anne-Catherine et Denis Mercier.
Changement d’étiquette avec ce millésime. Jusqu’en 1999, le vin porte la mention Syrah Pradec ainsi que « élevé en barrique ». A partir du millésime 2000, le nom d’Anne-Catherine appraraît sur l’étiquette.
Très belle robe soutenue. Nez magnifique, complexe, nuances de graphite, coulis de fruits noirs. Le corps est au diapason, dense, séveux, avec une impression de verticalité.. Grande bouche, articulée sur la fraîcheur, très belle trame.
Syrah 2005, Anne-Catherine et Denis Mercier
Vin plus sphérique que le précédent, plus suave. Magnifique texture d’une noble consistance. Un vin très sensuel. Style sans doute un peu plus « international » ou exotique. Une dégustatrice note que ce vin lui rappelle les « notes de café et d’épices » que l’on trouve sur certaines syrah de Nouveau Monde.
Syrah 2008, Anne-Catherine et Denis Mercier
Grand nez, profond, complexe. Sur les épices, la cendre chaude, la violette. On retrouve ici le style du millésime que l’on avait sur le Viouc de la même année, dynamique et racé.
Quelques blancs pour suivre…
Petite Arvine 2000, Anne-Catherine et Denis Mercier
Très jolie bouteille, au corps ample, généreux. Les arômes d’évolution sont intéressants, même si assez discrets et qui ont décontenancé certains dégustateurs qui ne retrouvaient pas le caractère variétal du cépage. Lors de la préparation de cette dégustation, Denis Mercier avait lâché ceci : » on est toujours étonné par ces arvines âgées, ce sont des vins plus surprenants que décevants. » Ce fin fut l’occasion d’un embryon de débat sur la capacité de la petite arvine à se bonifier avec le temps.
Petite Arvine 2009, Maurice Zufferey
On retrouve ici toutes les caractéristiques qui font la gloire de la petite Arvine. Notes florales et hespéridées. Silhouette élancée, tonique et finale d’une grande tenue qui laisse une empreinte saline. Remarquable.
Chardonnay Les Glariers 2000, Maurice Zufferey
Le première cuvée « Les Glariers » date de 1989. Maurice Zufferey rappelle que c’est après un voyage en Bourgogne et une visite au domaine des Comtes Lafon à Meursault qu’il a eu l’idée de vinifier et d’élever une partie de son chardonnay en fûts. Notes légèrement beurrées, grasses, avec un côté verveine, citron. Corps souple, à la texture onctueuse.
Chardonnay Les Glariers 2009, Maurice Zufferey
Très belle intégration du bois. Jolie structure, souple. Ensemble bien articulé et très jolie finale.
Pinot Gris 1998, Denis Mercier
« Il faut être un peu masochiste pour faire du pinot gris en Valais » affirme Denis Mercier dont le 1998 est l’avant-dernier millésime produit. Malgré cette dénégation, ce vin est une très belle réussite. Nez fin, expressif, notes de nougatine, de poire, de cannelle qui se distingue, au palais, par sa droiture et sa magnifique tenue.
Pinot Gris 1991, Cuvée Rimbaud (élaborée avec Jacques Perrin), Maurice Zufferey
C’est le vin le plus « âgé » de la dégustation. Cette cuvée Rimbaud n’a été produite qu’à une seule reprise, en hommage au « voleur de feu » Une vendange de Pinot gris récolté à mi-octobre. Vinifiée et élevée en fûts neufs, cette cuvée affiche une exubérance aromatique qui l’apparente presque à un liquoreux. La bouche est « sèche » pourtant, articulée sur un corps imposant, dont l’équilibre et la complexité ont impressionné les dégustateurs présents, à commencer par Marie-Thérèse Chappaz. Dommage qu’il n’y en ait plus que quelques bouteilles en circulation car ce vin blanc sec arrivée à son optimum prouve, si nécessaire, la capacité du vignoble valaisan à naissance également de grands vins blancs de garde.
