Caramba, encore raté ! La fête du cochon a déjà eu lieu, samedi dernier, dans la cour de Ferme, en l’accueillante Fenière de Lourmarin.
Si je cherche bien, je sens que je devrais trouver, tout près de chez moi, motif à bombance. Pardi, y’a pas que les pétoires autrichiennes et les grouse écossaises à mettre en exergue, par les temps qui courent !
Tenez Bernard Livron, à Certoux : il a bien dû se résoudre à occire le sien, de cochon, et a sans doute mitonné de quoi garnir une ou deux choucroutes ébouriffantes !
Au château de Villa, à Sierre, je sais que les gorets ont déjà déboulé sur les tables sous formes atriolantes, après avoir été à la fête estivale sur les hauts de Tannay ! A la Botza, à Vétroz, je prends les paris pour ceci. Au Pont de Brent, ce pourrait être cela.
Qu’il vienne d’Ormalingen ou d’Aïre, laineux ou cul noir, ibérique ou basque teigneux, qu’il vente ou qu’il fasse beau, le cochon, vieile canaille, mérite tous les égards. Absolument tous !
Vous pouvez continuer d’attendre Madeleine ou regarder Frida se mirer dans le couchant, la chanson demeure, le sainte-nitouche n’y prendra pas ombrage.
A ceux qui, un peu brutalement, vous lanceraient, histoire de rire, « tiens voilà du boudin ! », contentez-vous de les renvoyer au faramineux Boudin noir à la hure de porc tel que Alain Dutournier le décrit dans Ma Cuisine, véritable épopée culinaire, traversée par le souffle épique des vraies choses !
Pas que du sang, du caillé et du crémeux dans ce boudin-là mais de la substance, Boun Diou, Bound Diou, une exorde gustatif qui ne souffre aucune contestation. Une déclaration à hurler d'amour sous les lampions.
Le secret ? De la couenne confite, des pieds de porc, des « rougeurs de porc », un peu d’hématocrite pour faire bonne figure et une demi-intelligence de goret cuite au bouillon.
Pourquoi ne pas en faire un fromage ? A rétorqué l’autre qui, chaque fois qu’il entend le mot intelligence, sort son couteau…
Mon enchaînement sera tout trouvé. Il s’appelle Very goût de tripes, signé Jacky Durand. Ca vient de sortir aujourd’hui. C’est un peu long mais de telles lectures fortifient autant l’âme que les sens :
« Apache. Dans notre panthéon de la tripaille, il ne peut y avoir de célébration du mois de la tripe sans confection d’un fromage de tête. Il faut savoir que le fromage de tête n’est pas une recette, mais un monde parallèle. On y accède par un matin frileux où l’on s’est levé de bonne heure car la réalisation d’un tel monument réclame de la préparation. Faire un fromage de tête comme monter au braquage est affaire de préméditation. Mieux vaut vérifier ses outils et son timing si on ne veut pas finir au mitard des gâte-sauces.
(…) On peut ensuite s’en aller quérir une demi-tête de cochon. Si vous ne connaissez pas suffisamment votre louchebem, réserver à l’avance le butin, histoire de ne pas vous retrouver bredouille devant le billot. Il faut également se procurer un pied-de-veau et au passage, on s’achètera un beau morceau de hampe de bœuf à griller pour le repas de midi. On rentre chez soi avec une pointe de fierté car ce n’est pas tous les jours que l’on ramène un tel trophée. Pour un peu, on déballerait bien notre tête de cochon dans l’ascenseur pour voir l’effet produit sur celle du voisin du huitième étage qui promène une branche de céleri dans son filet à commissions. Mais il faut attaquer séance tenante le fromage de tête.
