Comme vous et moi sans doute, il s’inscrit dans une longue lignée de procrastinateurs qui va d’Amiel à Proust, sans oublier Flaubert avec sa marinade… 

Le secret, selon Perry, consiste à passer de l’ajournement pur et simple à la procrastination structurée : « Pour être un travailleur acharné, toujours travailler sur quelque chose d'important, en l'utilisant comme un moyen d'éviter de faire quelque chose qui est encore plus important. » Certains sont devenus célèbres pour moins que cela ! 

Evidemment, ni les lumières du Professeur Perry ni la pléthore d’ouvrages sur le sujet nous aideront à quitter les rivages de la velléité, de la distraction et des délais dépassés.

Et les listes interminables des tâches à accomplir, les post-it égrenés entre le frigidaire et l’armoire à chaussures ? Oubliez-les ! 

Sommes-nous à ce point inconstants, submergés, inattentifs, pour que le présent devienne le lieu d’un insoluble combat entre nos caprices, nos aspirations et l’horizon sombre des échéances qui nous attendent ? 

Que faire ? Faut-il plutôt s’en remettre à la « quantification de soi », autre mot de misère pour décrire une nouvelle forme de flicage personnel à travers la numérisation des différents processus, y compris métaboliques, de sa propre vie ? Ou faire appel à des logiciels d’optimisation temporelle, à des méthodes organisationnelles, dont les noms ont des allures de catastrophe programmée ou de farce : Rescue Time, méthode Pomodoro, etc. Inutile. Comment sauver alors le temps perdu? 

Continuez plutôt à pianoter sur votre portable, à musarder sur les réseaux sociaux, à jongler d’un hyperlien à l’autre, à balancer des tweets que personne ne lira. Nous avons tous la même peur, celle du vide. Pour nous en distraire, nul besoin de stratégies. Il suffit de remettre au lendemain ce qui pourrait être fait aujourd’hui. Ayez l’air débordé en permanence.

La procrastination ne serait-elle pas simplement la peur que quelque chose, un jour, se termine ? 

Article paru dans 24 Heures, samedi 3-4 novembre