– Qu’est-ce qui vous autorise à être si sûr de vous, M. Pratt, parieriez-vous une caisse de ce vin ?
– Bien davantage, M. Shafield, bien davantage, si vous en êtes d’accord…
Tous retinrent leur respiration, faillirent s’asphyxier dans leur propre silence.
Tous souhaitaient en finir au plus vite avec ce suspens…
Et alors, me demanda mon interlocutrice, que se passa-t-il ?
C’était un jour d’avril un peu maussade avec des brumes légères accrochées aux roseaux bordant le petit étang face au château Lagrange. Nous venions de quitter la salle de dégustation, après avoir goûté tous les St-Julien 2007; je demeurai un instant frappé par l’alignement très nippon, un brin concentrationnaire des logements destinés aux vendangeurs. Jancis Robinson à qui je racontais cette histoire paraissait impatiente d’en connaître le dénouement.
– Monsieur a dû oublier ceci près du petit guéridon à l’entrée, à l’endroit où j’ai décanté la Chapelle 1961 avant de vous le servir…
Cette chute est bienvenue car elle stigmatise l’orgueilleux, sauve la jeune fille et, accessoirement, prouve que les connaisseurs sont de fieffés filous ou d’habiles stratèges.
Avant de mourir, en 1986 à Genève, le grand Borgès se servit un verre d’un vin dont j’ai oublié le nom ; peut-être était-ce un de ces nectars poussé dans la montagne de Davalos, à une altitude improbable, un sang noir, minéral et épais, dont un seul verre vous ouvrait les portes d’un autre monde.
Jorge-Luis Borgès, Le sorcier ajourné dans Histoire de l’infamie, histoire de l’éternité.
8 Comments
bonjour Jacques,
par simple curiosité, est ce que la photo du verre serait prise a Irreductibles ?
merci encore pour ces jolis commentaires
Très fort Fredi ! Tu lis dans les verres ? Eh oui, c’est une photo prise aux Irréductibles samedi dernier et dans le verre que trouve-t-on ? Est-ce que quelqu’un peut me dire quel est ce vin incroyable ?
merci Jacques, ayant geré ce paradis de restaurant durant deux ans, c’etait un peu facile.
pour le vin, je dirais au hasard L’Ermita 05 ?
Le hasard, est-ce le nom que tu donnes au prévisible ? Tu as gagné : pour le gage, je te laisse voir avec Alvaro…
Kermitt Lynch évoque avec beaucoup d’émotion dans son livre le souvenir d’un vieux marchand de vins de la région de Tour René Loyau, qui semblait avoir la mémoire absolue du vin. Reçu avec d’autres habitués chez un Hobereau du coin il avait été le seul à reconnaître un vin goûté 20 ans plus tôt et par précaution il avait pris soin d’inscrire le nom sur un morceau de papier qu’il avait glissé sous son chapeau!
Bonjour,
Tès beau reportage et photo qui me touchent habitant Tain l’Hermitage et aux pieds des côteaux. On voit très bien ma maison.
C’est vrai que les vins de l’Hermitage n’ont rien à envier aux autres, bon certins vont me trouver un peu chauvin, pas grave chacun défend sa région…
Merci
Kermit Lynch s’arrêtait souvent ici :
Domaine Raymond Trollat (Saint-Joseph).
Commentaires de Pierre Citerne
Visite dans un chai à l’ancienne. Un accueil simple et convivial, à la bonne franquette. Des vins dotés d’une belle rusticité.
Les vignes sont désormais entre les mains attentives des domaines Gonon, Desestret et Darnaud.
Domaine Raymond Trollat Vin de Pays 2001 :
Notes : DS14 – PC14,5 – LG14,5 – MS(Non noté).
(100% Chasselas)
– Doré, gras, discret aromatiquement mais bien présent en terme de texture, reste frais.
Domaine Raymond Trollat Vin de Pays 1994 :
Notes : DS14,5 – PC15/15,5 – LG15 – MS(Non noté).
(100% Chasselas)
– Robe un peu plus soutenue ; nez fumé, un peu réduit au départ (alliacé, cacahuète) ; bouche cohérente, avec une acidité ferme et cet alliance gras/fumé/salin qui lui donne une cachet particulier et qui convient fort bien à l’excellent saucisson de Madame Trollat.
Domaine Raymond Trollat Saint-Joseph 2004 :
Notes : DS14/13,5 – PC15/15,5 – LG14 – MS(Non noté).
– Frais, poivré, de la mâche, de la finesse, de la vigueur, surtout beaucoup de franchise.
Domaine Raymond Trollat Saint-Joseph 2001 :
Notes : DS13 – PC14,5 – LG14,5 – MS(Non noté).
– Encore dense, épicé, moins de fruité que dans le 2004 mais un beau jus décidé, avec une petite saveur truffée.
Domaine Raymond Trollat Saint-Joseph 1994 :
Notes : DS15,5 – PC15,5 puis 16,5… – LG15,5 – MS(Non noté).
– Robe un peu voilée ; nez extraverti, de gibier, de lièvre au sang (marinade au laurier…), et surtout beaucoup de fruit, rouge, frais, qui ressort de plus en plus à l’aération ! Bouche vivante, glissante, merveilleusement fruitée ; cette inattendue gourmandise est un vrai bonheur, on se ressert.
Domaine Raymond Trollat Saint-Joseph "Vieilles Vignes" (mise Lelektsoglu) 1994 :
Notes : DS13 – PC(13/14) – LG(?) – MS(Non noté).
– Robe plus dense que l’autre 94 ; le nez renarde, paraît plus cuit ; la bouche est fatiguée, sèche, vraiment pas bonne au premier contact, ça va un peu mieux à l’aération, mais les tannins restent rugueux et le fruit fait défaut.
Domaine Raymond Trollat Saint-Joseph 2005 :
Notes : DS14 – PC15,5/16 – LG14,5 – MS(Non noté).
– Encore en cours d’élevage. Robe dense ; nez de confiture (fraise, framboise, myrtille, mûre…), explosif, alléchant. La bouche est encore très chargée en CO2, plus fraîche que le nez, avec un grand fruit frais, des tannins présents.
Série de décembre 2007