Le big bang à toutes les sauces
L’ironie veut que la fameuse expression big bang – qui désigne par métonymie – l’origine de l’univers a été inventée par Fred Hoyle contestant précisément l’hypothèse de George Gamow selon laquelle l’univers aurait évolué à partir d’une phase très chaude et très dense il y a 13.7 milliards d’années.
L’ironie veut que la fameuse expression big bang – qui désigne par métonymie – l’origine de l’univers a été inventée par Fred Hoyle contestant précisément l’hypothèse de George Gamow selon laquelle l’univers aurait évolué à partir d’une phase très chaude et très dense il y a 13.7 milliards d’années.
L’expression, imagée, a fait bingo, car elle était censée être pédagogique, souligne Etienne Klein. On a posé des questions métaphysiques sur la création de l’univers. C’est un faux débat. Quand un magazine voit ses ventes baisser, il titre « Dieu et la science et cette question », même si elle est vaine, intéresse les gens.
Qu’est-ce que le big bang ?
Il y a 13.7 milliards d’années, rappelle Etienne Klein, l’univers était tout petit, extrêmement dense et extrêmement chaud. Une particule pouvait avoir dans cette phase autant d’énergie cinétique qu’un TGV lancé à toute allure.
Il y a 13.7 milliards d’années, rappelle Etienne Klein, l’univers était tout petit, extrêmement dense et extrêmement chaud. Une particule pouvait avoir dans cette phase autant d’énergie cinétique qu’un TGV lancé à toute allure.
C’est d’ailleurs, souligne Etienne Klein, ce que nous faisons avec au CERN avec le LHC (Large Hadron Collider ou accélérateur de particules).Le LHC reproduit l’énergie cinétique des conditions primordiales des débuts, mais ne remonte pas avant, là où les forces étaient encore plus impressionnantes.
Dans les premiers temps, pendant les 380 000 ans qui ont suivi le big bang, la densité des particules était telle que les photons ne pouvaient pas de propager directement. Puis est arrivé un moment suffisamment froid pour que des atomes (protons et neutrons) puissent se former et la lumière circuler. L’univers est en expansion et l’énergie de la lumière diminue.
Dans les années 30, poursuit notre conférencier, on a constaté que les galaxies s’éloignent les unes des autres. Si on repasse le film à l’envers et qu’on remonte le temps, elles se rapprochent et arrivent à un point géométrique, une « singularité initiale, sorte de situation théorique monstrueuse où certaines quantités, telles la températures ou la densité, deviennent infinies. »
C’est ainsi que le big bang, cette singularité initiale, en se vulgarisant est devenu improprement synonyme de naissance de l’univers ou de Fiat lux originaire !
Les modèles de big bang s’appuient sur la théorie de la théorie de la gravitation d’Einstein, une déformation de l’espace-temps, qu’on appelle la relativité générale.
Etienne Klein – photo Armand Borlant
Le problème, selon Etienne Klein, c’est que dans l’univers d’autres forces entrent en jeu en même temps que la théorie de la gravitation : il s’agit des interactions électromagnétiques, nucléaire faible et nucléaire forte, les trois forces de la physique quantique.
Et c’est ici que nous nous retrouvons au pied du mur – celui de Planck – qui correspond au moment en deçà duquel les quatre forces jouaient un rôle équivalent !
Comment s’en sortir ? Il faut donc construire, précise le conférencier, une théorie quantique de la gravitation. Ou comment tenter d’unifier la physique quantique (qui décrit le monde de l’infiniment petit) et la relativité générale (qui décrit le monde de l’infiniment grand)
Beaucoup de gens travaillent là-dessus, selon Etienne Klei, notamment ceux qui travaillent sur la théorie des cordes.
Pour l’instant, ajoute le physicien, ce sont des conjectures.
Beaucoup de gens travaillent là-dessus, selon Etienne Klei, notamment ceux qui travaillent sur la théorie des cordes.
Pour l’instant, ajoute le physicien, ce sont des conjectures.
