Au cours du premier semestre de l’Ecole du vin qui s’achève, nous avons eu le grand plaisir de recevoir à nouveau Jacky Rigaux pour une soirée Bourgogne mémorable, consacrée à deux villages frères de la Côte de Beaune, Volnay et Pommard.
S’ils semblent proches sur le papier, ces deux finages sont bien évidemment distincts dans leur configuration et dans les vins qui en découlent (sic). Le village de Pommard est situé en débouché d’une large combe, qui forme pratiquement une vallée et coupe l’appellation en deux. Ici coule l’Avant Dheune, qui rafraîchit et humidifie légèrement l’air des parcelles les plus proches. La partie nord de l’appellation tire vers Beaune, tandis que la partie sud regarde Volnay, avec la présence d’un grand cône de colluvions. En moyenne, on observe un degré d’écart entre Pommard – plus frais – et Volnay. Le finage de Volnay est en fait une seule colline, qui possède simplement une petite combe sise en son centre, mais cette dernière est moins fraîche et importante que celle de Pommard. Tous les climats regardent vers l’est, avec des variations pour chacun, évidemment. Le climat y est donc un peu plus chaud, avec une maturation un peu plus harmonieuse des raisins en général. On notera enfin qu’entre autres particularités géopédologiques, à la sortie du village de Pommard, on observe une faille en allant sur Volnay, avec une remontée d’oolithes ferrugineuses, notamment dans le climat des Rugiens réputé la longévité des vins qui en sont issus.
Après avoir pris connaissance de ces quelques bases techniques, les amateurs d’un soir sont donc passés à l’exercice pratique et, de fait, à la dégustation d’une sélection de crus prestigieux, dans l’ordre suivant :
Volnay Clos des Chênes 1er Cru 2007 Domaine Michel Lafarge : Du végétal avec des notes de feuille froissée, de fruits rouges acidulés : nez discret, peu intense, qui s’ouvre doucement sur des nuances fruitées, vanillées. Bouche moins « acide » que le nez sur l’attaque, de demi-corps, filiforme, glissante, plutôt bonne, mais l’interprétation de ce millésime difficile par ce vigneron réputé semble néanmoins limiter l’expression du terroir.
Volnay Les Champans 1er Cru 2006 Domaine Joseph Voillot : Beau dégradé aromatique sur la griotte ; nez encore jeune, classique, qui prend à l’air des accents d’épices. Attaque suave et charnue pour ce vin ample, gras, épicé dans la saveur. Il s’exprime en largeur et se goûte solaire (impact du millésime), expansif, un poil pesant, mais intègre. Belle allonge salivante.
Volnay Champans 1er Cru 1999 Domaine Marquis d’Angerville : Nez légèrement fauve, pas très intense, un peu terne. Le vin est en fait plus lent à s’ouvrir. La bouche est par contre épanouie, avec une belle texture et une sensation de chair. Vin complet, sérieux, avec un corps « en tunnel », encore jeune et sans dilution (contrairement à nombre de 1999). C’est très bon, avec un supplément d’allonge par rapport au précédent, mais peut-être (sans doute) que le millésime aide !
Le Santenots, un terroir pas comme les autres, autrefois classé Tête de cuvée par le docteur Lavalle !
Volnay Les Fremiets 1er Cru 2010 Domaine Henri Boillot : Réducteur au premier nez, alors qu’il ne l’était pas à l’ouverture, le vin est très centré sur le fruit, avec un boisé et même un « réduit de bois » persistant. L’attaque est assez vive avec une acidité percutante, un boisé là encore séveux, et une sensation de verdeur mordante. Vin replié, dur, tous tanins dehors, possédant peu de charme en l’état et qu’il semble urgent d’attendre.
Volnay Clos de la Bousse d’Or 1er Cru MONOPOLE 2010 Domaine de la Pousse d’or – MAGNUM : Nez moderne mais précis avec un élevage de qualité et juste ce qu’il faut de toasté. Il caramélise un soupçon à l’aération. Belle texture arrondie sur l’attaque, le vin est serré et nerveux dans la trame, mais plus harmonieux dans le rendu de fruit, la texture et la maturité. Un cru relativement vineux, avec juste une petite chaleur alcoolique à ce stade en finale. En confiance pour la garde.
Volnay Les Taillepieds 1er Cru 2009 Domaine De Montille : Très beau nez de vendange entière tirant sur la rose, avec un végétal marqué mais très noble, ainsi qu’une fraîcheur importante pour le millésime (soupçon de cassis, menthe poivrée, et des parfums de vinifications beaujolaises typiques des raisins entiers). Attaque discrète mais ciselée, grand raffinement de texture, saveur de pinot non égrappé d’une noblesse indicible, vin hyper élégant, au style intemporel, indémodable. On le boirait déjà, même s’il va sans doute vieillir longtemps.
Volnay Clos des Ducs 1er Cru MONOPOLE 2009 Domaine Marquis d’Angerville : Très beau nez confit, doux et sensuel, avec une dimension d’agrumes et de liqueur, épicé : on « plonge » dedans, c’est intrigant et surtout racé. La chaleur du millésime est plus en avant ici. Grande bouche large et suave, fondante, hyper savoureuse, longue et profonde, à la texture magnifique. C’est difficile à cracher ! Un Grand Cru à lui tout seul, au niveau de la réputation de son terroir et de son producteur, historique.
