Petite dégustation de saké pour se mettre en jambes. De la célèbre maison Masuizumi basée dans la préfecture de Toyoma. J’ai adoré le Junmai Dai-Ginjo spécial élevé en fûts, onctueux et complexe.
Un grand silence déploya ses ailes sur la salle et, durant un long moment, nous n’entendîmes plus que le cliquetis des couverts et le froissement des buccinateurs. On eût dit tout à coup un banquet des comices agricoles avec LPV (le Petit Vialette), tout étonné d’être là, si frêle, au milieu de ces colosses attendris.
La plupart souhaitèrent même être servis une nouvelle fois ! Nous étions tout à coup rentrés au pays, dans cette bonne vieille France éternelle avec ses plats du terroir.
Heureusement pour les Japonais, Bruno Ménard a serré les dents et il est resté : aujourd’hui il a conquis ses trois étoiles au Michelin et, selon François Mauss, qui y a mangé plusieurs fois, c’est entièrement mérité. Son velouté de Saint-Jacques et royale de laitance de cabillaud est, de l’avis unanime de ceux qui y ont goûté, sublime !
Arrive enfin l’assiette de bœuf grillé dans la cheminée, du filet et du contre-filet de quatre provenances différentes :
• le Kobé (en provenance d’Osaka)
• le Saga (en provenance de la région de Kinshu)
• le Hida (en provenance de Nagoya)
• le Sendai (en provenance du nord de Tokyo)
Le bœuf de Kobé fait partie de la mythologie culinaire du Japon. Aujourd’hui, il est connu dans le monde entier et son prix est à la hauteur de sa réputation. Pourtant, les Japonais ne consomment de la viande que depuis à peine plus d’un siècle et demi. Le bouddhisme et le shintoïsme ont en effet longtemps frappé d’interdit toute chair d’origine animale. Vers la fin de la période Edo (1615-1868), les rares personnes qui exerçaient la profession de boucher étaient d’ailleurs soit des parias, soit des reprise de justice. A propos du bœuf de Kobé, le plus célèbre, une légende perdure, celle selon laquelle il serait nourri à la bière… Selon mes contacts locaux, seul le bœuf de Hida (près de Nagoya) ingurgiterait régulièrement de la bière. En revanche, il est vrai que les différentes sortes de bœufs très prisés par les Japonais, Kobé, Saga, Hida et Sendai, vivent en stabulation libre (d’où leur tendance à la surcharge pondérale) et sont massés régulièrement à l’aide d’un système de rouleaux, ce qui contribue à une meilleure pénétration de la graisse dans les chairs.
Un mot sur les prix : au Japon, ils oscillent entre 150 et 320 frs suisses le kg. Compter trois fois plus cher pour du Kobé, si vous souhaitez en acheter en Suisse (ça peut se trouver…)
Au final, dans ce match impitoyable, le Kobé et le Hida l’ont emporté, à mon goût et à celui des chefs français. Il s’agit évidemment d’une viande très grasse, très fondante, d’une texture quasi décadente mais sublime de goût, indescriptible.
Le restaurant
Pachon, Hillside Terrace B-1, 29-18, Sarugaku-cho, Shibuya-ku, Tokyo
t. 03-3476-5025
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