La théorie des cordes
La théorie des cordes postule que les particules ne sont pas des objets physiques mais des cordes qui vibrent dans un espace-temps à n’ dimensions.
Cette théorie a une implication certaine : il existe une température maximale finie au-delà de laquelle l’univers n’a pas pu être.
Ce qui invalide le modèle de la théorie de la relativité générale qui postulait une température initiale infinie.
D’où des théories qui mettent en scène le pré-big bang où ce que nous appelons big bang n’est pas du tout la création de l’univers, mais la transition d’un univers extrêmement dense à un univers en expansion, une sorte de « pont quantique. »
D’où des théories qui mettent en scène le pré-big bang où ce que nous appelons big bang n’est pas du tout la création de l’univers, mais la transition d’un univers extrêmement dense à un univers en expansion, une sorte de « pont quantique. »
Ainsi, toujours selon Etienne Klein, chaque fois que l’on essaie de quantifier la gravitation, de réunir les quatre forces, l’instant zéro passe un sale quart d’heure.
Cela ne veut pas dire qu’il n’existe pas d’instant zéro, précise Etienne Klein, cela veut dire qu’ il échappe à la description de la physique et qu’en physique, il y a toujours eu de l’être.
Quand un scientifique dit qu’il a compris la genèse de quelque chose, c’est qu’il raconte la fin d’une histoire. L’origine, c’est une conclusion.
Et c’est ici, pour ne pas rester sur cette conclusion insatisfaisante pour la pensée, que la physique dialogue avec la métaphysique. Ça tombe bien : Etienne Klein chemine avec virtuosité sur la mince ligne d’étrave entre ces deux disciplines.
Et dire que nous n'avons pas encore parlé de votre fameux boson, cher monsieur Higgs !
Peter Higgs et son portrait – crédit: Callum Bennetts/Maverick Photo Agency
Qu’est-ce qu’on appelle l’origine de l’univers ?
Telle est la vraie formulation de la question selon Etienne Klein.
Est-ce le fait qu’il y a eu dans le passé une transition entre le néant et l’être ?
Penser le rien, ce n’est pas penser à rien.
Nous n’avons pas de preuve, dit-il, que l’univers a une origine autre que celle que je viens d’évoquer.
Par contre, nous avons la preuve qu’il y a 13.7 milliards il était très petit, très dense.
Imaginons qu’il ait une origine. Somme-nous capable de la raconter ? La réponse est non.
Est-ce le fait qu’il y a eu dans le passé une transition entre le néant et l’être ?
Penser le rien, ce n’est pas penser à rien.
Nous n’avons pas de preuve, dit-il, que l’univers a une origine autre que celle que je viens d’évoquer.
Par contre, nous avons la preuve qu’il y a 13.7 milliards il était très petit, très dense.
Imaginons qu’il ait une origine. Somme-nous capable de la raconter ? La réponse est non.
Le fait que l’univers soit présent tous les jours, c’est peut-être un miracle encore plus grand que le fait qu’il ait été créé.
Pour penser autrement l’origine, sortir de l’aporie rien-être, Etienne Klein, interroge la pensée chinoise accomplit un petit pas de côté conceptuel.
Se fondant sur les écrits de François Jullien (Les transformations silencieuse notamment), il montre comment dans la langue et la pensée chinoises, pensée « des processus, des phases, des évolutions continues, non des choses », la question de l’origine, telle que nous la posons, n’a pas cours.
« Quand nous parlons de l’origine, nous ne la disons pas et, ajoute-t-il, ma conclusion, c’est que quand on entend des physiciens dire : l’origine de l’univers c’est ceci ou cela, il y a du bluff".
Le livre Etienne Klein, Discours sur l’origine de l’univers, Flammarion
10 Comments
J’ai eu la chance de discuter avec l’éminent sinologue François Jullien suite à une de ses conférences auprès de mes collègues du CNES (dont des astrophysiciens).
Très intéressant ces signes culturels qui font que l’on ne dit pas oui ou non de la même manière d’une langue à l’autre, que l’on n’a pas la même conception du temps, de l’espace, de la qualité, de l’effort, du coût, … de la liberté d’expression, de la démocratie, du transfert de technologie, …
Ajoutez un hindou et vous serez servi !
