Las, depuis que l’un de mes amis en a parlé sur un site très savant, ces vers flottent sur la toile ; il est désormais trop facile d’en repérer la source, ainsi que sa dédicataire, la flamboyante et frivole Méry Laurent dont l’auteur, le marmoréen Mallarmé, aurait été l’amant. Mais, avant de poursuivre, écoutez plutôt :
Méry Laurent aux seins nus, par Manet (vers 1869).
S’il n’y avait qu’un seul qualificatif pour décrire la vie de Méry Laurent (1849-1900), ce serait celui-là : romanesque. La femme-enfant trop tôt conquise, le mariage contraint avec un épicier. Très vite, la séparation. Tout s’enchaîne à ce destin. Seule dans Paris à 16 ans. Ses charmes, sa beauté insolente, feront le reste.
Avec une grâce innée, elle franchit les cercles de la vie galante du second empire, Les promenades au Bois, les soupers fins chez Tortoni, les soieries et les tissus imaginés par Worth, le train de vie assuré par ce bon Thomas Wiltberger Evans, aussi discret que prodigue.
Elle est courtisée, espère une carrière d’actrice. Elle apparaît nue sur scène, plastique lourde, chair opulente, dans le ton de l'époque, avec son sourire de « bébé anciennement primé ». Elle est Nana ! La mangeuse d’hommes. Des princes (Metternich), des peintres (Manet), des artistes, des poètes (Hugo, Gautier, Coppée), rêvent de se noyer dans ce regard céruléen, s’abîmer parmi cette tranquille audace ; Mallarmé, vieux faune « à la flûte indécise » songera à l’asseoir dans un bosquet et, qui sait, se sustenter peut-être à « l’arôme émané de Mary ».
Elle est courtisée, espère une carrière d’actrice. Elle apparaît nue sur scène, plastique lourde, chair opulente, dans le ton de l'époque, avec son sourire de « bébé anciennement primé ». Elle est Nana ! La mangeuse d’hommes. Des princes (Metternich), des peintres (Manet), des artistes, des poètes (Hugo, Gautier, Coppée), rêvent de se noyer dans ce regard céruléen, s’abîmer parmi cette tranquille audace ; Mallarmé, vieux faune « à la flûte indécise » songera à l’asseoir dans un bosquet et, qui sait, se sustenter peut-être à « l’arôme émané de Mary ».
Mallarmé photographié par Nadar.
Alors, de cette évocation, anticipons l’augure, attisons cet autre souvenir, plus proche de nous. Le voici :
« Je me faisais extrêmement adroit, je multipliais les trouvailles amoureuses, sans réussir à obtenir d’elle mieux que de courts frissons.
Parfois, elle fixait sur moi ses yeux jaspés qui devenaient soudain noirs. Il y montait des éclats pareils à ces bulles dans les flûtes à champagne éclairées par les bougies des candélabres. On eût dit qu’elle allait parler. Puis cela passait. Le soin qu’elle mettait à retenir ses paroles faisait sa bouche plus petite. Il n’y avait pas place pour deux sur la route où elle s’engageait. »
Parfois, elle fixait sur moi ses yeux jaspés qui devenaient soudain noirs. Il y montait des éclats pareils à ces bulles dans les flûtes à champagne éclairées par les bougies des candélabres. On eût dit qu’elle allait parler. Puis cela passait. Le soin qu’elle mettait à retenir ses paroles faisait sa bouche plus petite. Il n’y avait pas place pour deux sur la route où elle s’engageait. »
Un style, l’évocation d’une atmosphère, un brin délétère : de qui est-ce ?
A vos souvenirs de lecture ! Et n'oubliez pas de formuler vos hypothèses !
La musique que vous entendez en ce moment précis : Mozart, Die Zauberflöte, Ach, ich fühl's chanté par Natalie Dessay
9 Comments
C’est assez grivois tout cela , non ?
Habiller de mots choisis en harmonie une envie naturelle, un besoin physique avouable ou non, n’est-ce point là un des buts de la poésie ?
"Déchirure entre l’acte et la pensée de l’acte" : c’est de qui ça, déjà ?
Je passe mon tour pour le quizz. Par compte c’est la première fois que j’entends Nathalie Dessay chanter en allemand et force de constater que la langue de Goethe lui va bien au timbre. Souvent chez d’autres de ses conseurs c’est un peu "brutal" mais là son allemand reste léger, soulignant la délicatesse de la musique de Wolfgang Amadeus. Pas mal !
Etonnant comme la photo de Nadar fait "peinture"…
Une chair triste ?
Une bibliothèque épuisée ?
Eloge de la fuite …
Grivois ? Chair triste ? Non mais !…
Mal Armé Pour La Vie,
Votre pseudo est un kakemphaton ?
Je trouve l’expression "se sustenter peut-être à « l’arôme émané de Mary " joliment sensuelle.
Ah oui, joliment dit ! mais…
"Cet Icare oublié qui remontait les cieux,
Ce Phaéton perdu sous la foudre des dieux…" qu’en fera-t-on de Phaéton ?
Qu’en fera-t-on de Phaéton ?
bonne question, faudrait demander à Jorg Haider là où il est aura-t-il peut etre le réponse!
………peut être aura-t-il la réponse…….
https://www.youtube.com/watch?v=BO8wRMUneO0