L'ivresse du virtuel
Et la valse continue…
Un coup, tu perds, un coup tu gagnes. L’essentiel, c’est de gagner beaucoup plus que tu ne perds ; si tu joues à découvert, à toi d’avoir les nerfs, de masquer tes positions. Poker. Frissons toujours. Ivresse de l’infini.
Narration. Les mots fluides. Les chiffres qui s’enchaînent. Peu d’émotion apparente. Calme. Imperturbable. Kerviel. On l'imagine. Seul le résultat final compte.
Narration. Les mots fluides. Les chiffres qui s’enchaînent. Peu d’émotion apparente. Calme. Imperturbable. Kerviel. On l'imagine. Seul le résultat final compte.
Février 2007, turbulence boursières en Asie. L’inspiration était au rendez-vous. Re-bingo : 28 millions d’euros.
Trois mois plus tard, début de la crise des subprimes, Jérôme Kerviel l’a anticipée. Kerviel cartonne à 500 millions d’euros !
La flèche est lancée.
«Au 31 décembre 2007, mon matelas est monté à 1,4 milliard d'euros toujours pas déclarés à la banque. A ce stade, je suis dépassé par l'événement et ne sais comment le présenter à la banque, cela représente un cash non déclaré de 1,4 milliard d'euros, or personne n'a jamais réalisé ce chiffre qui représente 50 % du total du résultat de la branche action indices de la Société générale. » (cité par Le Monde à partir d’un procès-verbal d’interrogatoire).
La flèche est lancée.
«Au 31 décembre 2007, mon matelas est monté à 1,4 milliard d'euros toujours pas déclarés à la banque. A ce stade, je suis dépassé par l'événement et ne sais comment le présenter à la banque, cela représente un cash non déclaré de 1,4 milliard d'euros, or personne n'a jamais réalisé ce chiffre qui représente 50 % du total du résultat de la branche action indices de la Société générale. » (cité par Le Monde à partir d’un procès-verbal d’interrogatoire).
La suite, on la connaît. On aimerait la comprendre…
Le 18 janvier, une anomalie est signalée par un contrôleur. Enquête. Interrogatoire à l’interne de Jérome Kerviel. On découvre le montage, les milliers de transactions-écrans destinées à camoufler les engagements pris par Jérôme Kerviel. Au total 48 milliards d’euros. Un vrai Cheval de Troie au cœur du système. De quoi dynamiter la Générale sur laquelle la BNP peut désormais lorgner avec gourmandise !
La cellule de crise décide de liquider les positions du Jérôme Kerviel, de couper un bras pour ne pas perdre la guerre. A ce moment-là, le 21 janvier, le prix à payer par la Société générale pour rapatrier les 48 milliards d’engagements est d’environ 1.5 milliards d’euros.
Mauvais timing. Les Bourses plongent à ce moment-là. A l’arrivée, la perte sera plus de trois fois supérieure, 4.9 milliards d’euros. Un montant qui donne le tournis et qui ébranle sérieusement la Société Générale, le deuxième établissement bancaire français !
La victime expiatoire
Le coupable est tout trouvé. Les dirigeants montent au créneau, chargent au maximum Jérôme Kerviel qu’ils qualifient tour à tour de "pervers", d’ "escroc" ou de "terroriste" ! Un remake du 11 septembre ? On croit rêver !
De nombreux observateurs autorisés l’ont déjà souligné : difficile de croire que les supérieurs de M. Kerviel n’aient pas eu vent de ses performances, ne lui aient pas fait miroiter un bonus record s’il persévérait dans cette bonne fortune ; difficile également de penser que Jérôme Kerviel puisse, à lui seul, être tenu pour responsable d’une telle débâcle !
Depuis le début de la crise on a vu les dirigeants de la Société Générale osciller entre l’angélisme et le cynisme. Lorsque Daniel Bouton, le grand directeur, déclare aux actionnaires : "Il était de mon devoir de présenter ma démission au Conseil. Celui-ci l’a refusée et m’a demandé de rester à la tête de l’entreprise dans ces circonstances exceptionnelles, pour poursuivre la stratégie qui nous a si bien réussi." (sic !), il tente de les mener en bateau et relaie parfaitement cette ambivalence et ce malaise qui vont bien au-delà du désastre financier !
Depuis le début de la crise on a vu les dirigeants de la Société Générale osciller entre l’angélisme et le cynisme. Lorsque Daniel Bouton, le grand directeur, déclare aux actionnaires : "Il était de mon devoir de présenter ma démission au Conseil. Celui-ci l’a refusée et m’a demandé de rester à la tête de l’entreprise dans ces circonstances exceptionnelles, pour poursuivre la stratégie qui nous a si bien réussi." (sic !), il tente de les mener en bateau et relaie parfaitement cette ambivalence et ce malaise qui vont bien au-delà du désastre financier !
Heureusement que, pour nous sauver du doute, demeure la pub, lénifiante, immaculée ! Sur le site de la Société Générale, on peut toujours lire ceci :
Vous et vos enfants
Découvrez l'offre qui va les faire grandir !
Parce qu’il n’est jamais trop tôt pour apprendre à faire fructifier ses économies et à gérer son budget, la Société Générale a conçu des offres adaptées à chaque âge.
Quasiment du Freud appliqué à la finance ! Mais que voulait dire ce dernier quand il parlait de narcissisme primaire et secondaire ?
3 Comments
On notera surtout cette spécificité française de la classe dirigeante qui, dans de telles circonstances, a un comportement absolument unique au monde : on reste !
Normal. Les dirigeants français sortent des grandes Ecoles. Ils ont été nourri à la mythologie du Titanic. Le capitaine ne quitte pas le navire lorsque celui-ci est en train de couler… Ou, du moins, uniquement après avoir négocié une place dans le meilleur radeau pneumatique.
polytechnique aggravé par l’ENA faut pas oublier que ça peut vous donner soit ATTALI ou BOUTON c’est à dire un animal à sang froid inaccessible au doute!