L’autre Stones, brother des glimmer twins, l’âme noire des Stones, le boss caché, c’est Keith Richards, revenu de tout, même des enfers, dit-on, visage et bras parcheminés d’un saurien, yeux de jais, riffs rageurs, dégaine de pirate vaguement malsain, sculpté par des années de dérive, debout par le secours de l'énergie du rock, et du plaisir d’être là, éternellement, sur l’avant-scène d’un paradis pas plus artificiel qu’un autre.
Ronnie Wood, déjà évoqué, pièce rapportée des Stones, arrivé en 1974, pour prendre la place béante du génie, du dissident, du traître, Mick Taylor. Arrivé chez les Stones, comme un vieux copain, Woody, après que les Stones eurent auditionné la terre entière (dont Clapton !) et qui n’en repartira plus. Un Stones rapporté.
Alors Charlie Watts ? Un Stones à part entière ? Sa présence discrète en dit long en tout cas sur la complexité de ce groupe :
Marty Scorsese s’est perdu en conjectures, des jours durant, sur la setlist des chansons que joueraient les Stones.
I was born in a cross-fire hurricane
And I howled at my ma in the driving rain,
But it's all right now, in fact, it's a gas!
Quelques riffs hargneux de Keith, poisseux comme on les aime : c’est ça, une évidence ! le son des Stones, la magie au rendez-vous et c’est parti pour la visite d’un répertoire foisonnant (plus de 40 ans à faire des pizzicato, ça laisse des traces sonores).
And reefer when I wanna get high
Un concert des Stones, c’est comme une machine à remonter le temps. D’ailleurs, ils sont un peu là pour ça, les Stones, pour nous faire croire que le temps est cyclique, que l’immense pulsation du rock toujours nous ramènera sur la crête acérée de cette intensité. C’est là-dessus, sur ce fantasme, le secret de l’éternelle jeunesse, que Jagger et ses acolytes, Narcisse malgré eux, ont construit leur légende.
Dans la foulée, voici la setlist (à laquelle il faut ajouter Jumpin' et Champagne and Reefer), qui hantera longtemps les nuits de Marty Sorses et celles de Bill :
Shattered (tirée de Some Girls 1978).
She Was Hot (Undercover, 1983)
Who wants to brave the pouring rain
For a glass of French champagne?
Well grab a cab, grab a cap and baby, come right by
All Down The Line (tirée du superbe Exile on Main Street, 1972, l’album de la rédemption) :
Loving Cup (Toujours Exile… 1972), avec, en invité Jack White, des White Stripes.
Give me little drink from your loving cup.
Just one drink and Ill fall down drunk.
As Tears Go By (c’était la face B de 19th Nervous Breakdown 1964).
Aïe l’intro désaccordée de Keith à la guirare acoustique !
Les Stones ne l’avaient jamais, dit-on dans le film, chantée en public. Faux.
7 Comments
Qu’aurait écrit le Grand Jacques s’il eut été aussi enthousiaste du temps de Bach, Mozart ou Wagner ?
Probablement des textes qui susciteraient des frayeurs aux élèves à qui on les proposerait en dictée !
Ai-je le droit de préférer – de loin – les Floyds ?
Pas trop de frayeurs, quelques interrogations, beaucoup de passions ! Cela dit, il faut aller voir ce film : c’est un grand moment de l’histoire du rock. Quant aux "flamants roses" qui, cher François, ont tes faveurs, c’est un grand groupe. Hélas, ils n’ont pas aussi bien "vieilli" que les Stones…
J’ai adoré ce film ! Quelle pêche d’enfer ! Comment font-ils : ont-il signé un pacte avec des forces obscures (sympathy for…) ou, alors, ils continuent à sniffer autre chose que les champs de luzerne. Heureusement que les contrôles anti-dopage n’ont pas cours dans la milieu du rock !
Etonnant comme on semble accepter la drogue pour les poètes, les Stones et autres musicaux et se drapper dans l’indignation quand il s’agit de sportifs ou des enfants… des autres !
Ou est-ce une notion très élastique de l’indulgence ?
Oui, mais le rock pratiqué à ce niveau-là et pendant plus de 40 ans, c’est un sport beaucoup plus dur que tous les autres, d’autant plus qu’il faut encore assurer après le spectacle : Shi was hot, yeah !
Nous avons semble-t-il quelques centres d’intérêt en commun. Le vin bien sûr, mais aussi le Japon (j’y suis déjà allé deux fois et j’y retourne trois semaines cet été en vacances avec ma femme et mes deux enfants) et surtout "The Greatest Rock & Roll Band in The World", The Rolling Stones. Mon groupe fétiche depuis mon adolescence et leurs tout premiers titres (It’s all over now, Around and Around, Time is on my Side, etc, etc), jusqu’au dernier album (pas le pire en fait…). Et le film est superbe, une vraie plongée au coeur du groupe en concert. Fantastique ! Qu’est ce que j’aurais aimé être avec vous pour partager ce Mouton-Rothschild 1937 avec ce vieux pirate de Keith ! Et pourtant je ne suis pas un grand fan de Bordeaux ;o))
Philippe BARRET (Le Rouge & Le Blanc)
Belle enseigne Mr.Barret http://www.youtube.com/watch?v=G...