Ce lieu porte un nom : le Val Ferret. Ou plutôt, les Vals Ferret : l’italien, lové dans une vallée latérale du Mont-Banc ; le suisse, caché au fond de la commune d’Orsières, en Valais. J’ai parcouru ce dernier à plusieurs reprises, ainsi qu’en témoignent plusieurs post de ce blog.
En revanche, étrangement, je n’avais encore jamais mis les pieds dans le Val Ferret italien, séparé du précédent par le Grand Col Ferret (et aussi le Petit Col Ferret) que l’on ne franchit qu’à pied. Comme il se doit…
Je vous promets pour bientôt un reportage complet sur cette traversée. En attendant, voici, pour prendre la température des lieux, une adresse comme en rêve, un refuge de montagne, que depuis Arpnouvaz on atteint au prix d’un minime effort (eh oui, même les adeptes de la lévitation en rocking chair, les traders qui ne jurent que par le saut à l’élastique ou les podagres POURRONT le faire !).
Le grand Walter Bonatti est passé souvent dans le secteur : c'est ici qu'arrivent tous ceux qui redescendent des Grandes Jorasses, après avoir vaincu la Face nord…
Franchement, comme dit Far Away Eyes qui m’accompagne, ça vaut le coup : marcher une méchante heure parmi des pâturages encombrés de ruminants débonnaires, traverser des torrents mugissant, sous l’ombre presque écrasante d’une série de sommets qui, moi, me font aigrette au bout des doigts !
Comme quoi ? Et bien dans l’ordre, vous avez au loin la grande dorsale de la Noire de Peuterey, les grands piliers de l’envers du Mt-Blanc. Et, juste en face de vous, un peu plus tard, les Grandes Jorasses, la déclinaison des « Aiguilles » ( Leschaux, Talèfre, Triolet) jusqu’à la montagne triadique, le Mont Dolent, à cheval sur trois pays. Et voici qu’on débouche tout à coup sur une belle terrasse, face au glacier du Pré-de-Bar et au Triolet : nous sommes arrivés au refuge Elena…
Un vrai refuge à l’italienne, un petit hôtel d’altitude plutôt, avec son atmosphère de ruche survoltée, sa machine à café qui chuinte, son grand réfectoire, son public expansif. Et puis cette carte des mets et des vins ! Des Antipasto avec Salame felini, salamino di cinghiale e cervo, lardo con castagne, des Pizzocheri alla Elena ou la Polenta alla Valdostana que, selon la grande tradition des solides montagnards d’autrefois, vous arroserez d’un vin local, un Torrette par exemple ou d’une Barbera piémontaise, belle comme une ondée un soir d'été. « Frescura, stupore, tesori celati » nous explique-t-on sur la contre-étiquette ! ça sent à plein nez les embruns d’une agence de com’, oui, mais c’est d’un tonique, d’un vivant, d’une expressivité telle qu’on a éclusé doucement la bouteille comme des princes, sans mélancolie, même si le glacier juste en face a perdu 120 mètres depuis 1989 !
Et si, après cela, vous calez au démarrage, passez la nuit ici, vous pouvez ! D’autant qu’il y a plein d’autres belles promesses à la carte (Parusso, Felsina, Brunello de Camigliano) mais réservez !
Le vin Barbera d’Alba 2008, Conterno-Fantino
Le refuge Elena Tél. (0165) 844.688 ou (0165) 861.127
Comment y aller :
Depuis La Fouly par le Grand Col Ferret (compter 3.30 environ)
Depuis Courmayeur prendre la route du Val Ferret, direction La Palud, Planpincieux, jusqu’au terminus, Arpnouvaz (si jamais, il existe un service de bus depuis Courmayeur).
Depuis Courmayeur prendre la route du Val Ferret, direction La Palud, Planpincieux, jusqu’au terminus, Arpnouvaz (si jamais, il existe un service de bus depuis Courmayeur).
5 Comments
Bonatti : il vit toujours dans cette région ?
Pas trop de monde dans le refuge ?
Une heure de marche pour toi = 2 heures mini pour les cardiaques-fumeurs-buveurs,sopra 60 anni ?
Noire de Peuterey ! Quelle histoire !
Si tu es encore dans les parages, Jacques, pousse jusqu’au refuge Dalmazzi. Là, tu es déjà en haute montagne, dans un vrai nid d’aigle. Et, je ne parle pas de la vue qui s’offrira à toi!
Je crois que Bonatti habite du côté de Bergame. Il n’a fait que passer ici. Comme nous. Comme les songes que nous emportons.
Michel, j’ai, pour cette première prise de contact, choisi la version sybarite, père-peinard mais Dalmazzi est au programme. Avec toi, peut-être ?
Pour ceux qui hésiteraient encore, le Val Ferret ne se regarde pas sous un seul angle. On en admire les sommets mais on n’oublie pas de regarder où on met ses petons ! C’est un vrai nid à girolles.
Magnifique région, dommage toutefois pour les illustrations (faible qualité des photos)