Volnay Les Caillerets 1er Cru 2009 Domaine Jean-Marc Bouley : Légèrement réducteur de prime abord mais assez plein, mûr et dense au niveau aromatique, c’est un vin moderne mais bien construit. Il prend même de la fraîcheur et du fruit à l’air, et se met à mentholer. Belle attaque charnue et pleine de fruit, qui se déploie sur une impression « calcaire » : le vin est croquant et salivant, mûr mais sans excès, très bourguignon dans le tanin. Un vrai pinot de terroir, juteux, parfaitement exécuté. Compte tenu de son prix encore raisonnable, il mérite largement d’être recherché !
Volnay Santenots-du-Milieu 1er Cru 2009 Domaine des Comtes Lafon : Grand nez de ronce, de tabac, goudron, épices très nobles (cannelle, girofle), à la fois dense et posé, solaire, affichant une forme de force tranquille, singulièrement différent des autre Volnay 2009 goûtés ce soir là. Attaque séveuse, qui précède une bouche hyper vineuse, légèrement boisée mais avec une épaisseur et profondeur de Grand Cru. C’est un vin gras, puissant, ferme, construit pour la longue garde, hyper complet. Un futur cru de collection, aux accents quasi nuitons.
Pommard Les Bertins 1er Cru 2010 Domaine Chantal Lescure : Boisé luxueux un peu en avant à ce stade de la vie du vin, mais fruité sexy et sensuel et sensation de chair sous-jacents. On retrouve l’élevage en avant dans la saveur (comme tous les 2010 goûtés ce jour là) mais la texture n’est pas abimée et le vin paraît suffisamment riche pour l’intégrer. Superbe jus. En confiance pour la garde…
Pommard Les Frémiers 1er Cru 2010 Domaine de Courcel : Grand nez de fleurs, hyper raffiné, avec une maîtrise de la vinification en raisins entiers patente et un charme aromatique irrésistible. Fraîcheur du millésime sur l’attaque, renforcée par le style de vinification. On admire la texture fine alliée à la fermeté du tanin et de la trame : le vin a juste ce qu’il faut de réserve et s’allonge sur la rose et le poivre. A la fois ferme et délié, il possède beaucoup de qualités et promet dans le temps.
Pommard Les Pézerolles 1er Cru 2010 Domaine de Montille : De prime abord, il offre le nez le plus discret de la série, mais s’ouvre doucement à l’aération. Par contre on découvre ici la texture la plus suave et charnelle imaginable pour un pommard jeune, qui nous fait dire que des raisins entiers se mêlent sans doute à des raisins égrappés. Le vin offre maturité, chair, étoffe, mais sans aucune dureté. En rien identifiable aux clichés qui collent aux basques de la commune, il est charnel, sexy, presque bon à boire dès maintenant et très difficile à cracher. Décidément, les De Montille tutoient les sommets !
Alix de Montille (dr.) et son père – Source www.wineterroirs.com
Pommard Grand Clos des Epenots 1er Cru 2008 Domaine de Courcel : Il s’ouvre lentement avec une vraie profondeur de nez (notes d’épices, fond floral discret et retenu). Attaque charnue mais grain ferme, comme sur le Pommard Frémiers du même domaine, avec une trame qui se resserre et une virilité noble. Vin très corsé, nerveux, à l’acidité vive renforcée par l’équilibre classique du millésime. Mais c’est mûr et profond, plus abouti que le cru qui a suivi et issu pourtant du même millésime.
Pommard Clos des Epeneaux 1er Cru MONOPOLE 2008 Domaine du Comte Armand : Nez diffus et réduit de « grain de café », avec également des notes de croute de fromage. Bouche en dedans, à la saveur manquant également de pureté, dotée d’un boisé un peu sec et séveux. Du corps, mais il manque d’éclat et de pureté dans la construction, et ne parait pas au niveau du terroir. A revoir.
Pommard Rugiens-Bas 1er Cru 2009 Domaine Aleth Girardin : Un peu flou au nez à ce stade mais plutôt solaire, épicé, il s’ouvre sur des nuances de fruits noirs confits ; la bouche poursuit dans ce registre aromatique et se goûte ample, avec une texture relâchée. C’est un vin gourmand, fruité, mais qui n’a pas le délié et la précision dans la nuance des autres terroirs goûtés ce jour là. Le 2011 goûté depuis au domaine nous a fait une toute autre impression, et se montrait davantage à la hauteur de la très vieille vigne et du terroir, qui sont ici de premier ordre. A suivre !
Pommard Croix Noires 1er cru 2003 Domaine de Courcel : Premier nez archétypique du millésime avec des nuances de pêche rôtie, de clafoutis de cerise, d’abricot et de mangue, rappelant quasiment certains nebbiolo (impact du millésime). Bouche charnue et riche, encore ferme dans l’allonge, mais sans dureté excessive. On peut parier sur le vieillissement, mais c’est un vrai 2003, qui ne se renie pas.
Un grand merci à Jacky Rigaux, pour cette soirée conduite avec brio. Comme toujours !
Comment
La classe ! Comme d habitude les transalpins assurent!!!!!merci pour ces commentaires précis et délicieusement épicuriens. !!a bientôt
François-