Fondé au début des années 90 par Jean-Pierre Jullien, le père d’Olivier Jullien, le Mas Cal Demoura fait partie des domaines précurseurs de la qualité en Languedoc. Isabelle et Vincent Goumard y concentrent leur énergie depuis 2004, dans le but d’interpréter avec justesse les grands terroirs autour de Jonquières, au cœur des Terrasses du Larzac. Le domaine est situé dans ce village, à une trentaine de kilomètres au nord-ouest de Montpellier. Le généreux climat méditerranéen est ici équilibré par l’air frais du Larzac voisin. La fraîcheur et l’acidité sont ainsi préservées et les amplitudes thermiques jour-nuit contribuent à la construction d’une palette aromatique complexe. Onze cépages sont cultivés.
Le parcellaire du domaine couvre sur 16 ha des terroirs de cailloutis calcaires et argilo-calcaires, conférant aux vins profondeur et une énergie très particulière. Les rendements sont naturellement très faibles (15 à 25 hl/ha). Au-delà de la culture biologique, le couple a depuis 5 ans mis en place une approche biodynamique afin de renforcer le développement de la biodiversité, de la vie des sols et des défenses naturelles de la vigne. L’approche est adaptée aux spécificités de chaque parcelle : labours superficiels, amendements organiques, enherbement contrôlé, travaux en vert (ébourgeonnage, effeuillages précautionneux). Les vendanges sont manuelles et parcellaires en bacs, avec un tri sévère des raisins à la vigne puis sur table. Les vinifications sont parcellaires et réalisées en douceur, via levures indigènes, en privilégiant l’infusion afin de privilégier la subtilité des expressions. Les élevages sont adaptés à chaque couple cépage-terroir, en foudres, demi-muids ou cuves, pour laisser aux vins le temps de s’affiner.
Terre de Jonquières est la cuvée historique du domaine, elle portait le nom de L’Infidèle jusqu’au millésime 2014. Elle assemble syrah, carignan, mourvèdre, cinsault et grenache, sur des sols argilo-calcaires et des cailloutis calcaires. Elevage parcellaire durant 12 mois en demi-muids de 500/600l et en foudres, puis harmonisation de l’assemblage 4 mois en cuves. Concernant la cuvée mono-parcellaire Les Combariolles, elle assemble syrah, mourvèdre, carignan et grenache sur le (très grand) terroir du même nom, avec des sols de purs cailloutis. La vinification et l’élevage sont similaires à Terre de Jonquières. Les présentations faites, il ne restait plus qu’à goûter ces deux vins en parallèle, donc sur les mêmes millésimes, de 2006 à 2020, les années paires. Ce fut fait en compagnie du géniteur de ces cuvées, Vincent Goumard himself ! En voici le récit.
Terrasses du Larzac, L’Infidèle 2006 : millésime chaud mais plutôt équilibré. Beau nez plutôt frais, à l’évolution normale, en place, sur les fruits noirs, la réglisse. Attaque à la fois dense et séveuse pour un vin buriné par son terroir, relativement ferme et fier dans la trame, vigoureux, épicé dans la saveur, avec une allonge solaire. Grain appuyé mais pas dur. C’est très bon et ça mériterait même un plat de cuisson lente.
Terrasses du Larzac, Les Combariolles 2006 : Le nez est encore plus jeune ici, avec beaucoup de fruit et une intensité supérieure. En bouche, le vin entre avec fougue et une forme de violence, avec une trame plus large et en même remps plus dynamique. Le vin s’allonge avec la même force et se déroule sur une vivacité très dynamique, claquante en finale. Retour sur un côté jus de viande, agrumes, qui est sans doute la signature du terroir.
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Terrasses du Larzac, L’Infidèle 2008 : millésime tardif, frais, pluviométrie bien répartie. On retrouve la particularité aromatique de ce millésime avec le végétal mûr si racé, des notes de thé, de tabac, de tubéreuse. C’est très défini et précis, comme la bouche, qui attaque moins large que 2006 et se développe ascendante, savoureuse, sur les épices, sereine, avec une allonge fine, dans laquelle on ressent davantage le côté cailloutis du lieu. C’est un très beau vin, en place aujourd’hui, prêt à boire.
Terrasses du Larzac, Les Combariolles 2008 : arrivée de la table de tri. Encore une fois on « sort » du millésime avec avant tout un nez de Combariolles. On retrouve les agrumes, l’orange sanguine, le musc et d’autres choses complexes et insaisissables. On a là aussi une forme violence de l’attaque qui fait grand vin du Languedoc. Le vin est uni et insécable, il possède plus de tout, une fougue unique, c’est vraiment un grand vin qui parle fort. C’est long et c’est très bon.
Terrasses du Larzac, L’Infidèle 2010 : grand millésime de fond et d’intensité, en revanche c’était, d’après Vincent, indégustable jeune – premier millésime bio, « raclée » d’oïdium, millésime chaud et sec, de concentration. 20% de mourvèdre cette année-là. Premier nez assez réducteur, sur un côté viande crue, pas très diversifié. Par contre en bouche, le vin possède une intensité et une jutosité fortes, il est incroyablement jeune, la salinité apparaît, la générosité du fruit et de la texture aussi, c’est long, salin et beaucoup plus jeune.