🙂
Les Chinois (à supposer qu’ils soient réellement reliés par la même culture)doivent avoir une approche différente du terroir, par exemple.
Et je pense à ceux qui se ruent sur les dispendieux Bordeaux 2009 …
Par quels signes sont-ils donc mus ?
Cela me fait penser à la conclusion du cygne noir de Taleb….
Ce livre d’Etienne Klein est incontestablement, pour ceux qui s’intéressent à cette question de l’origine, une lecture fondamentale. La démonstration si précise et parfaitement argumentée que la notion de "big bang" serait le début de tout, est simplement remarquable. C’est à la fois relativement arride car scientifique, mais compréhensible si on lit avec attention.
Une des conclusions qu’on est en droit de tirer est bien que les cosmologies inventées par les diverses religions ne tiennent simplement plus la route, avec naturellement l’immense bémol qu’en aucun cas, la science ne pourra intervenir sur la notion de "foi" qui restera à jamais un sentiment personnel ne requérrant aucune explication.
On devra aussi attendre d’autres ouvrages qui expliqueront peut-être que toutes ces questions sont probablement limitées par l’actue état du cerveau humain, rien ne nous permattant de dire que l’homme actuel est l’aboutissement final de l’évolution.
François, tu écris : "La démonstration si précise et parfaitement argumentée que la notion de "big bang" serait le début de tout, est simplement remarquable."
Cette formulation laisse planer une ambiguïté, malgré le mode utilisé. Il est plus clair de dire : "La démonstration si précise et parfaitement argumentée que la notion de "big bang" n’est pas le début de tout, est simplement remarquable."
J’ai vite vu mon erreur de formulation, mais comme on ne peut rectifier son propre texte (et les fotes), merci de cette clarification.
Le conditionnel est insuffisant.
Il est bien clair que pour Klein, le big bang n’est qu’une phase précise d’une évolution. Il y avait qq chose avant. Il décrit très bien ce phénomène.
Bien à toi, Grand Jacques !
Conférence très intéressante en ce sens que, passé un quart d’heure de physique et d’histoire de celle-ci, elle renvoyait grandement le public à des interrogations existentielles que l’on peut qualifier d’essentielles, notamment sur la notion d’origine, de passé, de représentation du temps, de sens de l’histoire et d’objectifs des sciences.
Etienne ayant redonné sa définition du Big Bang, je me suis surpris à faire des parallèles avec le concept de zéro en mathématiques et ce même Big Bang (et plus généralement les questions d’origines). Si on s’y plonge un peu, la comparaison est vite troublante…
Pour ceux que cela intéresse, je signale qu’Étienne Klein était l’invité de l’émission de France Inter "La Tête au Carré" avec pour thématique la question de l’origine de l’univers.
sites.radiofrance.fr/fran…
Amicalement,
Oliv
Merci Oliv ! Voilà un bon podcast à écouter en voiture ! Il sera disponible dans quelques heures sans doute.
A signaler aussi le colloque Wright tous les soirs de cette semaine à Uni Dufour Genève avec deux Nobel de physique (Ketterle et Gross): la révolution quantique ne fait que commencer !
http://www.unige.ch/presse/archi...
I can’t read and I can’t write
And I don’t know my left from right
I can’t tell if the sun’s gonna shine
And I don’t know if you’ll ever be mine
But I’ll make love to you any old time
I can’t swim and I can’t fly
I ain’t no fish I ain’t no bird in the sky
I can’t tell if the sun’s gonna shine
And I don’t know if you’ll ever be mine
But I’ll make love to you any old time
I can’t count from one to ten
And I don’t know the shape I’m in
I can’t tell if the sun’s gonna shine
And I don’t know if you’ll ever be mine
But I’ll make love to you any old time
Cale, 5, … any old time
dai.ly/9EUi2R
Une intéressante vidéo sur l’intrication quantique…
http://www.tsr.ch/video/decouver...