Marsanne 2007, Anne-Catherine et Denis Mercier
Un autre très grand vin blanc sec, superbement texturé, ample, séveux, aux arômes complexe de miel d’acacia, d’abricot. Denis Mercier rappelle que ce vin a fait sa malo durant l’été 2008 alors qu’il était en élevage et, ajoute-t-il, « même si à ce moment-là on est davantage dans les vignes qu’à la cave, j’étais extrêmement vexé de ce fait… »
Les robes des liquoreux de la dernière série
Petite Arvine 1997, Pradec, Denis Mercier (vendangé le 2 décembre, 140 Oe)
C’est le premier liquoreux de la propriété, pas encore un « grain noble » selon les canons de la Charte, « c’était un divertissement, on va dire ça ainsi… » précise Denis. Il a pourtant toutes les raisons d’être fier de ce vin dont Marie-Thérèse Chappaz a fait l’éloge. Superbe finesse d’expression, équilibre aérien : c’est un liquoreux très subtil dont la finale, cristalline, sur les agrumes, nous emporte dans des régions du goût très élevées.
Ermitage 1997 Pradec, Denis Mercier (vendangé le 2 décembre, 140 Oe)
On admire la belle robe ambrée et le nez, splendide, noblement truffé vous envoûte d’emblée. Corps magnifique à la fin de bouche très pure. « C’est la première année où l’on a fait un grand vin doux… je ne sais pas si c’est grand, on va dire que c’est un vin avec une grande douceur… » affirme Denis Mercier qui rappelle en passant qu’il est plus difficile – micro-climat oblige – de produire un grand liquoreux dans la région de Sierre qu’à Fully car le botrytis est rare.
Malvoisie La Perrache 2001, Maurice Zufferey
Notes de fruits exotiques, de nougatine, de crème brûlée, de thé, de malt : le nez est superbe ! Corps médulleux, ample, avec une trame de fraîcheur qui l’aide à intégrer sa sucrosité encore présente. Mais, comme le remarque une dégustatrice « je supporte facilement ce côté plus chaleureux parce que ce vin nous fait voyager avec son côté malté, presque tourbé. »
Ermitage 2001 Pradec, Anne-Catherine et Denis Mercier (vendangé à la mi-janvier, 178 Oe)
On termine cette dégustation en apothéose avec cet Ermitage qui associe les fruits exotiques et la truffe et développe un rôti superbe. La perfection, rien d’autre !
Tous les vins de la dégustation du matin
Ce n’est pas banal de fêter un double anniversaire, trente ans plus tard, de regarder de concert le chemin parcouru, de sonder les verres, de se pencher sur l’énigme du vin. On l’oublie parfois, en cette époque de haute technicité et de maîtrise, il y a un mystère dans le vin, une alchimie particulière, la seule véritable peut-être : la transmutation des éléments (la terre, le ciel, l’eau et le feu du temps) en rêves liquides, en or de la vie.
L'après-midi, la dégustation s'est poursuivie avec de nombreux invités, amis et viticulteurs. Plus d'une centaine de vins en dégustation !
Nicolas Zufferey et Claudy Clavien en compagnie de Maurice Zufferey, un bel anniversaire !
5 Comments
Merci pour ces pistes, Jacques !
Il y a en effet beaucoup de très belles expressions originales en Suisse.
Une intéressante vidéo qui fait la synthèse de cette dégustation ou quand Bordeaux découvre le Valais…
http://www.youtube.com/watch?v=l...
Un autre compte rendu de la dégustation sur le blog de Paul Vetter :
valaisduvin.com/2013/02/1…
Heureux les aimés et les aimants et ceux qui peuvent se passer de l’amour.
Heureux les heureux.
Jorge Luis Borges
vous lisez le dernier Yasmina Reza?
La traduction en anglais de cet article est sur Webflakes of course ! http://www.webflakes.com/wine/a-...