Echapper un instant à cette symphonie, ces sortilèges. Pour déguster le dernier né, l'Yquem 2010 Conversation avec Francis Mayeur, le directeur technique du château :
« 2010 n’est pas une année chaude, précise Francis Mayeur, directeur technique d'Yquem. La somme des températures est pile à la moyenne. Mi-juin, nous avons eu beaucoup d’eau au moment de la floraison qui a occasionné de la coulure. Ensuite, du 20 juin au 5 septembre, nous avons eu 80 jours avec seulement 3 jours de pluie, les 6,7 et 8 septembre. Ces pluies ont initié le botrytis.
La grosse différence entre 2009 et 2010, ce sont les vendanges. En septembre et octobre 2009, il a fait très chaud alors que sur la même période, en 2010, on était au-dessous de la moyenne. Nous avons donc eu en 2010 des vendanges extrêmement fraîches. Les 20 et 21 septembre, nous faisons une première trie à Yquem. Il tombe trois gouttes et du 27 au 30 septembre, nous enchaînons avec une deuxième trie. Le 4 et le 10 octobre, nous avons 22 et 28 mm de pluie qui relancent le botrytis. Tout le vignoble est couvert de pourriture noble."

Photo Marilyn Wodcoq
"Grâce à cela, du 14 au 18 octobre, nous rentrons une troisième trie merveilleuse. Le 19 octobre, nous prenons ce pari : celui d’arrêter les vendanges et d’attendre. Nous reprenons les 22 et 23 octobre. Puis, du 26 au 30 octobre, c’est la quatrième trie mais, à ce moment, la vendange commence à être un peu abîmée… Les 4 et 5 novembre, c’est la dernière trie mais celle-ci ne rentre pas dans l’assemblage."

"Chez nous, 2010 est un millésime opulent, avec une grosse récolte : 20 hl/ha de rendement agronomique mais 10 hl/ha à peine en vin fini !
L’écueil à éviter : si on ne se fie qu’aux degrés, on peut être amené à mélanger des parcelles qui sont très différentes. On a séparé les différents terroirs. On découpe les journées de vendange de manière à recréer une échelle qualitative dans cet océan de la vendange. Il y a 20 ans, si on avait eu un millésime semblable, nous n’aurions pas pu faire ce travail de haute couture. Aujourd’hui avec la connaissance que nous avons de chacune des parcelles et une équipe de 200 coupeurs, nous pouvons le faire. Dans les chais, en ce moment, nous avons plus de 50 lots différents.
2010 est un millésime plus classique. Nous sommes à 13.55 degrés d’alcool avec 141 grammes de sucre résiduel et un ph de 3.8. L’assemblage comprend 13 % de sauvignon seulement cette année et 87 % de sémillon. Nous avons choisi les lots sur la netteté et la longueur, privilégiant la fraîcheur et l’éclat. Il y avait des risques d’amers cette année, même dans la troisième trie et nous y avons été très attentifs.
Nous avons choisi de présenter en parallèle avec le 2010, le millésime 1988 qui, selon nos données et sur le plan organoleptique, nous paraît le plus proche du 2010. »
L’écueil à éviter : si on ne se fie qu’aux degrés, on peut être amené à mélanger des parcelles qui sont très différentes. On a séparé les différents terroirs. On découpe les journées de vendange de manière à recréer une échelle qualitative dans cet océan de la vendange. Il y a 20 ans, si on avait eu un millésime semblable, nous n’aurions pas pu faire ce travail de haute couture. Aujourd’hui avec la connaissance que nous avons de chacune des parcelles et une équipe de 200 coupeurs, nous pouvons le faire. Dans les chais, en ce moment, nous avons plus de 50 lots différents.
2010 est un millésime plus classique. Nous sommes à 13.55 degrés d’alcool avec 141 grammes de sucre résiduel et un ph de 3.8. L’assemblage comprend 13 % de sauvignon seulement cette année et 87 % de sémillon. Nous avons choisi les lots sur la netteté et la longueur, privilégiant la fraîcheur et l’éclat. Il y avait des risques d’amers cette année, même dans la troisième trie et nous y avons été très attentifs.
Nous avons choisi de présenter en parallèle avec le 2010, le millésime 1988 qui, selon nos données et sur le plan organoleptique, nous paraît le plus proche du 2010. »

Non, non, ce n'est pas un nouveau super groupe de rock…
Avec mes amis italiens, Rizzari, Masnaghetti et Gentili – Photo MW.
La dégustation de l'Yquem 2010 loin des rumeurs et des chants : de la pureté, de l’élégance, un raffinement aromatique et un côté cristallin, très tendu, dynamique, malgré la richesse en sucre qui ne se perçoit pas. Un vin sublime. Au moins aussi grand que le 2009. Et comme ce dernier était déjà la perfection, quel qualificatif inventer ? Quant au 1988, je n’en ai pas dégusté la moindre goutte. Frustration. J’ai longuement conversé avec Francis Mayeur et lorsque je me suis approché du buffet, tout était plié, la messe était dite…
Qu’est-ce qu’on a écouté sur la route du retour en direction de Pauillac ? Le silence ? La musique des anges ? Non : Haendel, suite no 1, cahier no 2 au piano par Racha Arodaki. Et c’est tout !
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Acidité totale 3,8 ?
Bien vu, Marcus : 3.8 c’est le ph évidemment. Je retrouverai le chiffre exact de l’AT. Merci !
Sandrine Garbay nous avait ouvert, entre autres, 2009 et 1988, tous les 2 magistraux !
Grand niveau de liquuer, à l’instar du 2001.
Sur 1988, je trouve Climens transcendant !
Merci pour ce très bel article Jacques. Pour étayer les propos de Francis, nous avons depuis réaliser cette courte vidéo où il s’attarde sur les conditions météorologiques de la phase végétative en 2010. A suivre une vidéo sur la phase des vendanges, là aussi graphiques à l’appui.
Le lien vers la vidéo est ici : vimeo.com/23305622