Ecumoire. On s’installe en bout de table et, muni de notre petit couteau pointu, on épluche 3 gros oignons, 3 carottes, 4 échalotes, et on effeuille une grosse touffe de persil plat. Il faut ensuite laver la tête de cochon sous le robinet d’eau froide avec autant de minutie qu’une toilette d’épousailles. On a bien mérité une gorgée du blanc du Jura que l’on vient de déboucher. On place la tête de porc dans le grand fait-tout avec le pied-de-veau, les oignons piqués de clous de girofle, les carottes, du thym, du laurier, du gros sel, du poivre, une pointe de noix de muscade, deux verres de vin blanc et on recouvre le tout d’eau froide. On monte doucement le chaudron en température en attendant les premiers murmures du fromage de tête dans son chaudron en ébullition. Il faut alors prendre l’écumoire pour retirer soigneusement les impuretés qui dansent à la surface du bouillon. Puis, on laisse le fromage de tête vivre doucement sa vie en mijotant trois grosses heures. Vous pouvez alors vous assoupir devant les Feux de l’amour ou vous plonger dans Eloge des voyages insensés de Vassili Golovanov. »
La suite, pardi, la suite ! C’est à déguster aujourd’hui dans Libération et je trouve que ce Jacky Durand a bien du talent. S’il cuisine comme il cause, l’affaire est entendue…
Et puis, n'oubliez comme, le 30 novembre, ce sera la finale du Championnat du Monde de Pâté en croûte, n'oubliez pas le Beaujolais ! L'Ancien 2009, le Beaujolais-Nouveau des Terres Dorées sera arrivé ! Et il est sacrément chavirant…
29 Comments
Du Crillon à Thoumieux : http://www.omnivore.fr/?p=3148#m...
Merci pour le lien. Heureusement que c’est bon ! J’entends d’ici :"Thoumieux peut faire mieux !" Déjà que le chef s’appelle Piège…
On peut se demander si la fiction ne dépasse pas, parfois, la réalité… Comment arrive-on à faire ça pour 10 euros ? Et l’hostie, elle est consacrée ?
"En revanche, on a bien croqué dans la pâte de pizza soufflée et thon cuit, tiède chaud : une boule de pâte grosse comme un oeuf d’autruche (à peu près…), friable comme une hostie (pour ceux qui connaissent) et enrobant d’une pellicule croquante le thon effectivement juste à point (pardon pour la WWF), boosté par des feuilles de riquette, une pulpe d’olive et de moelleuses tranches de burrata. Joyeusement régressif pour 10 petits euros."
Ah la burrata …
Thoumieux n’est pas Chartier, Jacques !
Ah la Burrata, effectivement, la nouvelle marotte du bobo parisien … qui la mange toujours trop tard, après l’injure du temps passé.
Y’a rien à faire, c’est une question de distance.
Paul,
J’en ai dégusté moi à Florence …
Bravo. J’applaudis … à moins de 10km du pis de la vache j’espere ? Sinon vous ratez la tendance "locavore" …
🙂
Laurent,
Chartier,la mythique brasserie parisienne?
Paul,
Locavore après un trajet de 1000 kms …
Pascal,
Oui, du côté des grands boulevards.
Un lieu à l’ambiance surannée qu’avait adoré une mienne amie carioca.
Chartier, j’y allais quand je travaillais à Libération, car, il est bien connu que:
"Libé entretien les mythes"
😉
Armand,
Dans un ballet croquignol, je te propose le céleri rémoulade à 2,5 euros, les tripes à la mode de Caen (justement) à 7,9 euros puis une compote de pommes à 2,2 euros.
On devrait bien trouver un pichet de beaujolpif pas cher pour faire passer tout cela.
A tout à l’heure, disons 12h30 ?
Laurent,
J’y suis allé une fois pour respirer l’ambiance mythique du lieu,m’éblouir de la prouesse et de la gestuelle des garçons serveurs avec leur long tablier noir.
Des endroits magiques,imprégnés d’histoire,et qui traversent le temps.
Vous avez bien de la chance d’y aller plus souvent que moi.Comme quoi si certains s’imaginent que je ne vibre que pour les tables étoilées!
Bon déjeuner en ce vendredi 13 et salutations gourmandes.