Terrasses du Larzac, Les Combariolles 2010 : Baisse de 30 à 10% de grenache, 15% de carignan. Le nez est plus libéré, on est notablement sur les fruits noirs, la réglisse, avec des accents gourmands de myrtille. Attaque suave et presque visqueuse, le vin est riche dans la texture, luxuriant, là aussi la salinité arrive, les muscles sont gros mais ils sont mieux cadrés et enrobés. Le vin est infiniment jeune en bouche, il s’allonge sereinement, la fougue est domptée.
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Terrasses du Larzac, L’Infidèle 2012 : millésime équilibré mais avec une pression maladie, notamment mildiou. Millésime tardif. Très beau fruit gourmand avec des accents fruités de grenache. Une touche fumée, épicée, musquée, il y a de la race, on pense Rhône sud. Attaque de grande plénitude, très intense, avec une gourmandise augmentée, c’est confortable, juteux, tactile. Un millésime joyeux et de plaisir intense, très bon. Ça goute cailloutis sur la finale, frais.
Terrasses du Larzac, Les Combariolles 2012 : On retrouve les agrumes et l’orange sanguine habituels, presque un nez de Barolo, grande dimension, grand charme. En bouche c’est un torrent de saveurs nobles, ça regorge de nuances de fruits idéalement mûrs, c’est juteux, profond mais accessible, infiniment juteux et brillant en finale, ça scintille, ça s’allonge, c’est interminable, c’est super bon ! Grand vin… de plaisir.
Terrasses du Larzac, L’Infidèle 2014 : millésime le plus compliqué à faire, avec 1000 mm de pluie et 100 mm par semaine à partir de mi-août. Et aussi attaque de la Suzukii. Donc un tri monstrueux. Arrivée d’un nouveau chai en pierre du Gard, qui ne « serre » plus les vins et ne les fatigue plus. Nez bizarre, à la fois végétal et de viande crue. C’est fragile, sans être ridicule. Attaque de demi-corps mais pas creuse, le vin ne tombe néanmoins pas, on retrouve de la gourmandise et de l’intensité, il y a une vraie plénitude. C’est gourmand sans être monstrueux, ça se prolonge bien. Il ne doit pas y avoir beaucoup de 2014 comme cela en Languedoc.
Terrasses du Larzac, Les Combariolles 2014 : Nez « monstrueux » pour le millésime, très intense, avec un grand fruit et une grande netteté, des agrumes et de la cerise, ça pinote même. En bouche il y a une infinie gourmandise, une grande évidence et une réelle densité et allonge : ce vin est littéralement au-dessus du millésime, incrachable !!
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Terrasses du Larzac, Terre de Jonquières 2016 : l’autre bout du spectre par rapport à 2014, millésime très sec, le premier de l’aire moderne. C’est pas très chaud par contre, précoce. Premier millésime en biodynamie. Très petit rendement. 16 hl/ha. Très beau premier nez épicé et fruité, de grand classicisime, posé. Attaque de grande intensité et en même temps sereine, juteuse, sur des notes de coulis de fruit. Tout est en place, la gourmandise est importante, c’est un superbe vin.
Terrasses du Larzac, Les Combariolles 2016 : Premier millésime perçu comme « riche » de la verticale avec un nez cacaoté et des nuances qui évoquent l’élevage. Côté poudré, solaire, plus méridional, on est sur la puissance plus que la buvabilité à ce stade, le vin n’est pas prêt : c’est un monstre qui a besoin de temps pour poser son opulence.
Terrasses du Larzac, Terre de Jonquières 2018 : forte pression mildiou, très peu de carignan. Dans le nez et l’équilibre, on pense à 2012. On arrive sur des nuances poivrées, florales, très Rhône nord pour le coup. En bouche, la fraîcheur prédomine, c’est déjà savoureux, à la fois jeune et accessible, très aérien, vraiment exquis. Si on cherche un millésime à ouvrir jeune, c’est celui-là.
Terrasses du Larzac, Les Combariolles 2018 : A nouveau après 2016, Combariolles goûte beaucoup plus riche et jeune, moins prêt, moins avancé. L’attaque est infiniment juteuse, généreuse et savoureuse, ça regorge de saveurs, le vin est puissant mais demeure équilibré, c’est le développement en bouche qui l’harmonise, la finale est vraiment belle, il est au début de sa vie.
Terrasses du Larzac, Terre de Jonquières 2020 : Grand nez souriant, mûr et frais, solaire mais de grand équilibre, avec les notes de violette typiques des belles syrahs du Languedoc. En bouche on a une grande évidence, une salinité exacerbée, c’est frais et scintillant, très salin, la lumière s’allume. C’est juteux, fin et de grande buvabilité. Très beau vin post-moderne !
Terrasses du Larzac, Les Combariolles 2020 : Ca chocolate-agrumes comme un grand Châteauneuf, c’est une masse de muscle, avec un grand volume de vin. Il s’ouvre sur la cerise, des notes de guignolet. Attaque large et sereine, avec une grande plénitude, le vin nape la langue confortablement, c’est à la fois généreux et posé, il regorge de nuances nobles – c’est de l’essence de vin, tout est en place, c’est trop bon. Grand vin.
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