Le décor est sublime. A couper le souffle. Un diadème de 4000. Dans l’ordre en partant de la gauche, le Bishorn (notre but de demain), le Weisshorn, le Rothorn de Zinal, l’Obergabelhorn et l’incomparable Dent Blanche.
Et là, sur le fil de l’arête qui plonge vers le vallon de Tracuit, un vaisseau transparent de verre et d’acier où se reflète le paysage. C’est le tout nouveau refuge de Tracuit situé à un peu plus à 3256 mètres. Une réalisation architecturale visible de très loin, posée en équilibre sur le flanc de la montagne.
Et l’ancien refuge ? Pfuit ! Disparu… Après 84 ans d’existence, il a tout simplement disparu, démonté pierre après pierre.
Je suis monté à deux reprises à Tracuit récemment. Chaque fois, après avoir franchi la petite cheminée équipée de chaînes, j’ai éprouvé cette sensation en voyant cette étrange construction, celle d’une vision esthétique épurée, avec une empreinte architecturale forte, mais intégrée.
Bravo à l’atelier d’architecture sédunois Savioz & Fabrizzi pour cette réalisation !
La deuxième fois, c’était il y a une quinzaine de jours. Un coup de fil d’un ami vigneron, Maurice Zufferey. « Les vendanges approchent. Juste avant, nous aimerions monter demain à Tracuit et faire le Bishorn, ça te tente ? » Voilà sans doute la meilleure façon de se mettre en forme pour les vendanges.
Feu. Flamme. Partis !
Un autre vigneron valaisan fait partie de l’équipe, Ferdinand Bétrisey, qui, après trente ans d’enseignement, a entamé la plus belle partie de sa vie, il y a quelques années, en réalisant son rêve : produire son propre vin.
A cette période de l’année, le refuge n’est plus gardé et il faut monter toutes ses provisions, ainsi que les vins que nous dégusterons face à un panorama absolument superbe, avec ses lumières qui changent sans cesse : les prévisions météo annonçaient du beau temps mais la dépression est arrivée en fin d’après-midi avec un léger grésil et des bourrasques. Les grandes baies vitrées qui descendent jusqu’au sol font du refuge un écrin ouvert sur l’horizon. A l’intérieur, les panneaux de pin donnent un ton chaleureux au refuge.
L’isolation parfaite et les panneaux solaires assurent une température constante, malgré la température extérieure plutôt fraîche pour la saison.
On fait du feu dans le grand poêle afin de faire fondre la neige.
Et surtout, après la rude montée (compter 4 à 5 heures depuis ZInal), on se prépare à prendre l’apéritif. Un lumineux Chablis 2011 de Thomas Pico (pour les verres, on se contentera de petits gobelets à l’ancienne).
Un Diolinoir 2002 à la texture somptueuse. C’est un des premiers vins produits par le sieur Bétrisey. Puis, un Orchis 2011, l’assemblage que nous avons créé avec Maurice Zufferey.
Nous parlons du vin, d’huile d’olive, de la course de demain, de la beauté du monde.
Dehors, c’est le baston et le refuge tangue de plus en plus fort. Il faudrait baisser la voilure, mais comment ? Le temps se lèvera-t-il demain ? Aurons-nous la joie d’assister au lever du jour en montant au Bishorn ?
Réponse ci-dessous, sur la photo prise dans le brouillard et le vent qui souffle. Où l’on retrouve nos deux vignerons en conciliabule durant la tempête.
3 Comments
Monté d’une seule pièce ce refuge ? Et un beau jour blanc pour suivre le Chablis : tss…
François, je ne pense pas que ce refuge ait été monté d’une seule pièce. Quel hélicoptère serait capable de le hisser à cette hauteur, d’autant que la portance diminue sérieusement à cette altitude. Donc, le refuge a vraisemblablement été assemblé comme un Mécano. Dis, tu t’en souviens, quand tu y jouais ? En revanche, ce qui a été monté sur place. C’est le Chablis et les autres vins, l’huile d’olive, etc Et crois-moi, les sacs étaient lourds. Quant à l’expérience de « cuisiner » sur un bon vieux fourneau à bois, après avoir au préalable fait fondre quelques kilogrammes de neige pour avoir de l’eau, elle est extraordinaire. Je m’étonne même qu’on n’ait pas encore imaginé un épisode de Top Chef !
… me rappelle l’époque où j’étais plongeur, deux étés de suite, à l’Albert Premier avant d’aller gambader en fin de saison sur l’Aiguille du Tour où on partait après avoir servi les petits déjs et on revenait avant les autres cordées pour préparer leurs en-cas !
Toute une époque 🙂