Où se retrouve ‘on?
Devant le Rex, Armand …
Bon, Pascal, nous blagons, là …
Je suis retenu sur Toulouse pour une verticale de Trévallon rouge ce soir et un énorme repas demain à Montauban (pour fêter notre victoire au championnat d’Europe de dégustation RVF) : 12 convives, 24 vins !
Il n’est pas jusqu’à Eddy qui n’ait ramené des papayes et des ananas de Douala (ma madeleine de Proust).
Je ferai moi un saut jusqu’à Albi, chez l’ami Michel Belin, chocolatier émérite.
Si vous voulez lire (un peu "gore") sur la tue-cochon : http://www.decitre.fr/livres/Car...
On va dire que le nom de l’auteur – le vrai est un dégustateur brillant – est un pseudo.
🙁
Armand,
Je n’ai malheureusement pas les moyens de sauter dans un avion au débotté …
Et puis ce n’est pas très écolo ! 🙂
Bon sinon, moi j’ai mangé du Jarret au vin à midi. Ca intéresse quelqu’un ? Non ? Normal …
Pour Thoumieux, à priori, il faudra faire sans moi ! Et je ne crois pas que la vision ci dessous enflamme Jacques.
foodintelligence.blogspot…
BEURK …
Paul,
Comment expliquer un tel revirement ?
Carne, avec un extrait : http://www.loubatieres.fr/ouvrag...
http://www.youtube.com/watch?v=W... ; http://www.gossipcraze.com/_mm/_...
Laurent, merci pour le filon. Intéressant. Voici un extrait de l’extrait.
Comme si nous y étions !
"Rependu, le corps est prêt à être ouvert. Barat se livre à une première ablation qui nous remplit à chaque fois d’admiration ; dans le rectum tailladé du porc, il enfouit son bras
jusqu’au coude, à la recherche de quelque mystérieuse glande « qui donne le mauvais goût ». Une fois la glande extirpée et jetée aux canards, l’abdomen est sabré. Une avalanche
de viscères brillants tombe avec un bruit d’eau battue dans la caissette en bois tenue à bout de bras par Rosine et ses filles. Elles s’empressent de repartir vers la maison avec ces trésors merdeux puissamment parfumés, belles formes douces, oves et serpents enlacés, porphyre, bleu pâle de princesse
morte (une des seules couleurs de mes livres d’enfant dont je crois me rappeler la nuance) et crème de lait.
On fend le thorax à la hachette et au marteau, les plaques de lard sont écartées. Barat décapite, Bébic sculptera la tête jusqu’à ce que le blanc de l’os domine le rouge vif des tissus déchirés ; ces petites viandes iront dans le bouillon du boudin
déjà frémissant, odorant d’herbes et de muscade.
Dix heures. Le corps pendu est enveloppé dans un suaire, la découpe reprendra demain matin à l’aube. On s’aperçoit enfin du froid, c’est l’heure de rentrer près de l’âtre, de
se réchauffer le corps : vin dru tiré du tonneau, pain de dix livres, boudin, saucisse et andouille sortis du buffet.
– Un beau cochon.
Pierre Cahen Claver
Paul, si c’est vrai, c’est une farce, de mauvais goût. Ou un piège à colverts…
…
Je ne sais pas si c’est vrai mais je crois Bruno Verjus homme de goût et de raison.
J’ai beaucoup moins confiance en toutes les Farfalles Parisiennes qui font la cour à "qui-mieux-mieux" et mangent plus avec leur tête qu’avec leur bouche.
Posture, posture, quand tu nous tiens …
http://www.slate.fr/story/13031/...
Moi, dans l’attente d’un bon geuleton, peu cher, je me marre … http://www.youtube.com/watch?v=2...
Pour Armand;
libé entretien les mythes! je trouve que cette maxime va très bien avec le tableau de Corpataux(on dirait des préservatifs usagés….)
amitiés
bertrand
😉
Insolite : http://www.youtube.com/watch?v=2...