On the road

En remontant la vallée perdue.

Posté le 13 juillet 2008
Les Walser appliquent à la lettre le droit d’aînesse propre à la juridiction féodale. Il permet d’éviter le morcellement des propriétés et de préserver les fiefs durement conquis. Il contraint les autres à chercher sans cesse de nouvelles terres à coloniser. Par petits groupes, nomades contraints et ingénieux, les Walser (devenus dans l’intervalle les Walliser) se disséminent dans de nombreuses vallées. Dès la fin du Xe siècle, on trouve ainsi des colonies Walser dans les Grisons (Vals, Klosters,…), dans l’Oberland, dans le canton d’Uri, au Tessin (Bosco Gurin) et, surtout, dans le nord de l’Italie (vallée d’Ossola, Valsesia, Val di Vedro, Valle Anzasca, Val di Gressonne)

De leur origine commune, ils ont en commun leur dialecte (le Titsch et le Toitschu), proche du Hochdeutsch, un style architectural caractéristique, ainsi qu’une opiniâtreté hors du commun.

Seul le petit « âge glaciaire » qui, dès le milieu du XVIe siècle, se traduit par un sérieux refroidissement climatique étalé sur trois siècles, va freiner considérablement « l’expansion » des Walser.  

 
Au-dessus de S. Gottardo : est-ce la Vallée perdue ?
Coupés de leurs terres d’origines en raison du caractère impraticable de certains cols qu’ils avaient l’habitude d’emprunter, la diaspora des Walser va contribuer à créer la légende la Vallée Perdue (Das Verlorne Thal), une sorte d’Eden situé, côté Italie, sur l’envers du Mt-Rose.

Difficile de situer exactement cette vallée de légende (sans doute du côté de Gressoney-la-Trinité). Peut-être se trouve-t-elle dans le mystérieux Valsesia, au nord de Varallo ?

Je caressais depuis longtemps le projet de découvrir cet endroit mystérieux, miraculeusement préservé, à l’écart des circuits touristiques. Surtout dès qu’on a dépassé la très belle cité de Varallo, dominée par le Sacro Monte où Nietzsche échangea plus qu’un regard avec l’altière et frémissante Lou Andrea Salomé. Du moins le crut-il…

Le vraie frontière, le passage vers la terra incognita des Walser se trouve à l’orée d’une série de hameaux accrochés aux forêts de feuillus, ponctuées par des collines en formes de dômes, des reliefs karstiques qui évoquent irrésistiblement la région de Guilin en Chine. On entre en effet en pays Walser en traversant un petit pont « gardé » par l’oratorio de la Madonna del Rumore, exactement à l’endroit où se rejoignent les eaux tourbillonnantes de l’Henderwasser du Landwasser. Quel beau nom, Notre-Dame de la rumeur !
 
Maison walser typique à Rund.
 
Plus haut, la route se perd dans un maillage de châtaigniers, de chênes et de hêtres. Terminus ! On continue à pied. Pour découvrir cette merveille, le village de S. Gottardo, ou Rund, à l’altitude 1329 m. Un village hors du temps, préservé, avec ses maisons aux toits de quartzites, ses murs décorés de fresques, ses greniers à céréale, ses balcons à claies, ses ruelles étroites et pentues.
 
 
 
Plus haut, c’est l’alpage avec des colonies de mayens égrenées sur les hauteurs. Une petite montée d’une demi-heure. Nous croisons un vieil homme volubile en train de bêcher son jardin, insoucieux du temps qui se couvre et voici un autre chef-d’œuvre, un oratoire (1822) avec une fresque dans un magnifique état de conservation. C’est ici le pays des oratoires, des sources et des cascades infinies
 
Aucune âme qui vive alentours.
Rien que le silence et les maisons de pierre indifférentes au temps qui passe. L’orage éclate et le paysage se pare d’une camaïeu de verts vibrants.
La vallée paradisiaque est certainement tout près d'ici…
 
La localisation géographique 
 
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Auteur
Jacques Perrin De mon passé de philosophe, j’ai hérité cette intuition que sapientia et saveur partagent la même origine. Des livres et des rencontres qui m’ont aidé à devenir ce que je suis, je garde tout : le sillage patient de la durée, l’inattendu et le meilleur. « Un rêve sans étoiles est un rêve oublié » Nos étoiles sont filantes et nos mémoires sont labiles. Du monde du vin et de la gastronomie, j’aimerais raconter les instants, les nuances subtiles et le bonheur dansant qui s’empare de nous quand nous rencontrons une forme de perfection. Il n’est pas nécessaire de publier un journal extime pour exister. Ce blog n’est pas un blog spécialisé pour wine geeks. Il est d’abord un lieu d’échanges, une série de passerelles, un réseau ouvert. Bienvenue sur les Mille Plateaux !

5 Comments


Valais_006
14 juillet 2008 at 23 h 12 min
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Ce reportage est absolument superbe (ainsi que les photos pourtant comprimées).
Merci Jacques.

Impossible par contre de retrouver la commune de San Gottardo ou Rund en fouinant sur le site http://www.valsesia.com.

Ne s’agirait-il pas plutôt de Rima S. Guiseppe ?

Cordialement,
Laurent


Jacques perrin
15 juillet 2008 at 18 h 17 min
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Merci Laurent pour votre feed-back. Le village s’appelle bien S. Gottardo ou Rund en dialecte walser. Il s’agit du dernier village accessible par la route (et encore !) après la série de hameaux qui forment Rimella. A découvrir absolument !


Cesco
2 mai 2009 at 22 h 56 min
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A Varallo, le Sacro Monte est saisissant ! Ici, des photos de la totalité des chapelles du Sacro Monte : http://www.villemagne.net/site_f...

En particulier, la somptueuse chapelle de l’Ecce Homo : http://www.villemagne.net/site_f...


Jacques Perrin
2 mai 2009 at 23 h 52 min
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Je regrette de n’avoir pas eu le temps de visiter ces chapelles, Cesco. Notamment l’extraordinaire chapelle de l’Ecce Homo. Merci pour le renseignement. Cela dit, le raccourci de l’histoire est saisissant. C’est sur le Sacro Monte que Nietzsche crut échanger un baiser avec Lou Andrea Salomé et, qui sait, l’idée de Ecce Homo jaillit également ici ? Il faudrait vérifier les dates. A vérifier.


Robert Dago
3 décembre 2013 at 19 h 15 min
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Je suis vraiment heureux de voir qu’un français se soit intéressé à cette vallée car ma famille en est originaire. Jusqu’à pré2sent,les différents sites étaient soit en italien soit en allemand.Je parle un peu les deux ,mais c’est quand même plus simple en français.C’est vrai qu’elle est belle notre vallée.Merci à vous pour les photos

Fraize le 3 décembre 2013


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